Mademoiselle De Sade e i suoi vizi
Autres titres: Juliette De Sade
Réal: Lorenzo Sabatini
Année: 1969
Origine: Italie
Genre: Erotique
Durée: 75mn
Acteurs: Maria Pia Conte, Léa Nanni, Christine Delit, Angela De Leo, John Karlsen, Barbara Pilavin, Loren Ewing, Luigi Fizzi, Linda Towne, Alain Petit, Jean Valmont, Lars Bloch...
Résumé: Après s'être fait renvoyer du couvent la jeune et insatiable Juliette part pour Rome. Il y fait la connaissance d'un vieux marquis disciple de Sade qui va l'initier à la débauche afin qu'elle puisse satisfaire ses pulsions sexuelles...
Derrière l'énigmatique pseudonyme anglophone Warren Kiefer se cache un tout aussi étrange Lorenzo Sabatini, coauteur du Château des morts-vivants / Il castello dei morti viventi de Luciano Ricci, et metteur en scène d'un polar totalement oublié aujourd'hui Scacco alla mafia, une petite pellicule qui frise l'amateurisme malgré quelques idées qui ça et là émergent d'un océan d'ennui. Ce même Kiefer est également responsable d'un film érotique psychédélique inspiré de Sade judicieusement intitulé Mademoiselle de Sade e i suoi vizi, également connu sous le titre Juliette de Sade. Difficile de savoir exactement
quand le film fut tourné, avant ou après Scacco alla mafia qui lui date de 1970. Juliette De Sade aurait obtenu son visa de censure en Italie en 1972, année de sa sortie chez nos amis transalpins, mais il aurait été distribué aux USA en 1969. Deux éléments peuvent cependant nous permettre de plus ou moins dater sa réalisation. Tout d'abord son visionnage. Il est quasi évident que le film fut tourné à la fin des années 60 et non dans les années 70. Il serait donc antérieur à Scacco alla mafia. Le look, le style, la musique, tout reflète ici la fin des sixties. On peut également se fier au retitrage lui même. Le titre original est Juliette De Sade. C'est sous cette appellation qu'il sortit en 1969 en Amérique. Il fut rebaptisé
Mademoiselle De Sade e i suoi vizi pour sa distribution en Italie en 1972. Reste à savoir si la version distribuée aux USA fut la même que la version italienne après son passage à la censure. Ceci pourrait expliquer l'étonnante sagesse de cette rarissime bobine d'un autre temps quasiment perdue, pratiquement impossible à visionner.
Si une pellicule inspirée de Sade est toujours pour l'amateur d'érotisme pointu un gage de qualité, du point de vue du contenu bien sûr, un bon moment de perversion destiné à nourrir ses bas instincts la vision très contemporaine qu'en donne Kiefer/Sabatini risque de fortement le décevoir et faire se retourner dan8s sa tombe le Divin Marquis. L'histoire elle
même est ridicule et tient en trois lignes. Juliette est une jeune fille insatiable qui accumule les amants. Elle est envoyée au couvent mais frustrée elle se donne du plaisir seule. Surprise par la Mère Supérieure qui l'épiait par le trou de la serrure (!) elle est renvoyée. Juliette est envoyée chez une jeune bourgeoise qui couche avec. Puis elle part pour Rome. Dés son arrivée elle accumule les aventures. Une de ses amies lui fait rencontrer un vieux et riche marquis, disciple de Sade, qui va l'entretenir et l'initier aux plaisirs du vice. Elle a pour rivale Toni qu'elle laisse un jour pour morte sur la plage. Prise de remords Juliette s'effondre et décide de tout arrêter. Lorsqu'elle apprend qu'elle ne s'est pas noyée Juliette s'envole
pour l'Afrique où elle reprendra sa vie de débauche.
Si le titre semble alléchant (littéralement Mademoiselle de Sade et ses vices) le film est loin d'en être le reflet. C'est vainement qu'on cherche les vices promis comme on cherche en vain l'univers sadien. Sabatini nous a plutôt concocté un anémique roman-photo pour adultes (et encore) situé dans la Rome de cette fin d'années 60 dans laquelle Juliette papillonne, danse, virevolte, fait du shopping au son d'une musique allègre. Tout est si naïf, si gentillet malgré ce zeste de zeste d'érotisme qui se voudrait sulfureux mais est si inoffensif, si démodé, qu'il ne choquerait pas même un régiment de bonnes soeurs
conservatrices. On se croirait par instant dans une de ses vieilles bandes érotiques de Brazzi et ce n'est pas forcément ici un compliment ni une référence. Lorsque Juliette rencontre le vieux marquis on pourrait penser que le film débute enfin. Que nenni. Le vieux noble lui apprend bien à satisfaire ses vices (après lui avoir payé une belle voiture de sport et un appartement) mais tout se résume à une séance de body painting, des caresses et une danse érotique sur une statue face à un groupe de jeunes entrain de boire et de déguster des fruits, la visite d'un club psychédélique, quelques ébats sur la moquette... . Et ce n'est pas sur la nudité qu'on pourra cette fois se rattraper. L'ensemble est si innocent, si
sage, si pudique. Il n'y a quasiment aucune scène de nu intégral (sauf une masculine/féminine sur la plage et quelques nus dorsaux très rapides). Il faudra se contenter d'une poignée de scènes topless non pas de Juliette (un comble tout de même) mais de son amie Toni. Il ne se passe rien. Sabatini fait gentiment rimer anémie avec monotonie. Certains pourraient même dire qu'on peut faire rimer nul avec ridicule tant cette Juliette, adepte sadienne, est fade et sans intérêt. Elle ne doit pas avoir la même définition des mots vice et perversion que nous... encore moins son vieillard de pygmalion.
Que reste t-il donc au crédit de cette bluette pseudo-sexuelle? Quelques scènes qui font
illusion telles que celle où Toni caresse sensuellement une statue grecque tout en se frottant à elle lascivement en évitant soigneusement son sexe (très certainement LA scène du film), celle où Juliette fait l'amour sous l'oeil féroce d'une statue grecque (Sabatini devait avoir un faible pour les statues), celle du club psychédélique, quelque peu surréaliste, filmée en jaune d'or et le final surprenant où Juliette prise de remord plonge dans une sorte de délire cauchemardesque surréaliste qui rappelle un peu Polselli. Il n'y a pas de quoi fouetter un chat mais tout cela sauve au moins le film du néant.
La distribution est assez hétéroclite composée d'actrices confirmées mais aussi de noms
génériques à jamais associés au Bis (au Z pourrait-on dire). L'ex-modèle Maria Pia Conte, déjà très active à l'écran à cette époque, est une Juliette qui ne se déshabille presque jamais. Léa Nanni se dévêt pour elle puisque c'est elle à qui revient cette tâche. Autour d'elles quelques starlettes 60s qui disparurent dés la décennie suivante: Linda Towne, Christine Dhelit, Angela Di Leo. John Karlsen, éternel générique, joue le vieux marquis. Lars Bloch fait une apparition tout comme le gigantesque Loren Ewing (La vénus en fourrure) ou encore les très Z Alain Petit et Jean Valmont.
Mademoiselle De Sade e i suoi vizi est une petite pellicule érotique à l'érotisme quasi inexistant (un comble) qui semble surgit d'une autre époque et qui n'a de sadien que le titre tant on cherche les vices et déviances promises. C'est surtout une nacre pour collectionneurs tant le film est aujourd'hui devenu rarissime, uniquement visible via une antique copie délavée qui circule ça et là. Ces mêmes collectionneurs, chercheurs de trésors perdus, tenteront de se la procurer avec la même verve que celui qui est en quête d'un joli trèfle à quatre feuilles.
Etrangement c'est sa bande originale qui est aujourd'hui devenue plus célèbre que le film. Orchestrée par Bill Conti son thème principal fut jadis édité en 45t avec succès. L'album est quant à lui toujours facilement trouvable.