Il sesso degli angeli
Autres titres: Le sexe des anges / Sex of the angels / Das geschlecht der engel
Real: Ugo Liberatore
Année:1968
Origine: Italie / Allemagne
Genre: Thriller
Durée: 100mn
Acteurs: Bernard De Vries, Rosemary Dexter, Doris Kunstmann, Laura Troschel, Giovanni Petrucci, Efisio Cabras, Brizio Montinaro, Hans Jurgen Neumann, Silvana Bacci...
Résumé: Trois jeunes bourgeoises, Nora, Nancy et Carla, se préparent à passer trois jours complets sur le yacht du père de Nora afin d'y expérimenter l'usage de LSD. Elles décident d'emmener avec elles un garçon. Elles jettent leur dévolu sur un étudiant en, médecine, Marco, adepte de la pêche et de l'amour libre. Après que Nancy l'ait séduit et convaincu de se joindre à elles, ils peuvent alors partir pour l'Istrie. Si tout semble idyllique sous les merveilleux paysages méditerranéens baignés de soleil, le week end va prendre une tournure tragique après que les quatre jeunes gens aient pris du LDS. A leur réveil, ils s'aperçoivent que Marco a reçu une balle dans le ventre. Agonisant, le jeune homme va se retrouver entre les mains de ses trois bourreaux dont la relation se désagrège au fil des heures. Qui a tiré sur Marco? Comment s'est déroulé le drame? Quel était en fait le plan des trois filles? Laquelle d'entre elles craquera la première à ce jeu monstrueux? Autant de questions qui peut être trouveront réponses lors d'un dramatique final....
Si Il sesso degli angeli devait au départ être tourné par Damiano Damiani, c'est finalement entre les mains de Ugo Liberatore, un des principaux pères du courant exotico-érotique, qui en avait écrit le scénario que le film échu suite à des soucis de production. Il sesso degli angeli fut le premier film que dirigea le metteur en scène, peut être même s'agit il ici de son oeuvre la plus conséquente.
Voilà un des tout premiers films mettant en scène une certaine jeunesse bourgeoise alors en pleine contestation qui à travers l'usage de la drogue trouve un excellent moyen de se révolter. Il sesso degli angeli, thriller maritime certes mineur, s'inscrit ainsi parfaitement dans la lignée de Interrabang et Top sensation, tout deux sortis la même année. Trois jeunes bourgeoises décident de partir trois jours pour l'Istrie sur le yacht du père de l'une d'entre elles afin d'expérimenter des drogues dures. Pour les accompagner elles séduisent un étudiant aux moeurs libres, Marco. Si dés le départ une certaine tension due à la jalousie se fait quelque peu ressentir, tout va basculer la nuit où, enfermés à clé dans une cabine, les quatre jeunes gens vont prendre du LSD. A son réveil, Marc s'aperçoit que durant la nuit quelqu'un lui a tiré une balle dans le ventre. A l'agonie, il va tenter d'échapper aux griffes des trois jeunes filles devenues ses bourreaux tandis que la jalousie, la peur et le doute s'immiscent entre elles d'autant plus que l'une d'elles refuse catégoriquement qu'elles écoutent la bande magnétique qui a tourné toute la nuit, seul élément susceptible de savoir qui a tiré et pourquoi.
Ce qui caractérise en priorité Il sesso degli angeli et d'une manière générale le cinéma de Liberatore c'est son rythme, particulièrement lent. Il ne passe strictement rien notamment durant toute la première partie du film qui prend alors des airs de joli voyage touristique. Voilà qui risque de déplaire à tout ceux qui d'un thriller attendent avant tout action et suspens. Le film est statique, d'une lenteur que certains qualifieront de mortellement ennuyeuse mais pour le peu qu'on se laisse prendre au jeu, à la beauté des paysages et des trois sirènes qui se transformeront en hyènes, on se laisse alors bercer au fil des vagues bleues azur en tentant de comprendre ce qu'elles trament. Un des grands intérêts du film est justement de laisser sous-entendre que ces trois jeunes filles, outre de faire l'expérience d'un fabuleux trip de LSD seules au milieu de la mer, ont en tête un plan bien défini notamment en ce qui concerne Marco, l'étudiant qu'elles ont invité. Entre regards, sous-entendus et non dits, on est en droit de croire qu'elles attendent de ces trois jours autre chose. Qu'on marche on non, cela conduira inéluctablement au drame. Lorsqu'elles sortent de la torpeur dans laquelle le LSD les a plongé, les jeunes filles toutes trois amnésiques, découvrent que l'une d'elles a tiré sur Marco qui agonise.
Commence alors la deuxième partie du film, la plus intéressante et la plus sombre également. Si Nancy, Nora et Carla, les trois filles, sont trop peu définies sur le plan psychologique, leur intransigeance et leur détermination sont suffisantes pour capturer l'attention du spectateur et les transformer à ses yeux en véritables monstresses, insensibles et impitoyables face au pauvre Marco mourant. Si Liberatore appuie sur le fait qu'elles ont un secret, il parvient avant tout à instaurer une certaine atmosphère macabre, étouffante. La jalousie, la peur et la suspicion s'installe alors entre les trois amies qui se soupçonnent mutuellement d'avoir tiré sur Marco lorsqu'elles ne sous-entendent pas qu'elles connaissent la terrible vérité, apeurées que la plus vulnérable, Carla, parle tandis que Marco dans un ultime effort va essayer d'alerter les autorités.
Epoque oblige, tout le contenu sexuel, très important, est malheureusement filmé hors champ ou tout simplement suggéré. Pas même l'ombre d'une poitrine dénudée, on se cache soigneusement la poitrine pour enfiler un soutien-gorge. Si cela en décevra plus d'un, la sexualité est cependant omniprésente tout au long du métrage mais de façon implicite. Nous sommes en 1968, échangisme et amour libre sont donc dans l'air du temps mais Liberatore teinte également son film d'une belle ombre de lesbianisme en gardant l'ambiguïté de la relation entre Carla et Nancy, une des sources de ce sentiment de jalousie qui plane tout au long du métrage. Liberatore profite de l'agonie de Marco pour nous offrir une jolie séance d'érotisme morbide lorsque Carla offre sa virginité à un pharmacien local afin qu'il leur procure de la morphine.
Le final pourra quant à lui surprendre. S'il n'apportera en fin de compte aucune réponse à nos questions, nouvelle déception pour certains, il débouchera sur un nouveau drame, pas forcément surprenant mais surtout intéressant par sa noirceur, un "no happy end" dramatique où finalement le mal triomphe au détriment des plus faibles.
Film sur le mal être de toute une jeunesse bourgeoise post soixante-huitarde qui à travers la drogue trouve non seulement un moyen de protestation mais aussi d'évasion, Il sesso degli angeli fut jadis rejeté tant par la critique que par le public, condamné à lentement devenir quasiment invisible au fil du temps. Il fait donc partie de ces oeuvres rares que l'amateur aura plaisir à (re)découvrir, un thriller qui appartient définitivement au filon érotico-maritime qui allait alors exploser. Malgré sa lenteur, sa trame narrative quasi inexistante, si Liberatore soulève quelques problèmes sociaux et courants d'idées sans rien y apporter de nouveau,
Il sesso degli angeli demeure cependant une oeuvre captivante par certains de ses aspects et tiendra en haleine ceux que ce type de films essentiellement psychologiques ne rebutent pas. On se laissera séduire par les paysages paradisiaques d'Istries, le bleu de la mer et la beauté des trois actrices, la brune pakhistanaise Rosemarie Dexter habituée au cinéma de genre italien (L'oeil dans le labyrinthe, Les monstres, La minorenne...), la blonde allemande Doris Kunstmann qu'on retrouvera l'année suivante dans le second film de Liberatore Bora Bora, toutes deux aussi belles qu'implacables et monstrueuses, et Laura Troschel. A leurs cotés on admirera le superbe corps de l'allemand Bernard de Vries, leur malheureuse victime. Particulièrement belle, on mentionnera également la partition musicale de Bruno Nicolai, entrecoupée de morceaux de jerk et de rock psychédélique endiablés, qui accompagne merveilleusement bien cette oeuvre méconnue, véritable petite curiosité maritime.