Il caso Raoul
Autres titres: The house of Raoul
Réal: Maurizio Ponzi
Année: 1975
Origine: Italie
Genre: Drame
Durée: 99mn
Acteurs: Delia Boccardo, Daniele Dublino, Stanko Molnar, Monica Monet, Ada Pometti, Alida Valli, Milena Vukotic, Stefano Ardinzone, Silvana Bacci, Laura Belli, Salvatore Buono, Alberto Capobianco, Gabriella Ceramelli, Vittorio Fanfoni, Anna Goel, Bernadette Lucarini, Valentino Macchi, Alessandro Monti, Irma Padolecchia, Maria Teresa Piaggio, Antonio Pierfederici, Marilù Prati, Carmela Sulli, Sven Valsecchi...
Résumé: Lorsqu'il avait cinq ans Raoul a été confié par sa mère à une famille adoptive. C'est elle qui l'a élevé auprès de ses deux enfants Andrea et Maddalena. Raoul est un enfant angoissé, toujours triste. A l'adolescence ses angoisses sont loin d'avoir disparu. Afin d'essayer de les exorciser Raoul dévide de suivre des cours de comédie. Il devient comédien, rencontre celle qui deviendra sa femme, Delia, et lui donnera un enfant. Tout semble aller au mieux désormais pour Raoul jusqu'au jour où ses parents adoptifs décident de lui avouer ses véritables origines. Tout s'effondre pour Raoul qui sombre lentement dans une schizophrénie irréversible...
Maurizio Ponzi fait ses débuts en tant que critique cinématographique au début des années 60 pour diverses revues italiennes dites intellectuelles dans la grande tradition des Cahiers du cinéma comme la réputée Cinema & films. En 1966 il abandonne la plume et devient assistant pour Pier Paolo Pasolini, un ami proche, sur Amore e rabbia avant de commencer sa carrière de metteur en scène deux ans plus tard avec un film à la Jacques Rivette I visionari qui très vite disparait des écrans radar. Il poursuit son parcours avec quelques téléfilms et surtout l'obscur Equinozio puis en 1975 tourne son ultime film plus ou moins
marginal, Il caso Raoul, avant d'entamer un virage à 180° vers un cinéma définitivement plus commercial.
Bruxelles. Raoul est un jeune comédien psychologiquement fragile. Il est marié, père d'un petit garçon nommé Andrea. Un soir en rentrant chez lui il s'en prend une fois de plus à sa femme, la frappe à coups de ceinture. Lasse de cette violence elle décide de partir. En essayant de la rattraper Raoul la bouscule. Elle tombe dans l'escalier. Elle doit être emmenée à l'hôpital. Commence alors un long flashback où Raoul revit son passé, les évènements qui l'ont amené à devenir cet homme violent et tourmenté. A cinq ans sa mère,
incapable de l'élever, le confie à un couple, Elsa et Alberto, qui a déjà deux enfants plus âgés, Andrea et Maddalena. Ils le considéreront comme leur propre fils. Raoul est un enfant angoissé, instable. Ses angoisses ne font que croitre en grandissant. Afin de les exorciser il devient comédien et fait la rencontre de celle qui deviendra la mère de son fils, Delia. Tout semble aller pour le mieux pour Raoul, désormais bien plus serein. Un jour ses parents adoptifs décident de lui avouer la vérité. Tout d'abord choqué Raoul semble se faire à cette idée mais intérieurement quelque chose s'est définitivement brisé. Ses angoisses, ses craintes, son instabilité refont surface. Au fil des jours il change de comportement. Si enfant
il souffrait déjà d'une certaine forme de schizophrénie celle ci revient en force et altère son comportement, ses jugements, sa rationalité. De jours en jours il perd pied jusqu'aux évènements de cette tragique nuit. Raoul doit confier la garde de son fils à ses parents adoptifs avant d'être interné en asile psychiatrique.
Tiré d'un fait divers réel Il caso Raoul est le dernier film d'auteur que signa Maurizio Ponzi. Il traite ici d'un cas de schizophrénie clinique dont souffre un jeune comédien, le Raoul du titre, depuis sa petite enfance. Il faut dire que l'enfant n'a pas vraiment eu de chance. Son père biologique est parti avant sa naissance laissant sa mère l'élever seule. Incapable de
subvenir à leurs besoins elle le confie à un couple afin qu'il s'en occupe. Raoul ne verra plus sa mère qu'il efface au fil du temps de sa mémoire. Raoul grandit en pensant que ce couple et leurs deux enfants sont sa vraie famille mais il est un enfant angoissé qui croît dans un climat d'instabilité incessant. Il est en conflit avec son grand frère, sent que quelque chose ne va pas dans sa vie. Ses tourments s'aggraveront à l'adolescence d'où sa décision de faire du théâtre afin de les affronter. Dans ce nouvel univers Raoul se transforme. Monter sur scène, jouer divers personnages l'aide à exorciser ses névroses et à s'épanouir. Tout bascule le jour où ses parents décident de lui avouer qui il est vraiment. Raoul renoue avec
ses démons et sombre peu à peu dans une folie irréversible.
Avant le tournage du film Ponzi a passé plusieurs mois à soigneusement étudier le travail de l'éminent psychiatre britannique Ronald Laing pour aborder au mieux le thème de la schizophrénie. Il caso Raoul est donc avant tout une étude clinique d'un cas bien précis menée avec intelligence et surtout sobriété. Point de scènes choc cette fois mais une oeuvre humaine d'une suffocante lenteur qui baigne dans une atmosphère de mélancolie, de tristesse que la grisaille, les décors d'une Bruxelles hivernale et la très belle partition musicale signée Manuel de Sica renforcent encore plus. Et plus encore certaines
séquences notamment celle où les parents adoptifs de Raoul déambulent au milieu des ruines de la ville dévastée par la guerre. Il caso Raoul s'étend en effet sur deux décennies, des années 50 à nos jours. Il se présente sous forme de longs flashbacks où on suit le triste parcours de l'enfant à aujourd'hui. Cela aurait pu être ennuyeux, paraitre long mais la mise en scène de Ponzi est suffisamment efficace pour nous intéresser au cas Raoul ne serait-ce que par ce climat assez particulier et une excellente interprétation, en tête un tout jeune Stanko Molnar dans le rôle titre. Après des débuts prometteurs chez les frères Taviani
l'année précédente le regretté acteur croate à la beauté magnétique confirme son talent dans un rôle peu évident. Sobre, sensible, il offre une prestation d'une rigoureuse justesse qui sied parfaitement à l'atmosphère du film. A ses cotés on a le plaisir de retrouver la grandeur d'une Alida Valli dont les talents de comédienne ne sont plus à démontrer et l'excellent Daniele Dublino dans la peau des parents adoptifs, la fragilité de Delia Bocardo dans un rôle douloureux, la toujours séduisante Laura Belli et la frêle Milena Vukotic. C'est le petit Sven Valsecchi, future star des lacrima movies et surtout du sulfureux Nenè qui joue
joue Andrea, le fils de Raoul.
Le troisième long métrage de Maurizio Ponzi qui se rapproche assez du Diario di una schizofrenica de Nelo Risi qu'il réalisa en 1968 malgré quelques inégalités notamment entre sa première et sa seconde partie est un drame humain de qualité, efficace, fort bien mis en scène et interprété, une pellicule d'atmosphère sobre et intelligente malheureusement oubliée comme la majorité des premiers films de son auteur que l'amateur prendra plaisir à découvrir.