Amarsi male
Autres titres: Brucia amore brucia / La Traviata 70
Réal: Fernando Di Leo
Année: 1969
Origine: Italie
Genre: Drame
Durée: 92mn
Acteurs: Nieves Navarro, Gianni Macchia, Micaela Pignatelli, Lucio Dalla, Lea Lander, Sergio Ammirata, Ugo Adinolfi, María Luisa Sala, Ettore Geri, Sasa Magri, Gary Merrill, Lella Cattaneo, Fernando Di Leo, Andrea Esterhazy, Filippo Perego...
Résumé: Anna est l'assistante d'un riche industriel et accessoirement sa maitresse. Lorsqu'elle fait plus ample connaissance avec Carlo, son fils, un étudiant contestataire fiancé à Elena, elle tombe rapidement sous son charme. Ils entament une relation amoureuse qui va mener Anna à sa perte lorsque le frère de Carlo réapparait pour se mettre en travers de sa route...
Fort du succès rencontré en Italie de Brucia ragazzo, brucia malgré ses incessants démêlés avec la censure Fernando Di Leo décida de très vite mettre en scène un nouveau film. C'est ainsi que quelques mois seulement après sa sortie alors que la pellicule, une des plus vendues alors à l'étranger, est toujours projetée en salles (et accessoirement sous les feux de Dame censure) le metteur en scène annonce qu'il est sur le point d'en réaliser une suite qui s'intitulera Amarsi male dans laquelle il souhaite approfondir certaines thématiques de Brucia... . Son jeune acteur fétiche Gianni Macchia campera de nouveau le
principal protagoniste masculin tandis que Lucia Bose devrait être sa partenaire. L'actrice ayant décliné la proposition tout comme Anna Maria Pierangeli c'est à Nieves Navarro que Di Leo avait connu sur le tournage de quelques westerns dont il avait écrit le scénario qu'échouera le rôle de sa partenaire. Le couple phare étant formé les premières prises purent commencer. Amarsi male prenait vie mais cette fois le succès ne fut malheureusement pas au rendez-vous.
Anna est l'assistante d'un riche industriel, l'ingeniere Tessari, dont elle fut aussi la maitresse. C'est une femme forte, bien en place dans la société, riche de par ses activités
professionnelles. L'industriel a un fils, Carlo, un jeune étudiant contestataire, un gauchiste affirmé qui refuse cette société capitaliste. Il est aussi à la tête d'un mouvement politique qui régulièrement se réunit. Carlo est fiancé à Elena que son père et son frère aimerait qu'il épouse. Un soir Carlo est blessé lors d'une manifestation. Anna l'invite chez elle et le soigne. Elle est attirée par le jeune garçon dont elle finit par tomber amoureuse. Carlo délaisse Elena qui finit par découvrir la vérité. Résignée, elle ne tente pas de le reconquérir même si elle ne comprend pas cet amour. Cette relation amoureuse va lentement détruire Anna. Malgré leurs divergences d'opinion elle quitte son travail et ses acquis par amour pour
lui. L'arrivée du frère de Carlo va précipiter sa chute. Ce dernier, l'antithèse de son frère, va tout mettre en oeuvre pour que Carlo soit à son image quitte à manipuler son entourage et faire chanter Anna. Il parvient à persuader Carlo de retourner vers Elena et de l'épouser. Il le pousse à trahir ses idéaux en échange d'un bon travail et d'une position sociale et économique avantageuse. Anna tombe dans la prostitution de luxe et découvre la drogue. Acculée, elle se voit contrainte d'abandonner Carlo. Elle a tout perdu. Il a tout gagné.
Oeuvre érotique fortement efficace d'une extrême sensualité Brucia ragazzo brucia fut le tout premier film italien à traiter ouvertement, sans tabou, de l'orgasme féminin, de la
recherche du plaisir chez la femme, une idée alors jugée hérétique car impensable. Vue comme une simple procréatrice soumise aux désirs de l'homme elle ne pouvait jouir sauf si elle simulait. Brucia ragazzo brucia se voulait également une critique féroce de la bourgeoisie, de ses travers, son hypocrisie. Même si le film manque par moment de psychologie il n'en demeure pas moins une jolie réussite, une oeuvre belle par moment touchante. Ce n'est malheureusement pas le cas de Amarsi male à qui il manque simplement une âme et surtout une véritable atmosphère. Difficile de s'attacher à cette histoire, à ses personnages qui manque de profondeur. C'est donc détaché qu'on suit cette
intrigue peu passionnante qui reprend un peu celle de La Traviata mais en version moderne. Le film fut d'ailleurs vendu à l'étranger sous le titre La Traviata 70. Amarsi male n'est plus ni moins qu'une énième critique sociale de la bourgeoisie décadente de l'époque mais vue sans grande originalité. Di Leo reste bien trop superficiel, peut-être encore sous le coup de ce qui lui fut reproché lors de la sortie de Brucia ragazzo brucia, si superficiel que le film semble bien fade même au niveau de l'érotisme. Cette fois Di Leo reste bien prude malgré les tentatives de scènes saphiques et de sexe hétérosexuel se limitent à quelques bisous échangés entre Anna et Nadine une call-girl mondaine (incarnée par Lea Lander) et
quelques scènes de lit très chastes avec Carlo. Au final Amarsi male tourne dans le vide.
Ce qui sauve le film, du moins au regard d'un certain public, c'est son coté éminemment estampillé années 70. On se régalera de ses décors psychédéliques, multicolores, plasmiques, des tenues vestimentaires, son aura de contestation. On appréciera les très belles musiques de Silvano Spadaccino et l'amertume de quelques séquences qui ça et là font mouche. On se réjouira de retrouver le ténébreux Gianni Macchia, le poulain du réalisateur et sex-symbol d'alors, qui malheureusement est bien moins provoquant ici que dans Brucia... malgré ses yeux soulignés au eye-liner (ah les années 60!). Nieves Navarro
est au summum de sa beauté mais aussi délicate soit-elle Nieves ne parvient pas vraiment à donner vie à son personnage. Micaela Pignatelli, actrice d'origine noble, lointaine descendante du Pape Innocent XII, faisait ses grands débuts à l'écran. On décernera une palme d'honneur à l'excellent Lucio Dalla dans son rôle de jeune hippy lunaire qui offre au film ses meilleurs moments de par sa verve et son humour souvent féroce, le coté désillusionné de son personnage qui via des dialogues particulièrement acerbes synthétisent l'espace de quelques scènes toute la déliquescence que le film tente désespérément de transmettre. Voilà ce qu'on aurait tant aimé vivre 90 minutes durant.
Toujours produit par Tiziano Longo pour la Ferti, la maison de production qu'il monta avec Di Leo, Amarsi male n'a pas le coté mordant de son prédécesseur, son coté incisif encore moins novateur. La platitude de la mise en scène, le manque d'originalité, d'érotisme et de profondeur font de ce mélodrame anti bourgeois un semi-échec, une déception qui trouvera néanmoins grâce auprès des amoureux de la fin des années 60 et du début des années 70 pour la nostalgie de cette époque et sa distribution. Amarsi male reste divertissant, plutôt
sympathique, il a un charme certain mais cela ne suffit pas pour lui faire dépasser le stade de simple transposition édulcorée de Brucia ragazzo, brucia. Dommage.
Lors de sa sortie en Italie le film fut un cuisant échec, un véritable fiasco pour Fernando Di Leo qui le vit très vite retirer de l'affiche. Les producteurs lui donnèrent alors une seconde chance en tentant de surfer sur le succès de Brucia ragazzo, brucia et le ressortir sous le titre Brucia amore brucia. En vain!