L'ultima orgia del III reich
Autres titres: Les orgies du 3ème reich / Bourreaux SS / La dernière orgie du 3ème reich / Des filles pour le bourreau / The gestapo's last orgy / Caligula reincarnated as Hitler
Réal: Cesare Canevari
Année: 1976
Origine: Italie
Genre: Nazisploitation
Durée: 95mn
Acteurs: Daniela Levy, Maristella Greco, Adriano Micantoni, Antinesca Nemour, Fulvio Ricciardi, Caterina Barbero, Vittorio Joderi, Pietro Bosco, Domenico Serengari, Pietro Val, Tino Pollenghi, Maria Grazia Cisera...
Résumé: Un ex-commandant SS, Konrad Von Starker, qui est parvenu à échapper à la justice à la fin de la guerre retourne dans un des camps dans lequel il a commis crimes et autres atrocités. Il y retrouve une de ses anciennes prisonnières juives, Lisa. Tous deux vont revivre par flashes-back ce qu'ils y ont vécu et faire renaitre la relation amoureuse trouble qui les unissait...
Dans ce vaste filon du nazisploitation ou eros svatiska, une des sous branches les plus controversées du cinéma d'exploitation, Bourreaux SS / Les orgies du 3ème reich, réalisé en 1976 par Cesare Canevari l'auteur de l'érotico- psychédélique La princesse nue, fait sans nul doute partie des films les plus intéressants du genre non pas pour ses séquences une fois encore particulièrement dérangeantes mais pour son propos plutôt original.
Canevari propose en effet un film sombre qui à la manière de Portier de nuit retrace les terribles souvenirs d'une ancienne détenue retournée sur les lieux où elle a vécu l'enfer des camps de la mort. S'ensuit toute une série de séquences plus abjectes les unes que les autres dont la première sera le gigantesque viol collectif sordide des prisonnières juives battues et humiliées par un groupe de soldats SS qui testent ainsi leur virilité sous les tentures ornées de croix gammées. Si Canevari est plus raffiné mais surtout moins obnubilé par les tortures que ses confrères notamment Sergio Garrone et Luigi Batzella, Bourreaux SS n'est cependant pas exempt de séquences choc qui devraient faire le bonheur des amateurs d'atrocités en tout genre: une détenue est jetée en pâture à un doberman qui la dévore à pleines dents sous l'oeil réjoui d'une kapo, une autre est plongée dans de la chaux vive, suspendue par les pieds, Lisa subira le supplice des rats sur lesquels elles finira par vomir, des prisonnières sont brulées vives dans un souterrain, le tatouage que porte un soldat sur la poitrine est decoupé au couteau... Le summum du mauvais goût revient à la longue séquence du repas dit cannibale où une jeune juive est flambée vivante au cognac dans un immense plat en argent. Avant de la déguster, certains officiers SS et invités s'accoupleront pendant que d'autres feront l'amour tout en caressant les restes calcinés de la victime. Cette séquence est au film ce que le repas coprophage est à Salo et les 120 journées de sodome non seulement pour l'abomination de l'acte en lui même mais surtout pour sa terrible signification puisque l'initiateur de cette monstruosité s'appuie sur la théorie de Goering comme quoi les juifs, moins dignes que de la viande animale, rabaissés au rang de simples excréments, sont faits pour nourrir la race aryenne. Elle fait également écho à la scène où la future élite de l'armée allemande haranguée par le commandant SS visionne tout en se masturbant des diapositives qui témoignent des atrocités subies par les déportés contraints de manger leurs excréments dans une écuelle et de s'en couvrir le corps. L'humain réduit à son plus simple déchet qu'on se plait à détruire. Outre ses monstruosités, le principal intérêt du film de Canevari est l'histoire qu'il développe entre l'héroïne et son ancien bourreau, de loin une des meilleures depuis le film de Liliana Cavani. A l'horreur et à l'innommable Canevari a préféré la réflexion et l'analyse en donnant à son film une dimension parfois auteuriale. Il offre une étude assez approfondie même si maladroite de son bourreau, le commandant Von Starker, contraint à commettre ses atrocités par faiblesse, par lacheté, mais également pour masquer ses complexes. L'ambiguité de sa relation avec Lisa n'en est que plus trouble et malsaine. Leur histoire d'amour et de haine qu'on peut associer au fameux syndrome de Stockholm devient vite le centre de l'intrigue filmée en un très long flash-back qui aboutira à cette tragique mais inéluctable conclusion dont la seule issue possible est la mort, une vengeance en forme d'exorcisme tout aussi trouble perpétrée bien des années plus tard. A noter que Canevari tourna une fin alternative reprise sur l'édition DVD française qui ne change en rien le message initial mais le renforce. Tout aussi intéressant est le parcours de la douce Lisa qui après avoir choisi de rester coûte que coûte en vie se transforme à son tour en une sorte de monstre, impassible, vide de toute émotion. Ainsi ne réagit-elle pas lorsque sa meilleure amie est conduite au four crématoire, une première transformation avant de devenir à son tour un monstre, le bourreau de son bourreau, ravagée par l'ambiguité de ses sentiments. Certes Cesare Canevari reste dans une certaine superficialité inhérente à l'exploitation mais il a suffisament de talent pour rendre crédible sa tentative. Filmé sur les terres désolées du lac de Come dont la photographie froide et sombre renforce la tristesse et dans un des anciens fours d'une usine désaffectée située à Rosate qui pour la rendre plus réaliste fut entourée de fils barbelés, Bourreaux SS connu également sous le titre Les orgies du 3ème reich vaut également pour ses dialogues très souvent équivoques, profondément antisémites, même s'ils n'évitent pas par instant un certain ridicule qu'une version française un peu lourde n'arrange guère. Si Canevari a évité l'horreur graphique il l'a sournoisement remplacé par quelques tirades et autres envolées verbales étonnament violentes notamment celles de Alma, l'effroyable kapo, qui entre autres exemples se vante d'arracher la bouche des nouveaux-nés pour éviter qu'ils ne sourissent et de faire de leur peau des sous vêtements particulièrement doux et érotiques. Bénéficiant d'une mise en scène efficace Bourreaux SS doit aussi beaucoup à son interprétation. Dans le rôle de Lisa on retrouve une toute jeune Daniela Levy alias Daniela Poggi, belle et sensuelle, dont c'était la toute première apparition au cinéma avant qu'elle ne devienne une vedette du petit écran et renie ce film qu'elle voulut faire retirer de sa filmographie et le solide Marc Loud alias Adriano Micantoni dans la peau du commandant SS. Egalement au générique la pasolinienne Antinesca Nemour déjà présente dans Salo plongée ici dans un bain de chaux. On notera que Fulvio Ricciardi, le docteur qui s'amourache de Lisa, qu'on retrouvera en 1982 dans le giallo Delitto carnale du même réalisateur, a co-écrit le scénario avec Canevari et Micantoni. La véritable révélation du film reste sans aucun doute l'incroyable Maristella Greco dans le rôle de la cruelle Alma, une des kapos parmi les plus sadique que l'eros svastika ait connu. Remarquée par Canevari lors d'un diner mondain, il l'engagea pour son physique sévère et son caractère bien trempé.
Bourreaux SS est de loin le meilleur film de la carrière de Canevari. Ambitieux il y avait mis tous ses espoirs et pas mal d'argent. L'échec du film en Italie lors de sa sortie en 1977 et le total désintérêt du public l'avait alors fortement affecté. Quoiqu'il en soit ce nazisploitation qui privilégie l'analyse à l'horreur pure s'il n'est donc pas le plus graphiquement terrible n'en reste pas moins le haut du panier d'un genre certes délicieusement repoussant mais résolument inégal.
Pour l'anecdote, l'acteur Tino Pollenghi qui interprète un soldat SS rondouillard, très souvent chargé de trouver acteurs et figurants sur bon nombre de films d'alors, confesse que Bourreaux SS fut directement tourné en version hard. Les séquences hardcore furent par la suite retirées du film et n'en subsiste aujourd'hui que son témoignage. S'il y a lui même participé (le viol de la pornocrate Maria Grazia Cisera la jeune juive à l'écuelle), photographie de plateau à l'appui, il avoue que Daniela Poggi n'y a pas pris part contrairement à Antinesca Nemour qui ne se fit pas prier. Cette révélation n'est guère surprenante puisque certains plans laissent sous entendre des coupures notamment lors de la masturbation collective des soldats dans la salle à orgie et l'amorce de masturbation pratiquée par Maristella Greco au soldat à qui elle s'apprête à retirer la peau du torse. Toujours pour la petite histoire selon Canevari, l'acteur Vittorio Joderi qui interprète le sadique commandant Weissman obligea Antinesca Nemour dont l'hygiène corporelle était assez négligée à aller se doucher avant la fameuse scène où il lui lèche les pieds, une information confirmée par la costumière de l'actrice qui eut également l'occasion de constater son laisser-aller