Luana figlia della foresta vergine
Autres titres: Luana la fille de la jungle / The Girl Tarzan / Luana la mujer Tarzan
Real: Roberto Infescelli
Année: 1968
Origine: Italie
Genre: Aventures
Durée: 89mn
Acteurs: Mei Chen Chalais, Glenn Saxson, Evi Marandi, Raf Baldassarre, Pietro Tordi, Alfred Thomas, Giovanni Ivan Scratuglia...
Résumé: Quelques années après le crash de l'avion dans lequel son père trouva la mort sa fille Isabel organise une expédition dans la jungle africaine afin de retrouver l'épave et élucider les circonstances mystérieuses de l'accident. Partent avec elle son oncle, un bel aventurier et ses hommes. Dés leur arrivée quelqu'un les empêche de progresser dans leurs recherches. Après bien des péripéties et avec l'aide inopinée d'une belle sauvageonne considérée comme une déesse par les tribus indigènes ils parviendront à retrouver l'avion et découvrir la vérité sur l'accident...
A la fin des années 60 le cinéma de genre italien vit revenir en force sur ses écrans le film d'aventures de jungle, très en vogue dans les années 40 et 50 à travers notamment les oeuvres consacrées à Tarzan, le célèbre personnage imaginé par William Burroughs. Ce sont ses dignes héritières qui lui succédaient là, sylvestres héroïnes au prénom tous plus exotiques les uns que les autres affublés de qualificatifs qui laissaient place aux fantasmes les plus débridés. Ainsi vit-on débarquer Samoa reine de la jungle, Tarzana sexe sauvage, Eva la vierge de la jungle, Gungala la vierge de la jungle suivi de Gungala la panthère noire
et Luana la fille de la jungle née de l'imagination du réalisateur-producteur Roberto Infascelli à qui on doit également un polar de bon aloi La polizia sta a guardare / Le grand kidnapping, son second et ultime film avant sa mort prématurée à tout juste 38 ans.
Quelques années après que l'avion de son père se soit écrasé en pleine jungle africaine, la ravissante Isabel organise une expédition afin de retrouver l'épave de l'appareil et élucider les étranges circonstances de l'accident dans lequel son père, un scientifique notoire, a trouvé la mort. Elle sera accompagné d'un aventurier, George Bennett, de son fidèle compagnon Bongo ainsi que de son oncle Norman, plutôt réticent à cette expédition.
L'attention de George est attiré par un bracelet en forme de serpent que porte Isabel. Il lui rappelle étrangement le médaillon qu'il avait entraperçu au cou d'une jeune indigène qui lui avait sauvé la vie quelques temps plus tôt alors qu'il était poursuivi par une dangereuse tribu. Sous l'effet des flèches empoisonnées il avait perdu connaissance. Dés leur arrivée au coeur de la jungle la petite organisation connait bien des soucis. Selon toute évidence quelqu'un veut les empêcher à tout prix de retrouver l'avion et découvrir ainsi le secret de l'accident. Fort heureusement une belle indigène, Luana, veille sur eux. Considérée comme une déesse par les tribus sauvages qui la vénèrent elle a tout pouvoir sur les animaux et la
forêt. De nombreuses fois elle sauvera la vie aux membres de l'expédition sans que personne ne se doute de rien. Luana finira par se montrer, très attirée par George qui reconnait en elle la fille qui autrefois l'a soigné. Elle mènera l'expédition au lieu du crash. Ils découvrent dans l'avion un petit carnet écrit de la main du scientifique. Il y mentionne le nom du traitre qui n'est autre que l'oncle d'Isabel. Norman voulait garder pour lui seul la découverte du scientifique, une gigantesque plante cannibale qui fabrique une puissante drogue. Grâce à George et Luana Norman sera mis d'état de nuire. Il ne reste plus à Isabel et George qu'à rentrer chez eux en laissant derrière eux Luana, en fait la demi-soeur de Isabel.
La jolie sauvageonne a fait son choix, celui de rester dans la seule maison qu'elle connait: la jungle.
Même s'il est bâti sur le même modèle que les films de ses confrères celui de Infascelli reste un des plus ludiques, un des plus frais malgré le manque évident de moyens d'où cette jungle reconstruite quasi entièrement en studio mais qui fait parfaitement illusion, qui parvient même à flatter l'oeil voire fasciner. L'antre marécageuse, sublime, où vit la plante cannibale a quelque chose d'irréel, de fantastique qui d'emblée séduit. L'histoire suit la trame traditionnelle de ce type d'oeuvres: un crash d'avion quelque part au milieu de la jungle
suivi d'une expédition qui part à sa recherche pour une raison x, une aventure qui n'est pas sans risque puisque pimentée de moult périls le tout égayé par la présence d'une belle sauvageonne plus ou moins dispensable. Avec ces éléments de base Infascelli réalise un petit film exotique franchement sympathique qui jamais n'ennuie en raison d'une action quasi continue, ce dés l'ouverture, la poursuite échevelée d'une bande d'aventuriers vite décimée par une tribu sauvage (des indigènes recouverts de peintures tribales et de longues perruques en paille usant de fléchettes empoisonnées) et l'apparition salvatrice de Luana. Un petit plus à ce film, un des rares si ce n'est le seul à dévoiler sa belle Tarzanne dés les
premières images. On est ensuite projeté quelques années plus tard, dans un tripot où la populace noire (quelques simples figurants) se déhanche sur des airs jazzy ringards pendant que la blanche Isabel organise son expédition auprès du séduisant baroudeur, l'occasion aussi pour Infascelli d'introduire son vilain, Ukeke, un noir obèse qui obéit aux ordres d'un mystérieux correspondant. Un meurtre et nous voilà en pleine jungle. Tout va vite mais on ne s'en plaindra pas. Aucun temps mort, pas de bavardage inutile ni de longueur. Place à l'aventure et aux mésaventures qui s'enchainent dans la joie et la bonne humeur, avec souvent humour puisqu'il est ici un des moteurs du film ne serait-ce qu'à travers la relation de George et Isabel.
Quant aux péripéties elles sont souvent inventives, plus particulièrement le bras de fer entre George et Ukeke dans le cercle où deux scorpions mortels n'attendent que l'instant de piquer le perdant, la fulgurante tempête qui s'abat sur l'expédition sans oublier l'attraction principale du film, l'énorme plante anthropophage, sorte d'immense anus rouge et vert caoutchouteux qui engloutira sans mal le corpulent Ukeke. Qui dit jungle dit araignées et c'est une belle tarentule qui s'introduit sous la tente d'Isabel, une arachnide plus drôle qu'effrayante puisque budget miséreux oblige il s'agit là d'une tarentule mécanique qui avance de manière lourdaude vers le lit de la damoiselle anticipant d'une certaine façon les araignées de L'au delà de Fulci.
L'interprétation, toujours juste, est menée de main ferme par le solide américain Glenn Saxson, l'oeil bleu, le sourire carnassier, qui immortalisa par deux fois Kriminal flanquée de la ravissante grecque Evi Marandi (La planète des vampires et une tripotée de sous James Bond à l'italienne) et d'une incontournable gueule du Bis transalpin Raf Baldassarre (Bongo). Autour d'eux tourbillonnent le girond Pietro Tordi et le générique de couleur Alfred Thomas, parfait dans le rôle du méchant Ukeke entourés de figurants noirs pour simuler d'une part les sherpas peureux d'autre part les sauvages typiques cachés sous leurs maquillages de guerre et leurs magnifiques perruques en paille. On sourira cependant
lorsque sous le masque du grand sorcier on aperçoit lors d'un plan furtif un bout de menton... blanc!
Quant à Luana, c'est la vietnamienne Mei Chen Chalais qui se glisse dans son micro pagne. Si bien souvent on attribue à l'irremplaçable birmane Me Me Lei le titre de première icône asiatique de la jungle c'est oublier que Mei Chein fut trois ans avant Cannibalis de Lenzi la première fille de la jungle d'origine orientale. Menue, plutôt discrète, loin des bombes que furent notamment Femi Benussi et Kitty Swan (respectivement Tarzanna et Gungala) et de leurs stupides minauderies Mei Chen, accompagnée de l'indispensable chimpanzé et d'une
panthère noire, joue beaucoup plus sur son coté mutin, espiègle, presque candide pour séduire tant notre baroudeur que le spectateur. Même si contrairement à ses consoeurs elle ne dévoile jamais une totale nudité, même si ses seins sont la plupart du temps cachés par ses long cheveux de jais, même si elle préfère se déplacer de liane en liane plutôt que de courir nue à travers la jungle, Mei Chen sans être particulièrement belle a un charme irrésistible qui finit par attendrir et faire craquer. Plus subtile et surtout inédite est cette ombre de saphisme qui plane sur cette jungle. Impossible de ne pas remarquer que Luana semble fascinée par Isabel qu'elle ne cesse d'épier, d'observer, toute émoustillée dirait-on de la voir
nue dans la rivière. Certes l'interprétation est à double sens mais est elle aussi innocente qu'on pourrait le penser. L'ombre du doute plane elle aussi et rend plutôt excitante cette relation délicatement ambigüe.
Seul véritable rôle de sa très courte carrière d'actrice Mei Chen, fille d'un grand général qui parvint à fuir avec sa mère les horreurs du Vietnam, épousera en 1970 l'écrivain et grand critique de cinéma François Chalais avant de venir à son tour écrivain et réalisatrice.
Frais, ludique, enjoué, esthétiquement charmant avec sa fausse forêt vierge au style
paradisiaque agrémentée de stocks-shots africains tout à fait crédibles, joliment amené par une partition musicale signée Stelvio Cipriani, souligné par ce zeste de racisme bon enfant qu'on aime tant, doté d'une brochette de comédiens sympathiques qui s'amusent autant que nous Luana fille de la jungle est un petit film de jungle qui a tout pour séduire et divertir, peut être même s'agit-il d'un des meilleurs du genre.