Sadomania
Autres titres: L'enfer du plaisir / Sadomania Hölle der lust / El Infierno de la pasion
Real: Jesus Franco
Année: 1981
Origine: Espagne / Allemagne
Genre: WIP
Durée: 102mn
Acteurs: Ajita Wilson, Ursula Buchfellner, Antonio Mayans, Andrea Guzzon, Uta Koepke, Otto Retzer, Diana Capdevila, Gina Janssen, Tania Sandoval, Jesus Franco, Angel Cabalero, Patricia Quow, Consuela Tejera...
Résumé: Un jeune couple en voyage de noces est arrêté par un groupe de femmes armées quelque part sur une île qu'on pourrait situer en Amérique du sud. Alors que son mari est rapidement libéré, sa compagne est amenée dans un camp de travail tenu par une femme cruelle dont l'époux est impuissant. La malheureuse va vite découvrir l'enfer carcéral des prisons de femmes où tortures, traite des blanches, chasses humaines et viols sont monnaie courante. Son mari va tenter de la libérer en prenant d'assaut la forteresse...
Nouvel essai de Jesus Franco dans un genre alors prolifique en Italie, le WIP, puisqu'il avait réalisé bien des années auparavant 99 donne, Quartiers de femmes sans oublier l'ultime opus de la série des Ilsa, renié par Dyanne Thorne, renommée ici Greta avec Greta la tortionnaire, Sadomania marquait également le retour du cinéaste sur le sol espagnol d'où il avait dû s'exiler durant le régime franquiste.
Enfin libre de tourner ce qu'il veut, Franco nous offre un WIP étonnant tant il sombre par instant dans l'absurde. Bien inutile de se laisser bercer d'espoir à l'évocation du titre puisque à notre grand désespoir de sadique le film n'en a que l'appellation. Au sadisme, Franco préfère un érotisme softcore vite besogneux dans lequel baigne un scénario abracadabrant. Si comme d'accoutumée le point du départ du film est l'emprisonnement d'une malheureuse jeune femme victime d'une injustice, Franco a semble t'il voulu relever d'un cran l'intérêt du scénario en le sophistiquant légèrement. L'effort est louable mais malheureusement il en devient du moins souhaitons le involontairement ridicule et surtout bien peu crédible.
Comment donner une quelconque crédibilité au prologue totalement ahurissant et à cette prison-forteresse perdue au milieu de nulle part (l'Amérique du sud semblerait il même si Franco ne situe jamais l'action du film) où tout le monde peut pénétrer sans difficulté aucune? Comment peut on imaginer que deux jeunes mariés aient l'idée saugrenue de venir passer leur lune de miel dans un tel endroit? Comment imaginer qu'on puisse libérer le mari et le laisser rentrer chez lui sans sa femme? Comment croire à ces chasses humaines organisées sur ce territoire austère au vu de tous? On n'oubliera pas le rocambolesque assaut de la forteresse par le vindicatif mari de l'héroïne, vêtu d'un simple jean et de baskets, qui va ainsi affronter à mains nues toute une escouade de soldats en jupons, soit une poignée de tigresses quelque peu anémiques avant de s'échapper en... fiat 127!!
Tant d'incohérences enlèvent au film une grande part de son intérêt mais à la logique ce dont Franco a rarement fait preuve, le réalisateur préfère le ludisme et l'érotisme s'intéressant beaucoup plus à sa cohorte de mannequins pour publicités qui lui sert de détenues dont il ne cesse de filmer la plastique. L'amateur de playmate blondes sera heureux en admirant leurs courbes, il le sera beaucoup moins quant à leurs talents de comédiennes qui se limitent à se déshabiller aussi facilement que docilement. On est ici très loin des détenues désespérées et hargneuses des WIP italiens comme nous y avaient habitué Rino Di Silvestro ou Bruno Rondelli. Les détenues de Franco, impeccables poupées empotées, vont au bagne en santiags, mini short et chapeau de paille avant de se laisser aller à la luxure dans les somptueux appartements du gouverneur qui souffre malheureusement pour lui et surtout pour son épouse d'impuissance!
Sadomania évite l'aspect sordide et surtout tout excès de violence en tentant de garder un coté bon enfant voire humoristique. Franco n'hésite pas à se mettre lui même en scène en s'octroyant le rôle d'un gérant de bordel qui se fera sodomiser par ajita wilson déguisée en... homme! Un comble d'ironie! Les amateurs de sadisme seront donc fort déçus puisque ce ne sont pas les quelques coups de cravache, un cat-fight d'une incroyable mollesse et quelques insultes qui étancheront sa soif de brutalités en tout genre.
Au final, Sadomania est une sorte de bande-dessinée pour adultes, une forme d'hommage à ces comics érotiques pullulant de tigresses en cuissardes qui usent et abusent du fouet dans des donjons où les détenues sont encagées et servent de jouets humains à de puissants hommes à la tête d'une quelconque dictature. C'est également est une peinture des régimes totalitaires où le pouvoir en place représentés par des personnages corrompus a tous les droits dont celui de l'emprisonnement arbitraire. Ces dirigeants répriment toutes formes de libertés pour mieux satisfaire les leurs.
Tout ludique soit il Sadomania reste du pur cinéma d'exploitation avec son lot de sexe et de violence, indispensable à tout WIP. Les prisonnières tout comme les sadiques matrones passent leur temps les seins nus, se caressent lascivement et s'ébattent entre elles le plus souvent possible tandis que la directrice les viole et les torture. Franco se paie même le luxe d'une séquence de zoophilie coupée selon les versions du film entre une prisonnière et un berger allemand. Au crédit du film toujours, une belle scène de chasse humaine qui rappelle bien entendu Les chasses du comte Zaroff qui se terminera par la mort d'une des proies féminines, croquée par un crocodile.
Bénéficiant d'une jolie photographie Sadomania est loin d'être un WIP désagréable, bien au contraire, même s'il n'est pas un must du genre. Franco a fait pire, bien pire. En tête d'affiche, on retrouvera Ajita Wilson, superbe, dans le rôle de la gardienne chef sadique, maniant la cravache avec dextérité. Avouons qu'il s'agit là d'une des meilleures prestations d'Ajita qui, sortie des productions érotiques bon marché et du hardcore dans lesquelles elle fut malheureusement cantonnée, parvient à montrer qu'elle pouvait être une bonne actrice. A ses cotés, quelques habitués des films de Franco et de l'érotisme transalpin et hispanique dont l'allemande Ursula Buchfellner, Andrea Guzzon vue chez D'Amato et Antonio Mayans.
On soulignera qu'il existe différentes versions du film, plus ou moins longues ou montées plus ou moins différemment, les principales différences se situant surtout autour de la scène de zoophilie et la séquence qui se déroule dans le bordel clandestin.