Maniaco Deprebis

Ultime film d'horreur que réalisa Joe D'Amato avant de s'orienter définitivement vers la pornographie Ritorno della morte connu également sous le titre Frankenstein 2000 souffre d'une bien mauvaise réputation malheureusement justifiée.
Giorgia, une jeune femme mère de famille, possède des dons télépathiques. Elle travaille au magasin d'un vieil homme boiteux, Ric, qui en est secrètement amoureux. Trois voyous s'introduisent un jour au magasin et tentent de violer Giorgia. Elle est sauvée in extremis par l'arrivée de Ric. Elle décide de porter plainte. Malheureusement pour elle, un des violeurs est le fils d'un puissant homme de la ville, Hoffner, qui tient à sa merci la police. L'enquête est donc suspendue. Les trois malfrats vont se venger et revenir un soir maltraiter et violer Giorgia chez elle. La jeune femme sombre dans le coma après avoir été violemment frappée à la tête. Ric est accusé du viol et emprisonné. Hoffner est bien décidé à lui faire porter le chapeau afin de sauver son fils. Il envoie un de ses hommes de main tuer Ric dans sa cellule afin qu'on croit à son suicide. Du fond de son lit Giorgia va utiliser ses dons pour faire revenir à la vie Ric. Devenu un zombi il erre désormais dans la ville à la recherche des trois individus qu'il va tuer. Giorgia accomplit ainsi sa vengeance.
Produit par la Filmirage, la société de production créée par D'Amato afin de donner leur chance dés 1987 à de jeunes réalisateurs, Ritorno della morte avait été à l'origine écrit par Michele Soavi. Le scénario fut revu et corrigé par Antonio Tentori qui en garda la majeure partie mais en changea certains passages notamment le final. D'Amato désireux de refaire un vrai film d'horreur après la série de polissonneries qu'il venait de réaliser tenait absolument avec ce film à rendre hommage au Frankenstein de Mary Shelley et l'agrémenta donc de nombreux clins d'oeil et références parfois très discrètes que l'amateur s'amusera à noter. Le résultat est loin d'être convaincant. Le problème avec le film est que rien ne fonctionne vraiment. Tout semble être laissé à l'état de brouillon. Ainsi n'en saura t-on jamais plus sur les dons de Giorgia qui pourtant est le personnage principal de cette histoire bancale qui mélange des tas de thèmes souvent inutiles. Hormis les références au roman de Mary Shelley on trouve pèle-mêle des éléments empruntés aux films de télépathie, de zombis, des hommages amusants à quelques classiques du cinéma d'horreur des années 80 (les masques de Freddy et autres Jason que portent les voyous, le vidéo club que tient Giorgia...), à Orange mécanique (les délinquants violeurs), des réminiscences de Blue holocaust (l'autopsie), Patrick et The Medusa's touch et surtout Aenigma de Fulci (un choix volontaire de D'Amato cette fois) la corruption des forces de l'ordre, la jeunesse dorée italienne vouée à la délinquance, la fête disco néo-nazie sous l'égide d'Hitler (parfaitement absurde ici)... Ritorno della morte donne assez vite l'impression d'une sorte de patchwork rigolo qui va inexorablement s'effilocher tout au fil du métrage.
Cela aurait pu être fort sympathique si d'une part la mise en scène digne d'un quelconque téléfilm ne manquait pas autant de relief, si d'autre part l'interprétation n'était pas aussi fade. Les différents protagonistes sont tous autant qu'ils sont de simples silhouettes, sans aucune épaisseur, des caricatures jamais vraiment crédibles à l'image du scénario qui risque de faire beaucoup rire ce qui n'était pas réellement l'objectif premier de D'Amato. La plupart des séquences d'horreur sont si mal réalisées qu'elles en deviennent vite involontairement drôles, une mention toute spéciale au cauchemar récurrent de Giorgia dans lequel elle voit son fils être mollement poursuivi par un homme chevelu vêtu de noir armé d'une hache puis d'un pare-choc de voiture. On semble être parfois à la limite du gag. Le césar du plus mauvais figurant sera attribué au cadavre qui durant l'autopsie continue visiblement de respirer. Incapable d'instaurer une quelconque atmosphère ou de créer la moindre tension, D'Amato transforme vite son film en une sorte de farce horrifique quasiment dénuée d'effets sanglants à l'exception de la mort du docteur, la tête pressée comme un citron, une magnifique tête en latex qu'on croirait empruntée à Beetlejuice, la décapitation du policier et celle de l'enfant qui revient régulièrement lors du rêve de sa mère, sa tête s'écrasant dans une tarte aux myrtilles! On est loin, très loin des pellicules putrides du cinéaste, jadis grand spécialiste de l'horreur morbide et malsaine au savoureux goût de perversion. Ritorno della morte est une bande anonyme qui à aucun moment ne porte la griffe de son auteur. Elle aurait pu être mise en scène par n'importe quel réalisateur lambda le résultat aurait été identique!
Si Cinzia Monreale qu'on aura plaisir à revoir fait ce qu'elle peut sa prestation loin cependant d'être extraordinaire ne parvient guère à rehausser une interprétation catastrophique d'une brochette d'acteurs jamais crédibles tout aussi anonymes que le film lui même dont ce fut pour la majorité leur seul rôle. Maurice Poli donne le minimum syndical dans la peau du salop local dont on retiendra uniquement la mort, joliment électrocuté, (tournée dans la villa qu'utilisa Dario Argento pour Ténèbres). Quant à Donald O'Brien dont ce fut le dernier véritable rôle à l'écran il fut choisi par D'Amato lui même en raison de son handicap. Victime d'une grave chute quelques mois plus tôt qui le laissa handicapé, sa claudication n'est en rien feinte et lui donne cette démarche de zombi si particulière qu'il arbore tout au long du film. Malheureusement le pauvre Donald transformé en mort-vivant vindicateur ayant pris l'apparence du monstre de Frankenstein est peu convaincant, pas assez sérieux, et son personnage malgré son physique inquiétant et son handicap ne fonctionne pas comme il le devrait. L'amateur reconnaitra dans la robe de la jeune infirmière Emy Valentino, starlette du Bis italien qui entre 1987 et 1995 apparaitra dans pas moins d'une trentaine de films. Quant au petit Robin Tazuski il est le parfait sosie d'un Giovanni Frezza enfant! Est ce voulu?
Si Joe D'Amato a toujours avoué beaucoup aimer Ritorno della morte qu'il n'a jamais considéré comme un film raté, force est de constater qu'il ne se hisse jamais plus haut qu'un banal téléfilm d'horreur destiné au câble, une production médiocre pour fin de soirée vite vue vite oubliée. Voilà très certainement un des films les plus insipides qu'ait produit la Filmirage. Ce néo-Frankenstein resté à l'état embryonnaire ne risque guère d'avoir donné des sueurs froides à Mary Shelley!
Tourné en italien aux abords de Rome même si l'action est censée se dérouler en Allemagne le film fut un considérable échec en Italie lors de sa sortie tant et si bien qu'au fil des années la version italienne disparut complètement. Il n'existerait plus aujourd'hui qu'une version doublée en anglais.