Gli assassini sono nostri ospiti
Autres titres: Les assassins sont nos invités / The killers are our guests
Real: Vincenzo Rigo
Année: 1976
Origine: Italie
Genre: Polar / Noir
Durée: 89mn
Acteurs: Antonio De Teffé, Margaret Lee, Luigi Pistilli, Gianni Dei, Livia Cerini, Giuseppe Castellano, Sandro Pizzochero, Marino Campanaro, Giovanni Brusatori, Luigi Antonio Guerra, Giancarlo Busi, Ermano Pasquini, Teodoro Visentin...
Résumé: Un gang de malfrats commet un hold-up dans une bijouterie de Milan puis s'enfuit. Un des bandits est grièvement blessé. Obligés d'abandonner leur voiture volée les trois malfrats débarquent chez le docteur Malerva, l'obligent à soigner leur complice et finalement le prennent en otage avec sa femme Mara. C'est le début d'une longue nuit de tension tant pour les otages que pour les malfrats mais aussi le début d'une série de violences sexuelles pour Mara...
Après des débuts à la télévision et quelques années à réaliser des courts-métrages, Vincenzo Rigo poussé par son cousin Alberto Rigo décide de mettre en scène son tout premier film en 1974. Ensemble ils partent à Rome avec sous le bras un scénario écrit à quatre mains, rencontrent Giovanni Brusatori qui finalement leur offre un nouveau scénario intitulé à la base "Grande rapina di tre millardi a Milano" sur lequel les Rigo vont travailler jour et nuit. Revu et corrigé avec pas mal de maladresse par Bruno Fontana (le scénariste de Violez les otages) et Renato Romano il prendra alors son titre définitif Gli assassini sono nostri ospiti. Ne reste plus à Rigo qu'à donner les premiers tours de manivelle.
Trois gangsters dont une femme, Eliana, commettent un hold-up dans une bijouterie de Milan. En fuyant à bord d'une voiture volée la veille à un travesti un des malfrats, Franco, est sérieusement blessé. Pris en chasse par la police ils doivent abandonner la voiture. Le chauffeur lui aussi blessé meurt. Eliana et son complice Mario se réfugient chez le docteur Guido Malerva afin qu'il soigne Franco. Ils prennent en otages le médecin et sa femme Mara. C'est le début d'un huis-clos malsain durant lequel la tension ne va cesser de monter. Eliana séduit Mara qui n'est pas insensible au charme de la jeune femme. Marco les surprend et oblige Guido à observer son épouse se donner à Eliana. Mara est ensuite violée par Guido.
Cette violence sexuelle va mettre en exergue les problèmes conjugaux du couple. Mara reproche à son mari de ne pas avoir su s'occuper d'elle. Eddie le cerveau du hold-up les rejoint. La tension monte encore d'un cran d'autant plus que Eddie est toxico-dépendant. Lorsqu'un ami de la famille sonne à la porte pour voir Guido Mara est obligée de lui interdire l'entrée en prétextant être occupée. Imaginant qu'elle est avec un amant l'homme la découvre sous un autre jour et profite de cet instant pour la violer contre la porte. Contrainte de faire comme si tout allait bien elle subit ce nouveau viol. Une fois parti Mara, devenue une vraie putain, se réfugie dans sa chambre où cette fois elle doit subir les assauts sexuels de
Marco. Eddie meurt d'une overdose au moment où la tension est à sa comble. Guido tue finalement sa femme et Marco. Ne restent plus que Eliana, Guido et le butin. C'est à cet instant qu'un incroyable retournement de situation va changer les choses. Le docteur et Eliana sont en fait amants. Ils avaient échafaudé ce plan pour fuir en Amérique du sud avec les bijoux. Tout à été calculé pour que la police croit que le docteur et sa femme ont été victimes d'une prise d'otages qui s'est terminée par ce massacre général. Le plan a fonctionné à merveille mais alors que les amants s'apprêtent à s'envoler pour l'Argentine un grain de sable totalement inattendu va tout faire échouer.
Il est difficile de pouvoir classer ce film dans une catégorie précise. Ce n'est pas un polar à proprement parler ni un thriller. Ce n'est pas un noir traditionnel ni un rape and revenge au sens propre du terme ni même un condensé de ces genres. Gli assassini sono nostri ospiti est un film un peu à part. On peut le voir comme un remake de The desperate hours de William Wyler avec Humphrey Bogart que Rigo aurait intentionnellement fait tendre vers le noir à la française notamment lors de l'ouverture. S'il en reprend la trame il s'égare cependant vite dans l'exploitation pure au détriment même de l'intrigue par instant improbable. Difficile de croire au scénario de par la gratuité de certaines scènes mais
également par l'absence de récit solide. De ce fabuleux hold-up certes rondement mené ne subsiste en fin de compte qu'un simple huis-clos, une simple prise d'otages dans une maison bourgeoise prétexte à toute une série de viols et d'abus sexuels comme le cinéma de genre en a alors si souvent mis en scène.
C'est donc sous l'angle de l'exploitation qu'on regardera cette toile dont le défaut majeur est de n'avoir pas su faire monter le suspens ni créer la moindre tension, base de tout huis-clos. Faute en incombe à une réalisation trop plate, peu nerveuse, sans grande imagination. Malgré les éclats de violence tout reste bien trop linéaire peu aidé par le jeu étonnamment
passif de certains acteurs Antonio De Teffé en tête dont on attend en vain les réactions, la colère, le dégout face à cette nuit de violence et mais au comportement de plus en plus débauché de sa femme dont il découvre une facette jusqu'ici bien cachée. Quelque soit la situation il reste impassible, monolithique, inexistant diraient certains, une réaction que sa complicité avec Eliana pourrait expliquer mais ainsi montrée elle ne fait qu'accentuer le sentiment de frustration et d'incompréhension chez le spectateur.
Une réalisation mollassonne, sans relief et des invraisemblances scénaristiques ne signifient pas que Gli assassini sono nostri ospiti est un mauvais film. Au contraire. Cette
première réalisation de Rigo est loin d'être inintéressante. Elle peut être même assez fascinante pour un peu qu'on aime l'exploitation. Au crédit du film tout d'abord sa peinture d'une Milan crépusculaire, pluvieuse, plongée dans la grisaille et le brouillard d'une fin d'automne triste et morne, un sentiment de morosité renforcé par la très belle partition musicale de Roberto Rizzo qui parvient à créer un semblant d'atmosphère. Toujours à son crédit quelques scènes magnifiques presque irréelles comme celle où Marco abandonne la voiture sur un pont isolé pour s'enfuir avec les bijoux quand soudain le corps du chauffeur s'écrase sur le klaxon qui se met à retentir dans le brouillard. Une scène magistrale non
prévue au départ comme certaines autres, paradoxalement les plus réussies, puisque de l'aveu de Rigo le film fut en grande partie tourné au jour le jour d'où des séquences non écrites au départ.
Autre grand moment de bravoure, inédit jusqu'alors, le viol de Mara adossée à la porte d'entrée restée entrouverte derrière laquelle est collé Marco afin d'éviter qu'elle ne s'ouvre, un viol particulièrement malsain vu les conditions dans lesquelles il se passe et auquel tous peuvent assister sans pouvoir bouger. Et le contenu sexuel du film est bel et bien son principal intérêt, plus spécialement la pauvre Mara interprétée par Livia Cerini, actrice de
théâtre alors épouse du romancier Umberto Simonetta absolument remarquable dans ce rôle très difficile. Au départ simple épouse elle se transforme malgré elle en putain victime d'une succession de viols comme le Rape and revenge nous en avait jusque là donné. Un premier long, très long alors qu'elle tente de fuir, un second très certainement le plus original, un des plus originaux même que le cinéma Bis nous ait offert, adossée à une porte maintenue entrouverte par un des malfrats, contrainte de se donner à un ami de son mari qui contre toute attente se révèle être un amant afin de protéger leur vie, un viol d'autant plus morbide et malsain qu'il se fait dans un silence étonnant seulement brisé par le bruit de la
porte et des râles de l' assaillant, un troisième enfin dans la chambre de Mara durant lequel se mélangent de manière presque surréaliste les images de ses ébats lesbiens avec Eliana quelques heures plus tôt. En ce sens impossible de ne pas mentionner cette longue scène saphique dans la cuisine à la fois trouble et terriblement sensuelle révélant les tendances lesbiennes latentes de Mara. Cet enchainement de viols ne pourra que réjouir les amateurs et satisfaire leur soif de voyeurisme, un petit bonheur d'autant plus coupable qu'ils sont tous fort bien mis en scène et filmés.
Un des autres points forts du film est son surprenant rebondissement lors de l'ultime
bobine, la découverte stupéfiante de la complicité entre le docteur et Eliana. Amants, ils avaient planifié le déroulement des évènements pour fuir ensemble avec le butin. S'ils n'avaient pas prévu le comportement de Mara dont l'amertume, la frustration ont été révélés par la prise d'otage il leur a finalement facilité les choses. L'avion pour l'Argentine les attend. C'était sans compter sur un tout petit détail, le fameux grain de sable qui vient tout faire basculer et c'est surtout l'inspecteur qui les attend à l'aéroport lors d'une conclusion assez tendue. Tout aussi géniale soit elle il faut cependant mentionner certaines choses. Il faut en effet savoir que dans la version italienne, celle sortie jadis en vidéo quasiment introuvable
aujourd'hui la scène d'ouverture avec le travesti est absente alors qu'elle renvoie directement à cette conclusion inattendue. Incapable de la comprendre serait donc celui qui aurait visionné cette version uniquement disponible sur la version anglaise, intégrale, la seule aujourd'hui encore visible sur le marché. La copie italienne est donc à proscrire si toutefois quelques chanceux mettaient par miracle la main dessus.
Aux cotés de Antonio De Teffé, trop effacé, et de l'excellente Livia Cerini on aura le plaisir de retrouver la brune Margaret Lee, imposée par la production dans le rôle de Eliana, magnifique, tout en justesse et demi teinte. Elle est un atout dans une distribution qui
compte également le générique Giuseppe Castellano dont ce fut un des seuls rares vrais rôles à l'écran, plus habitué d'habitude aux figurations, pour son ultime rôle au cinéma le play-boy ex-modèle Sandro Pizzochero dans l'imperméable du chef de gang héroïnomane, un personnage secondaire qui n'a finalement guère de poids dans l'intrigue, et Gianni Dei, le voyou blessé qui n'a que peu de présence à l'écran. Quant à Luigi Pistilli et ses superbes rouflaquettes il incarne un inspecteur désabusé, un brin caustique dont on retiendra l'ultime phrase qui avec son envol de colombes résume à elle seule le film.
Devenu une sorte de film culte car très difficilement visible aujourd'hui, passé quasi
inaperçu autrefois en Italie Gli assassini sono nostri ospiti est une oeuvre hybride morbide réalisé avec un style certain, une oeuvre d'exploitation au charme vénéneux, macabre, de laquelle s'échappe un souffle malsain qui la rend tout simplement fascinante. Quelques soient ses défauts ou sa facilité le premier film de Vincenzo Rigo a amplement gagné sa place tant au sein des pellicules traitant de la malavita milanaise que sur les étagères de tout amateur de bandes d'exploitation et de violences charnelles.
Rigo signera par la suite deux films bien plus commerciaux, deux comédies, Lettomania et Zelmaide Passi furtivi in una boia, avant de définitivement quitter le monde du cinéma pour s'orienter vers une nouvelle vie.