The Genesis children
Autres titres:
Réal: Anthony Aickman
Année: 1972
Origine: USA
Genre: Teensploitation
Durée: 85mn
Acteurs: Greg Hill, Vincent Child, Jack Good, Peter Glawson, Butch Burr, David Johnson, Max Adams, Bubba Collins, Mike Good...
Résumé: Huit adolescents âgés de 12 à 16 ans, rejetant l'école et certaines valeurs de la vie, sont recrutés par annonce et emmenés par un étrange prêtre à la fois militaire et politicien sur une plage où, seuls durant une semaine, ils vont devoir subvenir à leurs besoins, trouver une malle remplie de vivres et apprendre une certaine philosophie de vie. Ils sont pour le prêtre les acteurs d'une représentation dont le public est Dieu. Au bout de sept jours, chacun décidera de son destin...
The Genesis children fait partie de ces obscurités qu'on a longtemps cru perdues et dont la rareté crée le mythe auprès des amateurs d'un certain cinéma trashy-art d'une part et du cinéma d'exploitation adolescent homo-érotisant d'autre part.
Vomi par la critique, détruit par un public scandalisé qui quitta les rares salles où il fut jadis projeté aux USA avant d'être classé X puis confisqué par les autorités obligeant le producteur et certains des acteurs à fuir, The Genesis children bien avant la vague italienne de Teensploitation est une sorte d'hybride entre La maladolescenza expurgé de son caractère sexuel et Sa majesté des mouches sur fond de religion exacerbée.
Tourné aux abords de Rome et de Salerne très probablement durant l'été 1971, voila une métaphore christique qui conte les aventures de huit adolescents de 12 à 16 ans qui rejettent l'école et certaines valeurs de la vie. Emmenés par un étrange prêtre à la fois militaire et politicien sur une plage, ils vont devoir durant sept jours subvenir à leurs besoins et apprendre à vivre ensemble, nus, débarrassés ainsi de tout élément superflu afin d'acquérir une certaine philosophie de vie.
Obscur certes, The Genesis children est avant tout un spectacle expérimental qui flirte par moment avec le fantastique, un opéra trashy-art dans la grande mouvance des années 70 oscillant entre surréalisme maladroit et religion exacerbée le tout arrosé d'une légère dose d'imagerie homo-érotisante.
Le but de Anthony Aickman est incertain. Certains n'y verront qu'un film indigne et scandaleux sans propos aucun hormis celui de satisfaire les instincts voyeurs du spectateur, d'autres y verront un film expérimental truffé de symboles et d'idées brouillon sur les valeurs morales et Dieu. Le film se compose essentiellement de quatre principaux segments relié par une série de flashes-back qui aident le spectateur à
comprendre comment les huit adolescents ont été entrainé dans cette étrange aventure. Tous ont répondu à une annonce parue dans un journal dans
laquelle l'étrange prêtre recrutait huit jeunes garçons pour être les interprètes d'une
représentation donnée sur une plage dont le public serait Dieu lui même.
Les segments se suivent de façon un peu anarchique. Le premier thème abordé est le naturisme. Vivre nu est un don de Dieu. Il nous fut quitter nos vêtements pour mieux profiter de la vie sans avoir honte de notre corps. L'habit crée la différence donc l'incompréhension, la haine et le rejet qui mènent à l'incommunication. Dépouillés de leurs habits, les différences entre les huit garçons, aussi différents soient ils, s'estompent. The Genesis children pourrait être vu comme une véritable ode au naturisme, un sujet alors très à la mode en ce début d'années 70 où soufflait un vent de liberté sexuelle extrême.
Un des autres thèmes que traite le cinéaste est la peur. Pourquoi avons nous peur? s'interroge Aickman. Pourquoi Dieu a t-il crée la peur, un sentiment propre à l'homme face à
l'inconnu. Cette peur conduit à la violence et à la destruction de la civilisation violemment imagée par l'attaque du bus, sa mise à feu et les rites tribaux qui s'ensuivent. On assiste là à une sorte de retour aux âges primaires, au chaos originel, à la vraie nature de l'être humain, destructrice qui ramène au final de Sa majesté des mouches. C'est ici la dernière étape avant ce qu'appelle le réalisateur l'Ultime Décision, celle que devront prendre les adolescents le septième jour. Se rhabiller et quitter l'ile ou rester nu et rester sur cette plage aux cotés de Dieu. On trouve à toutes ces questions des réponses certes bateau enrobées d'une philosophie assez primaire mais qui invitent pourtant à une certaine réflexion que les ultimes images ébranleront, faisant basculer l'histoire dans une dimension aussi onirique
qu'inquiétante tandis que huit autres garçons débarquent auprès du prêtre hilare, figure drapée de noir qui se dessine sur le bleu du ciel. "Au départ il y avait Dieu puis l'Homme créa Dieu à son image désormais l'Homme est mort." murmurera la voix du narrateur alors que l'image se fige. Cette ile de toute beauté pourrait elle être le jardin d'Eden, ces enfants des anges désormais corrompus par le Mal incarné par le Pouvoir, l'inquiétante figure du prêtre. Si finalement notre vie n'était qu'une perpétuelle représentation hypocrite, un spectacle qu'on joue pour un Dieu qu'on a crée de toutes pièces afin de mieux nous leurrer et nous perdre, si l'Homme a donné à la Genèse l'image qu'il voulait lui donner afin de mieux se cacher des vérités.
On peut y voir aussi une tentative de ré-écrire la Genèse, un retour au
Paradis originel dont ces adolescents nus en seraient les anges dans une société contemporaine où les valeurs se sont perdues, où
chacun se retranche derrière les apparences et ses croyances égoïstes.
The Genesis children est une sorte de livre pseudo philosophique d'où s'échappent à l'infini questions et réflexions appuyées par des dialogues faussement ésotériques qui renforcent encore plus l'aspect biblique de l'ensemble.
En partie faute à un fil conducteur assez difficile à suivre, une philosophie trop hermétique et complexe, un coté brouillon trop prononcé le film sera aux yeux de ses détracteurs qu'un prétexte malsain et complaisant pour étaler à l'écran la nudité des acteurs. Durant la majeure partie du film, les garçons courent, folâtrent, virevoltent et s'amusent nus sur la plage à grands renforts de somptueux ralentis bercés par une partition musicale qui mélange chants religieux souvent inquiétants et musique bucolique. Cela offre ainsi à Aikman l'occasion de détailler et lécher de son objectif les courbes et les corps nubiles de ses comédiens dans ce qu'ils ont de plus intime sur fond de sable blanc, de mer azur, de coucher de soleil rougeoyant et de criques enchanteresses. A l'instar de Larry Clarke, Anthony Aickman était à la base photographe professionnel. On devine tout son talent d'artiste à travers ces scènes.
Cette surabondance de nudité aussi gratuite que complaisante fut une des principales causes du scandale dont le film fut jadis victime d'autant plus que la Lyric International, une agence de jeunes modèles de nus pour presse masculine spécialisée également productrice du film, se retrouva au coeur d'une importante affaire de moeurs l'année suivante qui provoquera sa fermeture définitive en 1973.
Si en fait de nombreux thèmes semblent surgir du film il n'y a peut être rien à voir si ce n'est une forme de cinéma subversif particulièrement controversé,
un essai arty expérimental quasi auteurisant, voyeur et avant tout pro-naturiste sous couvert de messages pseudo ésotériques. Et par bien des égards d'ailleurs The Genesis children n'est tout simplement qu'une ode au naturisme, Aikman en fut un des pionniers aux USA, dont on retrouve l'idéologie fondamentale. Si les vraies valeurs de la vie se cachent au coeur de la nature et des éléments, vivre nu est la parfaite communion entre l'homme et cette dernière et par extension Dieu.
La plupart des jeunes comédiens appartenaient à la Lyric pour laquelle ils étaient modèles. Le plus âgé d'entre eux, le blond Peter Glawson, un des membres les plus en vue de l'agence, fit beaucoup parler de lui non seulement pour ses apparitions dans une poignée de courts réalisés par la Lyric et les nombreux clichés qui existent de lui mais également pour le scandale qui entoura alors son nom. Quant à Greg Hill, il fut dit-on très proche de Aikman avec lequel il est longtemps resté ami. Greg est par la suite devenu décorateur d'intérieur. Homosexuel, il est mort du sida au début des années 90.
Longtemps visible uniquement via la précieuse vidéo américaine, The Genesis children a miraculeusement resurgi au début des années 2000 sous forme d'une édition DVD qui donna une seconde chance au film devenu au fil du temps culte auprès de tout un public underground avide d'oeuvres homo-érotisantes à l'aura particulièrement sulfureuse. Totalement impensable aujourd'hui, le film de Aikman est une réelle curiosité d'un autre âge, celui où le cinéma d'exploitation ne connaissait aucune limite. Il est le parfait reflet des moeurs en ce début d'années 70, toute une époque bien révolue où soufflait le vent de la liberté que le cinéma savait si bien illustrer. Si les esprits les plus retors continuent à n'y voir qu'un film transgressif et subversif nauséabond, The genesis children est une oeuvre d'une totale innocuité, un joli film naturiste aussi solaire qu'ensoleillé qui aujourd'hui ne choquera plus guère que les plus pudiques et ceux qui voient le mal partout.