Le lunghe notti della gestapo
Autres titres: Les nuits chaudes de la gestapo / Les nuits rouges de la gestapo / Red nights of the gestapo
Real: Fabio De Agostini
Année: 1977
Origine: Italie
Genre: Nazisploitation
Durée: 108mn
Acteurs: Ezio Miani, Isabelle Marchall, Paola Maiolini, Inga Alexandrova, Rosita Torosh, Luciano Rossi, Gorgio Cerrioni, Almina Di Sanzio, Fred Williams, Alessandra Palladino, Carla Schiavanovic, Luca Sportelli, Daniela Vigilante, Francesca Righini, Daniele Dublino, Carl Williams, Tino Polenghi...
Résumé: L'officier Werner Uhland est chargé de découvrir les faiblesses sexuelles des sept membres de l'intelligentsia allemande et par la même occasion qui parmi eux n'est pas loyal au 3ème reich. Il va alors utiliser des microphones et les services de quelques prostituées afin de les démasquer et justifier ainsi leur exécution. Ils sont tous réunis dans la vaste demeure d'Helmut Von Danzin où se prépare avec frénésie une orgie. A minuit, les SS débarqueront pour massacrer les traitres...
Le lunghe notti della gestapo réalisé en 1977 par le scénariste Fabio De Agostini (Dans les replis de la chair, L'oeil de l'araignée) dont ce fut quasiment le seul véritable film est un peu à part dans la petite série des eros-svastica transalpins tant il se distingue par ses qualités notamment artistiques.
Contrairement aux nazisploitations de Sergio Garrone, de Rino De Silvestro ou mieux encore de Luigi Batzella très orientés sexe et violence, aisément assimilables aux vieilles bandes dessinées pour adultes avertis tendances sadomasochistes retranscrites dans le cadre
bien particulier des camps nazis, Le lunghe notti della gestapo tend plus vers une tentative de cinéma d'auteur tout en restant dans le cadre de l'exploitation qu'on qualifiera ici d'intelligente si toutefois les deux termes sont compatibles.
Loin des tortures sadiques et des perversions sexuelles des nazisploitations traditionnels, Le lunghe notti della gestapo brille d'une part par son aspect beaucoup plus intellectuel peut être dû au fait que le scénario est tiré de l'auto-biographie de l'écrivain Berta Uhland, d'autre part par la qualité de la mise en scène et du soin apporté à la photographie. Celle ci met en effet en valeur les très beaux décors intérieurs du château de Carimate dans lesquels
évoluent pour une fois de bons comédiens. On saluera entre autres exemples la prestation de la française Isabelle Marchall qui, non doublée, récite Verlaine avec sensualité et conviction aux cotés de l'excellente Paola Maiolini.
Le coté gore s'estompe donc face à cet intellectualisme à prétention auteuriale puisque le film ne contient ni scène sanglante ni abomination horrifique. C'est peut être là un des facteurs qui fit que le film de De Agostini déplut profondément aux amateurs du genre, frustrés et déçus par cette cruelle absence de sadisme et de perversions y compris lors de l'inévitable massacre final, éléments indispensables à tout éros svastica qui se respecte.
Cette conclusion est en effet d'une sagesse quasi exemplaire si on excepte la mort deNiki Penati, le manche du fouet qui l'étranglera enfoncé préalablement dans le vagin, la scène où un officier impuissant pète sur une fille de joie hystérique et celle durant laquelle le cercueil où est enfermée une prostituée est jeté dans le vide. Au moment où il s'écrase au sol, il s'entrouvre et laisse apparaitre le visage de la jeune fille figé dans une expression d'horreur. Le coté très théâtral de l'ensemble, ses assommants dialogues souvent pompeux et prétentieux et sa stupéfiante lenteur acheva de détourner du film les inconditionnels du
genre. Quant à la critique, elle détruisit le film mettant en cause sa misogynie mêlée ici à une certaine apologie du fascisme, deux thèmes pourtant inhérents à l'éros svastica mais qui transposés dans un contexte plus sérieux sont peut être beaucoup moins acceptables pour des esprits plus rigides. Comme dit le célèbre adage «chacun voit midi à sa porte». Chacun comprendra donc ce qu'il veut comprendre en interprétant le film à sa manière. Le lunghe notti della gestapo fut malheureusement lors de sa sortie en Italie un cuisant échec. Pour information, Les nuits chaudes de la gestapo fut le seul éros-svastica a avoir été distribué en salles en Angleterre après bien entendu moult coupes à l'instar de la version française
amputée de bien 20 minutes.
Sorte de vision dégénérée de Salon Kitty, Le lunghe notti della gestapo ne méritait cependant pas un tel désaveu du public. Outre sa mise en scène, ses qualités visuelles et esthétiques et son interprétation, le film dégage par instant un étrange pouvoir de fascination à travers des images à la fois étranges et poétiques. La séquence où la féroce Rosita Torosh s'accouple sauvagement à trois hommes au son de l'envoûtante chanson La notte della ragione genera dei mostri, la danse de Mademoiselle Hitler, magnifique, presque surréaliste avec la fameuse manipulation de la balle de ping-pong qui disparaît dans le vagin
d'Inga Alexandrova, parfait écho des bijoux adroitement retirés de l'intimité de Paola Maiolini, et l'étonnante séquence où une prostituée se transforme en vishna au son d'une sérénade jouée par un violoniste sont autant de moments qui illustrent parfaitement toute l'étrangeté et l'onirisme d'un film visiblement inspiré par Tinto Brass. De Agostini filme en effet avec brio et surtout poésie tant les fessiers charnus que l'intimité de ses actrices tandis que les nombreuses scènes de sexe souvent très audacieuses semblent quant à elles le plus souvent chorégraphiées.
Subtil, Les nuits chaudes de la gestapo n'évite pourtant pas certaines outrances certes fort sages telle la scène où une des prostituées tête le sein d'un officier, le lait coulant le long de
son visage, et celle beaucoup plus suggérée sur laquelle plane une ombre de pédophilie lorsque De Agostini laisse sous-entendre qu'une fillette, au demeurant fort perverse, seule rescapée du carnage final, s'est volontairement laissée aller à des actes contre-nature avec un officier. Voilà qui est bien peu cette fois comparé à l'audace souvent sans limite des réalisateurs d'alors.
Hormis les splendides Isabelle Marchall, Paola Maiolini et Inga Alexandrova, on retrouvera en tête de distribution féminine la regrettée Rosita Torosh, alors connue comme présidente de la ligue naturiste italienne, Almina Di Sanzio et Alessandra Palladino aux cotés d'une des
stars du roman-photo d'alors, le jeune Ezio Miani qui incarne l'officier SS Werner Von Uhland, Giorgio Cerrioni déjà présent dans Horreurs nazies et SS Camp 5 enfer de femmes sans oublier Luca Sportelli et Luciano Rossi.
Si Le lunghe notti della gestapo n'est pas et de loin l'eros-svastica le plus sensationnel, il n'en demeure pas moins fascinant dans sa mise en scène, sa poésie et sa subtilité, véritable atout de ce film un peu trop ambitieux qui continuera à diviser les amateurs de ce sous genre très controversé.