Masoch
Autres titres:
Real: Franco Brogi Taviani
Année: 1980
Origine: Italie
Genre: Drame
Durée: 104mn
Acteurs: Paolo Malco, Francesca De Sapio, Fabrizio Bentivoglio, Inga Alexandrova, Remo Remotti, Valeria D'Obici, Claudio Sorrentino, Dario Mazzoli, Stefano Calanchi, Franca Lumachi, Fabio Farris, Stefano Stefanelli, Raoul Torresi, Stefano Stefanelli, Raoul Torresi...
Résumé: A travers ses correspondances, le cavalier Leopold Von Sacher-Masoch trouve une femme qui correspond à ses attentes sexuelles, la baronne Aurora Rumelin. Masoch ne peut trouver le plaisir et connaitre l'orgasme qu'à travers des jeux érotiques durant lesquels il souffre tant physiquement que psychologiquement. Ils finissent par se marier. Aurora, devenue Wanda, sera outre sa tendre et bien aimée épouse sa tortionnaire sexuelle, sa maitresse, sa dominante, il sera son esclave. La jeune femme doit prendre le dessus mais les exigences de Masoch commencent par la dépasser. De plus en plus malheureuse, elle prend lentement ses distances. Elle devient cette femme libérée que son mari lui ordonne d'être. La jalousie, les conflits naissent, Masoch s'autodétruit, de plus en plus prisonnier de ses propres perversions...
Beaucoup moins connu et réputé que ses deux autres frères qu'il assista régulièrement, Franco Brogi Taviani réalisa son premier film en 1980, Masoch, une tentative de biographie du célèbre personnage dont on était en droit d'attendre beaucoup. Bien malheureusement Masoch est un coup d'épée dans l'eau qui risque de beaucoup plus susciter l'ennui que l'attention.
Avec Masoch Taviani cherche à nous faire pénétrer l'univers du célèbre Leopold Von Sacher-Masoch qui donna son nom à une des plus célèbres déviances sexuelles parfois couplée au sadisme, le masochisme. On pouvait donc s'attendre à une oeuvre forte, intense capable de mieux nous faire vivre et comprendre cette particularité à travers les souffrances mêmes que s'inflige par plaisir cet homme tant physiques que psychologiques. Il n'en est malheureusement rien. On ne retiendra en effet du film que ses très beaux décors et ses teintes fauves, chaudes et flamboyantes merveilleusement bien mises en valeur par une jolie photographie. Masoch est dés lors plus une peinture qu'une biographie tout simplement parce que le film de Taviani n'en a jamais l'épaisseur encore moins la dimension tout comme il n'approche jamais l'étude clinique de son personnage. Le cinéaste se contente durant quasiment deux heures de simplement le faire évoluer dans ces très beaux décors intérieurs, on ne compte que de très rares extérieurs, en accumulant gestes et scènes répétitives, une simple mise en images des tourments et plaisirs déviants de Sacher-Masoch. Rien ne permet de comprendre et par conséquent d'expliquer les origines de cette déviance. Taviani ne fait qu'en donner une description privée de toute racine, sans originalité aucune, souvent de façon bien morne tant et si bien que très rapidement le film perd en relief, en force et en émotion ce qu'il gagne en ennui.
Ennui, voilà bien le mot qui définit Masoch. Outre l'aspect figé de cette description bien trop linéaire, jamais le film ne tient compte des états d'âmes, des états de vie, de ce que traverse, vit et ressent son personnage tant dans ses excès, ses désirs, son plaisir mais aussi sa douleur. Sans pour autant tomber dans l'étude psychologique ou même psychanalytique, Taviani aurait dû cerner et surtout un peu plus fouiller la personnalité de son illustre protagoniste au lieu de se borner à mollement montrer non pas une expérience mais de simples attitudes privées de tout contexte. En découle un film aussi long que lent, quasiment dénué de tout rythme que le coté extrêmement théâtral de la mise en scène et de l'interprétation rend encore plus ennuyeux.
Plus que de l'ennui c'est également de la frustration que ressentira le pauvre spectateur à la vision de Masoch puisqu'il ne pourra pas même se rattraper sur les séquences érotiques ou plus exactement de masochisme. Quoi de plus hypocrite en effet qu'un film traitant de cette
bizarrerie sexuelle qui prend pour option de ne pratiquement rien montrer? Certes nous ne sommes pas ici dans le cadre d'un cinéma d'exploitation pour public voyeuriste. Le cinéaste évite les écueils de tels procédés mais cela ne signifie pas pour autant ne rien faire voir. Du masochisme on aura essentiellement droit à des scènes de fustigation et de punition qui reviennent de manière cyclique réglées comme une horloge suisse, bien peu surprenantes encore moins étonnantes. On en retiendra en fait que deux, celle, totalement suggérée mais psychologiquement douloureuse, où Masoch se fait brûler le pénis avec un mégot de cigare incandescent et celle beaucoup plus explicite cette fois où, le manche d'un fouet bien enfoncé dans l'anus, il se fait fouetter. Quant à la nudité elle se fait toujours très pudique, on ne comptera quasiment aucun nu frontal, on se contentera d'admirer le fessier de Masoch et d'imaginer par le biais des dialogues ses formidables érections. Voilà qui devrait engendrer une frustration encore plus grande non seulement chez le spectateur mais aussi chez le voyeur.
Dans tout cet étalage d'attitudes mornes, on gardera néanmoins une image, très belle, particulièrement forte, si empreinte d'émotion soudaine qu'elle jurerait presque avec la monotonie de l'ensemble, celle où Masoch s'effondre au pied d'un mur comme écrasé, anéanti, par le poids de ses propres perversions, souffrant des souffrances qu'il s'inflige. Conscient de ses déviances qui lui sont indispensables pour connaitre plaisir et jouissance, il en est désespérément prisonnier, un carcan qui le brise et le détruit lentement.
Outre la beauté des décors, on saluera la prestation des deux principaux acteurs, tous deux très investis mais trop théâtraux, celle de Francesca De Sapio d'une part dans le rôle de Wanda, l'épouse de Masoch, et plus surprenant le toujours aussi séduisant Paolo Malco qui incarne le fameux cavalier. On ne pourra qu'être fasciné par la beauté envoutante de Paolo dont on ne compte plus les plans de nu dorsaux tant et si bien que ses fesses n'auront plus aucun secret pour le plus grand plaisir du spectateur béat qui n'oubliera pas de si tôt la tout aussi déroutante masturbation malheureusement habillé. On en sera d'autant plus amer que toutes les scènes d'érection sont suggérées mais gageons que bon nombre d'entre nous se laisserait facilement aller au masochisme si leur maitre avait les traits de Paolo.
A leurs cotés, on reconnaitra et appréciera la beauté d'un tout jeune Fabrizio Bentivoglio, le bel amant de passage, qui n'a bien malheureusement pour sa part aucune scène érotique déshabillée, Valeria D'Obici et Inga Alexandrova découverte dans Les nuits rouges de la gestapo puis revue par la suite dans le faussement zoophile Malabestia avec Sirpa Lane.
Masoch est une tentative ratée de cinéma d'auteur sur un thème difficile qui nécessitait beaucoup plus de force émotive et d'énergie mais aussi de violence, cette violence qui définit justement le masochisme. Et ce ne sont pas les dialogues tout dramatiques se veulent ils qui changeront la donne. Privé d'âme, jamais incisif, le film de Taviani n'en finit plus de s'étirer en longueur. Il aura vite raison du spectateur à qui il ne restera que le décor et la présence de Paolo pour éviter de sombrer lentement dans une douce torpeur.
Taviani mettra par la suite en scène une autre biographie, celle de Modigliani, sa seconde et ultime réalisation.