Il re della mala
Autres titres: Salopards en enfer / Battle of the godfathers / Zinksärge für die goldjungen
Real: Jurgen Roland
Année: 1972
Origine: Italie / Allemagne
Genre: Noir
Durée: 83mn
Acteurs: Henry Silva, Raf Baldassarre, Herbert Fleischmann, Patrizia Gori, Horst Janson, Veronique Vendell, Sonia Jeanine, Ermelinda De Felice, Uwe Carstens, Dan Van Huen, Wolfgang Kuhlman, Peter Lehmbrock, Viktor Oto...
Résumé: Deux boss de la mafia, l'allemand Otto Westermann et l'italo-américain Luca Messina, se livrent à un combat dans merci à Hambourg afin de régner en maitre sur la ville. C'est alors que le hasard veut que le fils de l'un tombe amoureux de la fille de l'autre. N'ayant que faire des querelles de leur paternel, les deux amants veulent vivre leur histoire d'amour et se marier...
S'il a essentiellement travaillé pour la télévision notamment pour de nombreuses séries, le metteur en scène Jurgen Roland s'est également essayé au cinéma avec une poignée de films d'aventures dans les années 60 et ce polar noir coproduit avec l'Italie qu'il réalisa en 1972. Et c'est bel et bien le noir à l'italienne que Roland tente ici de reproduire tant bien que mal en utilisant les principaux éléments du genre de manière malheureusement bien peu crédible.
Le puissant Otto Westermann règne en maitre tout puissant sur la mafia de Hambourg.
Lorsque Luca Messina, un Boss de la mafia américaine, débarque à Hambourg il est bel et bien décidé à reprendre la ville en main et mettre Westermann à ses pieds. Dans un premier temps il fait tuer la plupart des hommes de son rival qui ne tarde pas à répliquer. Une guerre ouverte débute entre les deux puissants parrains qui se sont connus autrefois et même collaboré. Ils n'avaient pas pris en compte un facteur qui risque de tout remettre en question leur rivalité. Eric, le fils de Westermann, tombe amoureux de Sylvia la fille de Messina. Ils ont même décidé de se marier et fuir cette guerre qui oppose leur père. Lorsque Westerman et Messina réalisent leur amour, il est peut être déjà trop tard. Une bombe a été placée dans la
voiture que les tourtereaux ont pris pour fuir Hambourg. Ils se lancent à leur poursuite mais la voiture explose. Par chance, les amoureux ont réussi à échapper à la déflagration. Les croyant morts, les deux mafiosi n'ont plus qu'une idée en tête: se venger l'un de l'autre. Ils entament une folle course-poursuite en hors-bord. Un seul en réchappera du moins jusqu'à ce que le sort rattrape le second.
Ce qui étonne le plus dés les premières images de Il re della mala c'est le mélange de genres que Roland se permet. Il transpose d'une part une intrigue purement mafieuse, typiquement noir sur le sol allemand, celui de Hambourg plus précisément. Voilà donc un
film à l'italienne qui se déroule en Allemagne avec des protagonistes germaniques, italiens et américains. D'autre part le film débute comme un mondo, une voix off nous présentant les mille et un aspects de la ville décrite de manière solennelle par le narrateur comme une véritable jungle urbaine. Il est donc normal que le spectateur se sente un peu désorienté tant le ton est inhabituel. La suite est tout aussi déconcertante, un adjectif que le metteur en scène va nous aider à faire rimer avec aberrante. Tout va vite, très vite. L'intrigue nous est jetée comme un os à un chien. Aucune présentation, voilà deux boss dont un fraichement arrivé de New York qui sans véritable raison vont s'affronter, l'un bien décidé à prendre la
place de l'autre. En deux temps trois mouvements Messina tue la quasi totalité des hommes de Westermann à qui Roland a tout de même donné un prénom à travers une série de photos. Tout aussi rapide est la rencontre et le coup de foudre entre Silvia et Eric, les enfants respectifs des deux boss. En quelques minutes les voilà amoureux, puis au lit et finalement bien décidés à ne plus se quitter, une rencontre des plus improbable de surcroit qui ne surprend ni l'un ni l'autre. Il n'y a pour ainsi dire aucun rebondissement encore moins de suspens ou d'histoire puisqu'elle se résume en une phrase, la bataille des parrains, si toutefois on peut parler de bataille. Un clash serait ici plus approprié!
A scénario inexistant personnages inconsistants. La plupart des protagonistes ne sont que des silhouettes, les deux principaux en tête. Bien difficile de croire en leur rôle d'autant plus qu'aucun ne fait réellement l'effort de lui donner une certaine épaisseur. Acteur de télévision Herbert Fleischmann ressemble plus à un inoffensif Sherlock Holmes qu'à un puissant mafieux. Quant à Henry Sliva, il se contente de serrer la mâchoire comme il sait si bien le faire mais malgré son talent et la présence qu'on lui connait, il ne parvient pas cette fois à donner un intérêt quelconque au film. Leur duo tombe à l'eau et prend le plus souvent des allures de comique involontaire. Les caractères qui les entourent ne servent en rien l'intrigue.
L'allemande Sonja Jeanine, starlette de l'érotisme vue dans bon nombre de polissonneries, petite amie de Westermann, n'est là que pour apporter au film sa dose de seins et de petits fessiers dénudés, la française Véronique Vendell n'est guère plus utile au bon déroulement du film qui avait simplement d'une traitresse. Quant à Ermelinda de Felice, la mère de Messina, est elle là pour donner un coté matriarcal sicilien au film ou une ombre de sensibilité à son fils, dans les deux cas, c'est un échec d'autant plus que Roland l'oublie au beau milieu du film après un malaise cardiaque. La petite curiosité est la présence de Patrizia Gori dont c'était le premier véritable rôle à l'écran. Ses admirateurs seront contents
de la retrouver même si, dans la peau de la douce Silvia, elle n'offre ici qu'un bref plan de nu très soft. Quant au fade Horst Janson, son amant, acteur principalement de séries, on se souviendra de lui au cinéma surtout pour son rôle de chasseur de vampires dans Capitaine Kronos: tueurs de vampires de Brain Clemens.
On ne comptera guère sur la mise en scène, anodine, impersonnelle, digne d'un banal téléfilm ce à quoi ressemble Il re della mala mais c'est bel et là qu'on devine les origines du cinéaste habitué aux séries télévisées. En fait le seul intérêt du film vient de son coté exploitatif une fois de plus. Et c'est peut être aussi le seul point qui pourrait le démarquer d'un
téléfilm et justifier un tant soit peu son titre anglais. Il y a en effet suffisamment de scènes d'action pour que le spectateur ne s'endorme pas. Cette version mafieuse de Roméo et Juliette sur le sol teuton est riche en fusillades sanglantes, bagarres, gorges tranchées au rasoir, pendaison et explosions dont celle de la voiture piégée, en pleine ville, sous le regard ébahi des passants. Le clou du film reste la longue course-poursuite en hors-bord sur mer et dans les canaux hambourgeois, plutôt impressionnante, entre les deux boss, une séquence filmée à cent à l'heure qui n'est pas sans rappeler celle de Amsterdamned bien des années plus tard. Roland s'évertue visiblement à appuyer les effets graphiques, voila qui
donne un peu de relief à l'ensemble et voila surtout pourquoi on se laisse aller à regarder Il re della mala jusqu'aux ultimes minutes qui nous mèneront vers un final un peu trop abrupt mais guère surprenant.
Rythmée par une musique plutôt efficace signée Lallo Gori, cette transposition allemande de la pièce de Shakespeare bien peu crédible et involontairement drôle fait partie de ces petits films vite vus aussi vite oubliés qui attirera surtout le collectionneur de curiosités seventies vu la rareté du film et l'amateur assidu de polars et noirs à l'italienne qui le brandira comme une sorte de trophée à poser sur son étagère parmi tant d'autres oeuvrettes de cet acabit. Henri Silva et Patrizia Gori se retrouveront la même année dans une autre version de Roméo et juliette à la sauce noir pour le violent et bien plus solide et intéressant Quelli che contano, un film que Patrizia avoue beaucoup aimer.