Dirai: ho ucciso per legittima difesa
Autres titres: La prima entrega / La prima entrega de una mujer casada
Real: Angelino Fons
Année: 1971
Origine: Espagne / Italie
Genre: Thriller
Durée: 102mn
Acteurs: Glen Lee, Franco Citti, Bruno Corazzari, Lola Sordo, Pilar Bardem, Rosa de Alba, Fernando Guillén, Gemma Cuervo...
Résumé: Deux voyous, Johnny et Michel, ont pour plan de dérober les bijoux d'une riche épouse restée seule dans sa grande demeure après que son mari soit parti en voyage d'affaires. Michel se présente comme étant le nouveau jardinier et séduit la femme afin d'entrer dans ses grâces. Un soir en téléphonant à son mari elle découvre avec horreur qu'en fait il n'est pas en voyage d'affaires mais qu'il passe du bon temps avec sa maitresse. Effondrée elle se laisse lentement réconforter par Michel qui semble touché par sa détresse. Jaloux, obnubilé par les bijoux Johnny ne l'entend pas de cette oreille. Il s'introduit dans la villa, profite de l'absence de Michel pour violenter la pauvre épouse. Il lui révèle également qui est réellement Michel. C'est pour la jeune femme le début d'une terrible descente aux enfers...
Fort du succès des gialli en Italie en ce début d'années 70 l'Espagne allait à son tour se laisser aller à cette nouvelle tendance cinématographique en réalisant une multitude de thrillers copiés sur le modèle italien. Parmi eux Dirai: ho ucciso per legittima difesa du peu connu Angelino Fons qu'on peut aisément classer dans la catégorie du film à complot machiavélique dont Umberto Lenzi s'était alors fait le spécialiste.
Johnny et Michel sont deux jeunes voyous de petite envergure qui vivent de menus larcins. Ils ont pour plan de dérober les bijoux d'une jeune femme, Anna, dont le mari, Bruno, s'apprête à
partir en voyage d'affaires à Rome. Anna sera seule dans son immense villa quelque part à la périphérie de Madrid. Michel, le plus séduisant des deux délinquants, se présente à elle comme étant le nouveau jardinier afin de s'infiltrer dans la demeure. Il rentre doucement dans ses grâces lorsqu'un soir Anna téléphone à son époux et découvre qu'en fait il n'est pas en voyage d'affaires mais passe du bon temps avec Mandy sa maitresse. Elle fond en larmes et se met à haïr cet homme qu'il l'a trahi. Alors que Michel éprouve une certaine pitié pour cette femme trompée Johnny, le plus psychotiques deux deux, lui rappelle ce pourquoi ils sont là. Si jamais Michel tentait de le doubler il n'hésiterait pas à le tuer. Michel console
Anna et l'emmène danser. De retour à la villa ils couchent ensemble. Johnny profite que son complice ait quitté la chambre pour se glisser dans le lit et violer Anna. Il lui révèle aussi le lien qui unit Michel et Bruno. En fait Michel a été envoyé chez elle par son propre mari afin qu'il puisse la surprendre en plein adultère. Il pourrait ainsi demander le divorce et hériter de tous ses biens patrimoniaux. Anna réussit à tuer son agresseur. Hagarde elle se rend au salon, y voit Michel avec ses bijoux. Elle l'assassine à son tour. De retour de Rome Bruno découvre le carnage. Choquée, dans un état second elle lui raconte ce qui s'est passée sans omettre de dire qu'elle sait qu'il est derrière cet affreux complot. Bruno, déconfit, lui ordonne de plaider la
légitime défense en accord avec les lois italiennes afin de se couvrir. Anna répète mécaniquement les aveux que lui dicte son mari mais se met soudain à répéter ad fine qu'elle doit le dénoncer. La malheureuse semble avoir sombré dans la folie.
L'ouverture, soit les dix premières minutes, laissait espérer un excellent petit thriller, violent, glacial. Johnny, un délinquant de la petite bourgeoisie madrilène, psychotique, brutal, kidnappe un enfant pour dépouiller ses parents de leurs bijoux puis s'enfuit dans les bois pour rejoindre son complice qui batifole avec une gourgandine. Johnny menace de la violer mais finalement les deux voyous l'abandonnent dans la nature pour mieux s'intéresser à la
riche Anna. Dés cet instant le film de Fons faiblit et perd malheureusement une partie de son intérêt à l'image même de l'intrigue trop conventionnelle pour surprendre d'autant plus que le cinéaste ne sait guère entretenir le suspens. Il se contente de jeter son loup dans la bergerie, le complice espionnant de l'extérieur. Ne reste plus qu'à attendre et voir s'il préférera Anna à ses bijoux et comment Johnny réagira. Voilà qui est foret regrettable puisqu'il ne se passe plus grand chose jusqu'à la dernière partie de ce thriller un peu trop bavard et routinier. Certes on sent que Fons tente de créer une petite atmosphère vénéneuse par le biais de la relation entre le voyou séducteur et Anna d'une part, entre lui et Johnny
d'autre part mais n'y arrive pas vraiment. Sont plus intéressantes les quelques apparitions de Johnny, voyou névrotique et brutal dont les accès de colère sont épiques. On garde en mémoire outre l'ouverture la mise à mort du chat et l'affrontement des deux délinquants dans la maison d'Anna. Malheureusement là encore son comportement n'est pas très crédible ou semble trop artificiel faute de toute psychologie. On comprend mal par exemple l'obsession que cet anti bourgeois endurci développe pour Anna. Son personnage ne fonctionne pas et semble accessoire au détriment de celui de Michel. Voilà qui détruit un peu trop une intrigue elle non plus pas forcément très probable.
En fait ce qui sauve Dirai ho ucciso per legittima difesa c'est sa dernière partie, soit les dix dernières et excellentes minutes, et son final à partir de l'instant où Johnny s'introduit dans le lit de Anna. On bascule alors dans une dimension horrifique très agréable tout en assistant à la descente aux enfers de cette femme traumatisée par son agression et les abasourdissantes découvertes qu'elle a fait. Les ultimes scènes plus ou moins ouvertes nous laissent l'image d'une femme en état de choc, hagarde, à la merci de son mari mais qui dans les toutes dernières secondes a un regain de volonté, une conclusion qui donne son titre italien au film. Autre atout du film sa bande originale, ses scènes de night clubs, ses
jerks endiablées et leur musique psychédélique ainsi qu'un petit passage où Anna regarde un documentaire sur un festival rock à la Woodstock qui donne au film ce coté très années 70 toujours aussi délicieux.
L'interprétation sans être mauvaise n'a cependant guère d'éclat. Les acteurs font simplement ce qu'on leur demande ni plus ni moins. Franco Citti dans la peau de Johnny n'arrive pas à donner de vraie consistance à son rôle de méchant très méchant malgré son rictus et ses grimaces menaçantes. Bruno Corazzari est bien trop transparent dans la défroque du mari machiavélique. La vétérane Emma Perella, actrice de cinéma et de théâtre, n'a pas cette
classe des grandes actrices italiennes ou d'une Carroll Baker aussi irritante que soit cette dernière. Reste l'américain le séduisant Glenn Lee, acteur issu des biker movies, et son look de petite frappe blonde qu'on reverra l'année suivante dans l'ambigu La casa de las palombas aux cotés d'une toute jeune et perverse Ornella Muti et la grande Caterina Boratto. Voilà qui est trop peu pour illuminer une interprétation sans grand panache.
Petit giallo au scénario improbable coproduit avec l'Italie Dirai ho ucciso per legittima difesa est loin d'égaler ceux de Umberto Lenzi. Il se fond dans la production d'alors rien ne le différenciant vraiment de la masse de thrillers de ce type qui sortait alors. Reste un film
jamais désagréable, divertissant, sans réelle surprise du moins pour l'amateur, simplement anodin mais qui possède cependant un certain charme. Oublié des éditeurs, très difficilement visible aujourd'hui c 'est surtout sa rareté qui en fait une oeuvre assez recherchée des collectionneurs qui pour la visionner devront se rabattre sur un de ses éphémères passages télévisés sur les chaines italiennes ou sur la médiocrissime vidéo espagnole. A noter que la version italienne est fortement amputée puisque ramenée à 87 petites minutes environ contre 102 minutes approximativement pour la version intégrale espagnole.