Le scomunicate di San Valentino
Autres titres: The sinful nuns of Saint Valentine / La comunidad de San Valantin
Real: Sergio Grieco
Année: 1974
Origine: Italie
Genre: Nunsploitation
Durée: 93mn
Acteurs: Françoise Prevost, Jenny Tamburi, Paolo Malco, Corrado Gaipa, Gino Rocchetti, Franco Ressel, Dada Gallotti, adriana Facchetti, Piero Anchisi, Eleonora Spinelli, Aldina Martano, Barbara Herrera, Attilio Dottesio, Calisto Calisti, Maria Luisa Sala...
Résumé: Esteban et Lucita s'aimaient et désiraient se marier mais leurs familles respectives sont en guerre depuis des générations. Lucita a donc été envoyée au couvent de San Valentino par son père afin d'y prononcer ses voeux et qu'elle renonce ainsi à Esteban. Ce dernier est victime d'une embuscade et grièvement blessé. Mourant, il trouve refuge au couvent. Soigné par Joaquim, l'homme à tout faire, il recouvre ses forces et peut enfin revoir Lucita en secret dans une chambre bien dissimulée. Mais leurs rendez-vous nocturnes sont épiés par une mystérieuse silhouette armée d'un couteau. Lorsque la compagne de chambre de Lucita est assassinée, la jeune novice est accusée d'hérésie par l'Inquisition et condamnée à mort. Esteban découvre que la mère abbesse est responsable du crime et de bien d'autres. Folle à lier, sexuellement frustrée, elle va tenter de se débarrasser d'Esteban après l'avoir séduit. Le complot éventé, l'Inquisition condamne les soeurs à toute être emmurées vivantes. Mais Lucita a disparu...
Si l'Italie avait déjà à la fin des années 60 fait une incursion dans le film de nonnes grâce notamment à Eriprando Visconti et La nonne de Monza, le succès du film de Ken Russel, The Devils, allait engendrer un nouveau et prolifique filon du cinéma d'exploitation transalpin, le nunsploitation.
Si Le scomunicate di San Valentino appartient irréfutablement au genre Sergio Grieco a tenté d'y mêler d'autres styles alors en vogue, créant ainsi une surprenante croisée des genres, un film hybride entre mélodrame, giallo et film de nonnes qui repose sur cette traditionnelle intrigue shakespearienne qu'est Roméo et Juliette. Ce mariage des genres aurait pu s'avérer plutôt indigeste pourtant Le scomunicate di San Valentino est une bien agréable surprise, une série B d'exploitation qui devrait ravir tous les amateurs.
Le bel Esteban et la malheureuse Lucita sont les Romeo et juliette de cette dramatique histoire d'amour impossible, les enfants de deux riches familles rivales depuis des générations. Contrainte par son père au reclus au fond du couvent de San Valentino, Lucita tente d'y oublier son amour pour le garçon qui, grièvement blessé lors d'un traquenard organisé par le père de sa dulcinée, se réfugie au cloitre, sous la protection de l'homme à tout à faire, Joaquim. Ainsi donc sont posés les bases de Roméo et Juliette.
Si les deux amants peuvent désormais se retrouver et s'aimer dans une chambre secrète, une mystérieuse silhouette vêtue d'une bure de nonne, gantée de noir et armée d'un couteau espionne leurs leurs différents rendez-vous et allers-venues. Lorsque la compagne de chambrée de Lucita est sauvagement assassinée une nuit alors qu'elle faisait chanter la jeune fille, Grieco vient d'apporter à son scénario le ciment du giallo traditionnel. L'inquisition s'empare alors de l'affaire. Après avoir torturé Lucita, elle l'accuse de meurtre et la condamne à mort pour hérésie. Dés cet instant, Le scomunicate di San Valentino se transforme en un véritable nunsploitation qui accumule tous les ingrédients du genre avec une insistance toute particulière pour les scènes de sexe et de folie collective jusqu'au final, excessif et totalement débridé, qui verra cependant le Bien triompher.
Si on pourra regretter une certaine pauvreté des décors et un scénario un peu facile dont il est facile de déceler les tenants et les aboutissants, Le scomunicate di San Valentino reste une captivante petite série B qui vaut surtout pour son atmosphère et certaines de ses séquences aussi mémorables que grandiloquentes. S'il n'est guère difficile de comprendre qui est l'énigmatique assassin, la bien nommée mère abbesse, toute puissante, son personnage est une des forces du film. Dévorée par la frustration, rongée par l'abstinence et un passé qu'on devine douloureux, investie du pouvoir que lui confère l'Eglise, elle s'octroie le droit de vie et de mort, redoutable meurtrière qui a rempli le puits du couvent des cadavres de ses victimes. Jalouse de l'amour qui unit Esteban et Lucita, elle les a piégé afin de les détruire.
Agréablement rythmé par une musique aux sonorités hispanisantes signée Lallo Gori, Le scomunicate di San Valentino doit également beaucoup à l'interprétation de Corrado Gaipa qui incarne un inquisiteur sans pitié, inflexible, investi par Dieu. Sa quête de justice divine le mènera à sa propre perte lors d'une des scènes les plus fortes du film. On regrettera simplement que les tortures inquisitoriales soient si légères ce qui n'enlèvent cependant rien à leur efficacité, au même titre que l'érotisme lui aussi bien léger. Quelques seins et corps dénudés, une scène saphique, quelques timides ébats qu'on aurait aimé beaucoup plus sulfureux notamment ceux de la mère abbesse devront satisfaire le spectateur avide de sexe.
On retiendra surtout et avant tout du film sa longue, son interminable séquence d'agonie collective, passablement copiée sur celle des Diables. Condamnées par l'Inquisition à toute être emmurées vivantes à l'intérieur même du couvent, un des éléments récurrents au genre, les nonnes, toutes complices des abominations de la Mère supérieure, au bord de la suffocation, sont prises de folie. Cela nous vaut dix bonnes minutes d'hystérie collective, où nues, la bave aux lèvres, les yeux révulsés, elles se sautent dessus, hurlantes, gémissantes, prêtes à se dévorer entre elles dirait on, implorant pour certaines le Seigneur pour d'autres Satan sous le regard de la Mère supérieure, hagarde, qui n'a rien perdu de sa cruauté ni de
son pouvoir de domination. Grieco s'attarde sur les visages ébouriffés, les regards exorbités, les corps qui rampent à la recherche d'eau et d'air, en proie à de véritables crises de furie. Trop longue, trop exagérée, totalement improbable mais tout bon amateur d'exploitation fait fi de toute véracité, si elle demeure un moment tout particulièrement jouissif, elle en perd une grande partie de sa force et en devient presque comique. Mais elle rappelle à ceux qui par distraction l'auraient oublié qu'on est bel et bien dans le registre de la pure et simple exploitation prêt à tous les débordements même les plus grossiers afin de choquer.
Comme tout bon mélodrame, tout se terminera au mieux et les deux familles lors d'un final très théâtral, marque de toute une époque, se réconcilieront et nos jeunes amants pourront enfin s'aimer éternellement.
Le film de Grieco est un honnête nunsploitation, un bon cru pour tout amateur d'hérésie et de nonnes en furie qui de surcroit se régaleront de la présence de la jeune et regrettée Jenny Tamburi dans le rôle de la malheureuse Lucita. Si Grieco la dénude tant qu'il peut c'est surtout d'une chute de cheval dont elle fut victime dont se souvient Jenny, une chute due au poids du costume qu'elle portait. A ses cotés, Paolo Malco, encore blond, arborant une superbe coupe au bol, incarne notre Roméo et nous gratifie même d'un plan de nu dorsal. Françoise Prévost quant à elle met toute sa hargne pour interpréter la mère abbesse et on l'en remercie.