Profumo
Autres titres: Bizarre
Real: Giuliana Gamba
Année: 1987
Origine: Italie
Genre: Drame / Erotique
Durée: 92mn
Acteurs: Florence Guérin, Robert Egon, Luciano Bartoli, Stefano Sabelli, Giuliano Sestili, Vasco Santoni, Erminia Garofano...
Résumé: La belle et jeune Lorenza est mariée depuis cinq ans à un homme qui ne peut trouver de plaisir que dans des relations sadomasochistes. Il met en scène des scénarii de plus en plus pervers qui ne sont plus du goût de sa femme. Lasse, elle décide de le quitter et part dans leur villa de bord de plage. Elle y fait la connaissance du jardinier, Edward, un jeune homme androgyne, qui ne tarde pas à tomber amoureux de Lorenza. Hors de lui, l'époux les suit. Lorenza prend alors un malin plaisir à narguer son époux. Plus le temps passe, plus la relation entre Edward et Lorenza devient ambigüe. Incapable d'échapper à ses désirs sadomasochistes qu'elle refoule en elle, Lorenza est prise entre son amour pour Edward et la passion fiévreuse qu'elle ressent toujours pour son mari. Afin de lui échapper, elle met pourtant au point une étrange stratégie. Les deux amants se travestissent afin de changer de sexe et pouvoir ainsi piéger et tuer l'époux jaloux. Le piège se retournera contre eux et bouleversa le destin de chacun...
Ancienne assistante de Joe D'Amato, Guliana Gamba fut également l'une des pionnières du hardcore transalpin puisqu'elle débuta sa carrière en 1981 en réalisant trois films pornographiques: Pornovideo, Claude e Corinne et La lingua di Erika. Si aujourd'hui elle renie ce passage dans le X, Giuliana se tourna par la suite vers l'érotisme. Profumo est le premier film érotique qu'elle mit en scène en 1987 après ce passé cinématographique honteux.
Réalisé peu après le sulfureux 9 semaine 1/2 de Adrian Lyne, Profumo ne fait qu'en reprendre les grandes lignes, les tumultueux rapports amour/haine d'un couple qui ne peut trouver de plaisir autrement que dans des relations sadomasochistes de plus en plus extrêmes. S'ils se détestent jusqu'au point de vouloir se tuer, ils ne peuvent pourtant se passer l'un de l'autre. L'arrivée dans leur vie d'un jeune étudiant androgyne va faire basculer ce fragile équilibre vers un inéluctable drame dont personne ne sortira indemne.
Le sujet n'est pas nouveau, Gamba n'a rien inventé mais il faut reconnaitre à la jeune réalisatrice un certain savoir faire. Au crédit du film ses splendides décors, luxueux appartements et chambres d'hôtels aux tons chatoyants, somptueuses villas au bord de mer photographiés avec soin donnant ainsi au film un air classieux. Toujours à son actif un certain sens de la mise en scène, souple et dynamique et surtout un goût prononcé pour un érotisme aussi glacial que brûlant, un contraste qu'on retrouve dans les scènes sadomasochistes, aussi joliment excitantes que cruelles par instant. Cette incessante alternance est une des grandes forces du film qui parvient avec aisance à mélanger sensualité, douceur et perversion. On sent chez Gamba un certain sens du professionnalisme. Les scènes érotiques, assez osées, sont souvent très belles, aux limites par instant du hardcore, et toutes parfaitement filmées. La réalisatrice a parfaitement su marier la violence des jeux sadomaso et le coté beaucoup plus voluptueux des jeux érotiques.
On retiendra de Profumo certaines séquences mémorables, étonnantes, à la fois douloureuses et troublantes, celle qui ouvre le film, un surprenant dérivé de la roulette russe, le canon d'un revolver enfoncé dans le vagin de sa femme, l'époux actionne le barillet avant de presser la détente, celle de la petite culotte arrachée à la fourchette, sans oublier celle de la brosse à cheveux. Allongé sur le ventre, lascif, l'étudiant, ambigü, se laisse caresser le fessier par une brosse. Ne pouvant résister à ses pulsions sadiques, Lorenza glisse lentement le manche entre ses fesses avant de le lui planter violemment dans son intimité. Beaucoup ludique est celle où les deux amants se recouvrent le corps de coca cola qu'ils lèchent avec lubricité.
Malheureusement Profumo souffre de son scénario trop peu développé. Desservie par des dialogues souvent peu convaincants, l'histoire perd beaucoup de sa force par le manque d'épaisseur de ses personnages. Ainsi la relation complexe qui existe entre Lorenza à la fois soumise et rebelle, usée par cinq années de jeux de plus en plus pervers, et son mari, homme sadique qui ne trouve de plaisir qu'à travers des scénarii ouvertement tordus, est bien peu crédible tant elle demeure superficielle sous la direction de Gamba. Trop peu fouillés, les protagonistes, dénués de toute véritable psychologie, ne dépassent jamais le simple stade de la caricature. Profumo ne parvient donc jamais à être réellement crédible.
La linéarité de l'ensemble casse le peu de suspens d'un scénario trop téléphoné tandis que le recours au travestisme comme ultime ressource est ici assez mal utilisé. Aussi androgyne et troublant que soit le jeune Edward, il n'est guère convaincant travesti en femme tandis que la masculinité de Lorenza devenue homme l'est tout aussi peu. A se demander comment leur entourage peut être dupe d'une telle supercherie. Si la confusion des genres et le travestisme, thèmes toujours aussi fascinants, ont souvent été illustrés à l'écran notamment dans le cinéma italien, ils trouvent là une de leurs déclinaisons les moins déconcertantes et malheureusement une des plus risibles.
On regrettera également le choix de Florence Guérin, sexy starlette habituée aux séries de seconde zone et thrillers de piètre renommée qui fit une bonne partie de sa carrière en Italie, pour incarner Lorenza. Certes Florence est belle et photogénique, elle joue énormément sur son sex appeal, totalement désinhibée, mais ses talents d'actrice sont inversement proportionnels à sa facilité à se mettre nue et jouer de ses charmes. On oubliera la prestation de Luciano Bartoli dans le rôle du mari, totalement effacé, presque oublié. On retiendra surtout la présence du jeune acteur allemand Robert Egon, aussi troublant qu'androgyne, qui pour un premier rôle à l'écran et malgré ses maladresses reste la véritable révélation de film érotique. On reverra par la suite Robert, malheureusement décédé en 2010, le plus souvent dans des rôles mineurs notamment celui du jeune officier SS qui hante la maison des Fantômes de sodome de Lucio Fulci.
En l'état, Profumo n'est pas un mauvais film. Il passe tout simplement à coté de son sujet. Demeure un petit film érotique classieux, modeste, parfois osé, visuellement très beau qui se laisse visionner sans déplaisir tout en assouvissant certes bien légèrement la soif des amateurs de délices pervers. En fait, Profumo est un joli hors d'oeuvre avant un menu beaucoup plus cru!
Giuliana Gamba avant de se tourner vers une carrière beaucoup plus télévisée récidivera deux ans plus tard avec La cintura, un nouvel hommage aux plaisirs sadomasochistes, qui connut en Italie un joli petit succès.