Ring
Autres titres:
Réal: Luigi Petrini
Année: 1977
Origine Italie
Genre: Drame
Durée: 91mn
Acteurs: Mario Cutini, Stella Carnacina, Linda Sini, Joshua Sinclair, Serena Grandi, Pupo De Luca, Nikki Gentile, Armando Marra, Georgia Lepore, Sasha D'Arc, Franco D'Onofrio, Gilberto Galimberti, Nino Vingelli...
Résumé: Afin qu'il puisse rembourser l'importante dette que son père doit à Don Alfonsino Ciro dérobe une cargaison de thon à Don Farracone qu'il revend à une bande rivale. Furieux Don Farracone veut savoir qui lui a volé son chargement. Suspicieux Don Alfonsino fait passer à tabac le père de Ciro afin qu'il lui dise d'où vient l'argent avec lequel il l'a remboursé. Le pauvre homme meurt de ses blessures. Quelques temps plus tard Ciro se bat avec les hommes qui ont tué son père. Un entraineur de boxe est témoin de la bagarre. Impressionné par Ciro il veut en faire son nouveau poulain et l'entrainer pour le championnat européen de boxe...
Cinéaste peu connu du grand public Luigi Petrini a pourtant derrière lui une carrière qui s'étale sur presque cinq décennies, partagée entre télévision, théâtre et cinéma. Après avoir fait ses débuts auprès de Ferdinando Baldi puis Vittorio De Sica Petrini réalise son premier film, Una storia di notte. Dés lors Petrini va toucher à beaucoup de genres sans jamais pour autant parvenir à se faire un nom et surtout trouver le succès. Il met en scène en 1970 son diptyque lesbien composé de Cosi cosi... piu forte et La ragazza dalle mani di corallo, il s'essaie au polar, le trop brouillon (Opération K), la sexy comédie (C'è un spia nel mio letto,
Scusi si potrebbe evitare il servizio militare...), le film musical trashouille (White pop Jesus), le drame mafieux (A suon di lupara). En 1977 il donne sa version de Rocky, un succès international peu imité en Italie. On peut déjà reconnaitre cet atout à Ring sorti sur les écrans italiens en 1978 mais resté inédit en France.
Toto Esposito dont les maigres revenus proviennent surtout de la vente de cigarettes de contrebande célèbre la communion de sa petite fille Rosalia. La fête est interrompue par l'arrivée de Don, un vieux boss mafieux qui se trouve être son fournisseur, à qui Toto doit 500 000 lires. Don Alfonsino donne 24 heures à Toto pour rembourser sa dette, un délai bien
trop court pour que le pauvre homme rassemble une telle somme. Son fils, Ciro, aidé de son ami Pasqualino, tente de l'aider à trouver l'argent en commettant de menus mais cela est insuffisant. Les hommes de main du mafieux donnent une première leçon à Toto en le rouant de coups. Ciro décide alors de voler un important chargement de thon au dépôt de Don Farracone dont Don Alfonsino est un des clients. Ciro vend le thon à une bande rivale et donne l'argent à son père qui ignore sa provenance. Toto rembourse sa dette mais en apprenant le vol du thon Don Alfonsino exige de savoir d'où provient l'argent avec lequel Toto a payé sa dette. Le pauvre homme est passé à tabac sous les yeux horrifiés de Rosalia qui
en perd la parole. Il meurt quelques heures plus tard. Quelques temps plus tard alors qu'il est à son travail Ciro se bat contre les hommes qui ont tué son père. Gégé, un entraineur de boxe est témoin de la scène. Persuadé que Ciro peut devenir un champion par la façon dont il se bat il le persuade de prendre des cours. Ciro devient son nouveau poulain. Don Farracone exige de l'entraineur que Ciro participe au championnat du titre européen. Il devra se battre contre Tommy Davis un redoutable boxeur anglais. Pour l'entraineur Ciro n'est pas prêt pour un tel combat mais il lui est impossible de refuser. Il va entrainer son poulain du mieux possible jusqu'au grand jour.
Après le triomphe de Rocky au box-office le producteur Franco Vittolo qui avait déjà produit White pop Jesus demande à Petrini de réaliser un film sur les traces de celui de John Avildsen. Peu enthousiaste Petrini refusa d'autant plus qu'il ne connaissait rien au monde de la boxe. Vittolo insista. Petrini s'immergea donc dans cet univers, visionna films et documentaires et se prit lentement au jeu. Finalement séduit par ce sport il accepte la proposition de Vittolo. Ainsi naquit Ring, peut-être un des films les plus intéressants du metteur en scène de part sa singularité. En effet Ring n'est pas un simple ersatz de Rocky c'est un mélange inattendu de deux genres, le film mafieux et le "Rockyxploitation" pour
employer un néologisme, un mix inattendu, surprenant qui pourra déconcerter le spectateur qui s'attendait à une pellicule axée essentiellement sur la boxe.
La première partie du film soit les 40 première minutes est un pur film à la "Mario Merola". L'intrigue nous plonge au coeur de Naples dans l'univers de la contrebande de cigarettes et des règlements de compte. Le père de Ciro, le brave Toto, doit en effet une importante somme d'argent à un boss de la Camorra qui le menace de le tuer s'il n'a pas son argent sous 24 heures. Tous les éléments du film, du drame mafieux (chantage, honneur, famille, pauvreté, trahison, passages à tabac...) sont au rendez-vous et plutôt bien utilisés d'autant
plus que Petrini parvient à créer une certaine atmosphère "napolitaine" (le film fut tourné à Sorrento, dans le golfe de Naples) des plus agréables.
Tout change à partir de la seconde moitié du film entièrement axée cette fois sur la boxe. Il n'est plus question de mafia ou si peu. A peine Ciro a t-il rencontré Gégé, le coach, que les entrainements commencent, dans la foulée les premiers combats. Tout va vite, très vite et force est de constater que Ring perd beaucoup de son intérêt. Le film se transforme en un mini clone du pauvre de Rocky malheureusement jamais très crédible. Le défaut majeur de ce sous Rocky mafieux est de ne pas avoir relié les deux parties du film. On cherche en vain
une raison, quelque chose qui les relierait mais rien si ce n'est la présence de Don Farricone. On pourrait même dire que les deux parties sont indépendantes, qu'il s'agit de deux intrigues différentes. Dommage car le scénario aurait pu être intéressant. Immerger un nouveau Rocky Balbao au coeur de la mafia napolitaine, au centre de combats gérés par la Camorra avec ce que tout cela entraine aurait pu donner une histoire fabuleuse. Il n'y a rien de tout ça. Durant les quarante-cinq dernières minutes Petrini se contente simplement de filmer son protagoniste faire ses footing dans les rues de Sorrento (Comme Stallone dans les rues de New-York), frapper dans des punching-balls, s'entrainer dans sa salle de sport
mais au delà du fait que tout cela est assez répétitif c'est surtout le manque de conviction et de crédibilité qui frappe avant tout. Difficile de croire au personnage de Ciro tant il manque d'inspiration, tant il est fade. Il n'y a ni émotion, ni sentiment, ni réelle volonté, ce profond désir de vouloir gagner, de devenir un champion à la sueur de son front, à la force de ses bras, de son corps. Vu sa manière de boxer on est de toutes façons fort dubitatif mais au moins on sourit (rit?).
Ring est mou, trop mou pour tenir en haleine à l'image même des quelques combats qui parsèment cette seconde partie y compris le combat final pour le titre européen, une longue séquence qui aurait du être le clou du film. On reste même perplexe. Petrini a t-il tourné
dans une salle pleine ou sont-ce des inserts lorsqu'on voit le public en transe? En effet lorsque les deux boxeurs combattent il est clair qu'ils sont seuls sur un ring au milieu d'une salle vide plongée dans l'obscurité pour masquer la supercherie, le metteur en scène se contentant de tourner autour d'eux caméra en main, une bande son préenregistrée pour simuler la foule en délire. Voilà qui prouve bel et bien la pauvreté des moyens dont a bénéficié Petrini mais qui surtout fait s'effondrer le film qui vire au comique sans parler de la laideur des scènes de combat. Quant au championnat du siècle il ne dure que cinq minutes tapantes (pour éviter de filmer tous les rounds leur numéro défile sur l'écran). Economie,
économie. Si Ciro va une fois au tapis la seconde fois il se relève et met KO le champion en quelques secondes après avoir entendu sa petite soeur, qui par miracle a recouvré sa voix, l'encourager. Magique. Le mot Fin peut donc apparaitre!
Que penser de l'interprétation? Sans être mauvaise elle n'est pas forcément à la hauteur de l'histoire. Mario Cutini, l'éternel bad boy du cinéma italien, prend la place de Stallone. Choisi par le producteur qui en était éperdument amoureux (il avait déjà été le principal protagoniste de Opération Kappa pour les mêmes raisons) Cutini sans être un mauvais comédien n'a pas l'étoffe d'un sportif. Il se contente d'être lui même, le visage figé dans la
seule expression qu'il semble connaitre, celle du méchant froid et impassible qu'il a toujours interprété. Par chance Mario est séduisant, admirer son corps peut être un petit atout. Ce qu'on fera dès les années 80 puisque après Play motel et Novices libertines Mario se tournera définitivement vers l'érotisme et le porno soft avant de mettre un terme à sa carrière débutée en 1974. On appréciera la présence de l'émouvant Armando Marra (Toto), du toujours sympathique Pupo De Luca, du très bon Nino Vingilli et de Joshua St Clair. Le boxeur anglais est interprété par le maitre d'arme récemment disparu Sasha D'Arc qui travailla sur une multitude de films italiens.
L'atout féminin est représenté par la brune Stella Carnacina (Alba) qui avait déjà travaillé pour Petrini sur La possédée et White pop Jesus, et l'ex-modèle d'origine américaine la mondaine Nikki Gentile. La première n'a guère d'utilité si ce n'est celle d'être la petite amie de Ciro, l'équivalente de l'Adrienne de Stallone, qui se contente simplement de bouder ici. La seconde a encore moins d'utilité. Elle est la petite amie de Don Farracone avec laquelle Ciro trompe sa fiancée boudeuse. L'oeil exercé reconnaitra une toute jeune Serena Grandi (cachée sous le pseudonyme Daria Norman) dans le rôle de l'amie d'Alba.
Ring n'est pas un mauvais film. Il a ses qualités. La première partie est sans aucun doute la meilleure, la plus prenante, la plus crédible aussi. Elle a tout pour séduire. La deuxième qui tente d'imiter Rocky est malheureusement bien faible, trop peu développée, jamais convaincante et sombre parfois involontairement dans le comique dû en grande partie à la faiblesse du budget. Rythmé par une partition musicale signée du trio Bixio-Frizzi-Tempera qu'on a connu bien plus inspiré Ring malgré ses nombreux défauts mérite tout de même un petit coup d'oeil.