Arabella angelo nero
Autres titres: Arabella, the black angel / Angel: black angel
Real: Stelvio Massi
Année: 1989
Origine: Italie
Genre: Giallo
Durée: 89mn
Acteurs: Tini Cansino, Rena Niehaus, Ida Galli, David D'Ingeo, Valentina Visconti, Francesco Casale, Carlo Mucari, Renato D'Amore, Giosé Davi...
Résumé: Arabella, une belle jeune femme, est mariée à un écrivain paralytique. Nymphomaniaque, elle part régulièrement la nuit en quête de plaisirs défendus. Lors d'une descente de police dans un bordel elle est arrêtée par un policier qui la viole en échange de sa liberté. Il la rejoint quelque temps plus tard chez elle et lui fait l'amour. Surprise par son mari, Arabella tue l'homme que l'époux éconduit va enterrer dans le jardin. Dés lors, il va se servir des infidélités de sa femme pour écrire son prochain roman. Malheureusement tous les amants d'Arabella sont sauvagement tués par un mystérieux assassin...
Auteur dans les années 70 de toute une série de polizeschi musclés dont la trilogie de Mark il poliziotto avec Franco Gasparri, un genre dont il fut un des spécialistes et principaux investigateurs, Stelvio Massi s'est malheureusement fourvoyé à l'aube des années 80 dans un cinéma d'exploitation moribond, un moyen de survie bien peu reluisant dans lequel il se noya lentement avant de mettre un terme à sa carrière en 1994. Si on oubliera ses polars de fin parcours, bien mollassons, ses incursions dans le mondo et sa tentative risible de redonner vie à Mondo cane, il est cependant intéressant de s'arrêter sur cette hallucinante
entrée dans l'univers du giallo, quelques dix ans après que le thriller à l'italienne se soit éteint malgré quelques soubresauts plus ou moins étincelants qu'on doit notamment à Lamberto Bava, Dario Argento et Lucio Fulci.
Réalisé en 1986 sous le pseudonyme de Max Steel, Arabella angelo nero tente de renouer avec un certain cinéma trash tel qu'on l'avait connu à la fin des années 70, c'est peut être pour cela que Massi a choisi la voie de l'érotisme malsain et de la perversion pour ce softcore sulfureux aussi déconcertant que ridicule.
Arabella est une nymphomane mariée à un écrivain cloué en chaise roulante suite à un
accident de voiture survenu le jour de leur mariage. Elle aime trainer la nuit en quête d'hommes et de plaisirs défendus. Alors qu'elle déambule dans un lieu de débauche, un vieux château aménagé, une descente de police impromptue va bouleverser son destin. Prise pour une putain, un policier la viole avant de la laisser repartir. Il sonne un jour à sa porte, la fait chanter et lui fait sauvagement l'amour dans un cabanon. Son mari les surprend, elle tue le policier sous ses yeux. Il cache le corps dans le jardin. Dés lors, il va se servir des infidélités nocturnes de sa femme pour écrire son nouveau roman, L'ange noir. Malheureusement tous les amants d'Arabella sont immédiatement tués par un mystérieux
assassin qui les castre. Une inspectrice lesbienne est chargée de l'enquête. Tous ceux qui approchent de près ou de loin la jeune femme trouvent la mort. Arabella commence à douter de sa santé mentale quand elle décide de tendre un piège au tueur. La vérité est bien au delà de ce qu'elle avait imaginé... et le spectateur également.
Stelvio Massi n'a rien inventé, il ne fait que reprendre la quasi totalité des ingrédients qui ont fait le succès du genre non pas de façon très intelligente mais plutôt dans une sorte de salmigondis étonnant qui fait ressembler le film à un catalogue de vices et de perversions mal agencés, collés les uns aux autres en dépit de toute logique. En découle un thriller
érotique déroutant visuellement superbe, à l'ambiance moite, qui respire le sexe et ses multiples turpitudes mais incroyablement stupide tant il manque de cohérence. On reste le plus souvent pantois face à une telle histoire sans queue ni tête qui multiplie les interrogations comme se multiplient un Gremlin au contact de l'eau. La sorella di Ursula, Giallo a Venezia ou encore Delitto carnale avaient en leur temps épuisé le sujet en signant le chant du cygne du porn giallo. Arabella angelo nero n'est en fait qu'une tentative de ressusciter le genre en réutilisant les composantes qui en firent le succès à savoir une bonne dose d'érotisme à la limite parfois du hardcore mélangé à quelques jolis meurtres
sanguinolents particulièrement sadiques visant principalement les parties intimes des victimes. On a ainsi droit durant 90 minutes à une série de castration et surtout de longs plans détaillés de ciseaux pénétrant furieusement le vagin des victimes, les mutilant avec rage, de quoi ravir l'amateur et faire frémir les plus sensibles. Ce qui étonne ici, c'est tant la nudité frontale masculine et féminine que la violence des actes à une époque où le cinéma italien s'était depuis longtemps assagi, où on suggérait plus qu'on ne montrait. Un bel hommage à l'euro-trash d'antan même si très souvent la gratuité des scènes fera sourire... ou grincer des dents selon de quel coté de la balance on se trouve.
Fort malheureusement cet étal de sexe et de violence qui illustre la phrase qui ouvre et clôt le film "Le vice n'est pas un péché, l'honnêteté ne connait aucune honte" tourne dans le vide faute à un scénario brouillon d'une sidérante indigence. Le thème de l'écrivain qui s'inspire de faits divers réels tragiques pour son prochain livre n'est pas nouveau mais le seul mot qui ici vient à l'esprit c'est pourquoi? Rien ne se tient, tout est laissé à l'état foetal et plus le métrage avance plus les questions s'amoncellent. Pourquoi Arabella est elle suivie par un détective? Pourquoi celui ci est il tué et comment l'assassin a t-il pu savoir que la jeune femme était filée? Pourquoi Arabella tue t-elle le policier sous les yeux de son mari?
Pourquoi cache t-il le corps et pourquoi n'y a t-il aucune enquête? Les personnages étant très peu nombreux les habitués du genre auront vite fait de dénouer le noeud d'une intrigue qui prend l'eau de toutes parts mais une fois de plus les questions reprennent le dessus tandis que certaines révélations tellement énormes et improbables feront beaucoup sourire.
On aura vite fait de comprendre que le mari paralytique ne l'a jamais été, grossier subterfuge pour pouvoir surveiller son épouse qui doit être bien idiote pour ne s'en être jamais rendue compte. Il faut dire qu'elle est responsable de son accident puisqu'elle n'a pas trouvé mieux que de lui faire une fellation alors qu'il conduisait la voiture qui les emmenait en voyage de
noces! Et l'époux éconduit d'avouer qu'il l'a épousé car sa nymphomanie l'excitait! Le fait que l'inspectrice soit lesbienne n'apporte rien à la narration hormis d'y ajouter une dose de souffre et une histoire de jalousie morbide avec sa petite amie et adjointe mais un commissaire n'est il pas chargé de mener l'enquête? Ici apparemment pas puisqu'il n'y en a pas trace. C'est comme par miracle qu'elle annoncera en fin de bande qu'elle connait l'identité du tueur après que Massi nous ait révélé qu'elle est en fait la soeur de l'écrivain et donc belle-soeur de Arabella. Il oublie par contre de nous expliquer les motivations de son meurtrier qui s'évanouira d'ailleurs du scénario après son ultime assassinat mais nous
apprend tout de même qu'il souffrait d'un profond trauma familial. Après un petit séjour fort compréhensible à l'hôpital, son mari a tout de même été tué alors qu'elle prenait du plaisir à ce qu'il la viole, Arabella éditera à titre posthume son roman et s'en retournera à ses vices nocturnes, fière putain sadomasochiste.
Si on nage en plein n'importe quoi Arabella angelo nero se laisse pourtant visionner sans mal tant par moment le film de Massi fascine par la beauté et l'étrangeté de certaines scènes. Outre la violence des meurtres, son esthétisme très clippé fortement estampillé fin d'années 80, son érotisme sauvage et son accumulation de scènes osées et autres plans de nu, on retiendra essentiellement l'imagerie sadomaso qui enrobe l'ensemble, l'onirisme de certaines séquences notamment celle où l'inspectrice lors d'un abominable cauchemar
se voit entrer dans le château des perversions, nue sous sa robe rouge transparente, avant de se faire atrocement mutiler le vagin par les ciseaux de l'assassin. L'ouverture est tout aussi curieuse, l'entrée de Arabella dans ce château du vice sadien hanté par toute une faune nocturne aussi inquiétante que fascinante, travestis, putains, homosexuels dépravés, créatures en cuir et autres punks maquillés donnant vie aux fantasmes les plus débridés de leurs clients tout aussi spéciaux qu'un vieux transsexuel accueille au son du bandonéon. Très jolie est également l'idée de cette rue aux mignons, long trottoir fantasmagorique où de jeunes homosexuels à demi nus, au look outrageux, offrent leur corps même si une fois de
plus leur présence dans l'histoire suscite quelques questions puisque tout gay soient ils ils séduisent avant tout les femmes! En fait ils ne sont là que pour une simple raison, ajouter à la liste une nouvelle perversion à un film qui semble les recenser: homosexualité, lesbianisme, sadomasochisme, prostitution, nymphomanie... tout est là décliné sous diverses formes.
L'interprétation est à l'image du film, insipide si ce n'est mauvaise, Tini Cansino en tête, aussi vulgaire que piètre actrice. Hybride entre une Valentine Demy et Catherine Ringer époque Rita Mitsouko, Tini brille par son inexpressivité, son statisme et son absence de
charisme, rendant vite son personnage antipathique. Sa lingerie noire, ses nus et ses ébats sexuels font certes illusion mais ne parviennent tout de même pas à faire oublier un jeu de comédienne désastreux. Rendue populaire par la série Drive-in, vite propulsée sexy starlette le temps de quelques coquineries oubliables, Tini fait aujourd'hui les beaux jours de la télévision italienne dans des talk shows où sa présence est très souvent sujet à polémique de par l'absurdité récurrente de ses propos. Francesco Casale, nu chez Tinto Brass quelques années plus tard, est inexistant tandis que Valentina Visconti en inspectrice lesbienne brille surtout pour son look de secrétaire coincée. On remarquera également
l'apparition trop brève du toujours aussi fantasmatique David D'Ingeo, jeune franco-italien découvert dans quelques polissonneries, dans le rôle d'un prostitué dont on pourra admirer le petit fessier en toute tranquillité. La véritable attraction du film reste tout de même la présence de deux monuments du cinéma d'exploitation transalpin, celle de Rena Niehaus, inoubliable héroïne du fabuleux diptyque Orca et Oedipus orca, dans son dernier rôle si on excepte sa participation à Il ritmo del silenzio aux cotés de Traci Lords, et celle de Ida Galli dont ce sera l'ultime apparition à l'écran, un bien triste chant du cygne pour celle qui hormis d'apporter un rayon de professionnalisme au film, préféra mettre un terme à sa carrière plutôt que de continuer à jouer dans des inepties pour pouvoir survivre.
Ridicule, prévisible, mis en scène sans originalité, jamais crédible, Arabella angelo nero est typique de ces oeuvrettes qui dans un ultime soubresauts tentaient de redonner un souffle de vie à un cinéma moribond. Conduit par une abominable musique italo-disco signée Cipriani qui va de pair avec les caleçons à pois rouges que portaient les hommes en ces années 90, ce sexy giallo softcore qui dépouillé de ses scènes trash ne serait qu'un banal mélodrame érotique télévisé est à réserver aux amoureux de pur euro-sleaze qui y trouveront leur compte et glorifieront le slogan auquel obéit Arabella ainsi qu'à tous les amateurs de curiosités malsaines dont ce giallo fait définitivement partie. Les autres pourront passer leur tour ce qui ne les empêchera cependant pas de gouter aux vices et à la dépravation, essences même de la vie, notre vie. Espérons le du moins!