Maniaco Deprebis

Avant toute chose il est intéressant de se pencher rapidement sur la genèse de ce film produit par Ovidio Assonitis. Riccardo Billi voulait depuis déjà quelques temps travailler avec Assonitis mais ce dernier n'avait encore jamais donné suite. Le hasard les réunit un soir chez le metteur en scène et époux de Malisa Longo Terence Young qui venait de terminer Le guerriere dal seno nudo. S'y trouvaient toutes les filles qui dans le film tenaient le rôle des Amazones. Ces filles choisies avec soin par Young parmi les plus belles de Sardaigne devaient maintenant quitter l'Italie pour rentrer sur leur île. Les voyant si tristes à l'idée de

retourner en Sardaigne Assonitis eut une brillante idée. Leur dire de rester pour tourner un autre film de ce type avec elles. Tout se fit en quelques jours. Corbucci accepta d'écrire le scénario et Brescia, déjà auteur l'année précédente de Les Amazones, filles pour l'amour et pour la guerre, accepta d'en être le réalisateur. Tout alla si vite que le film fut bouclé en moins de deux mois. Assonitis profita aussi du succès que remportait alors un autre genre de cinéma, les films d'arts martiaux lancés par Bruce Lee. Il eut l'idée de mêler les genres et fit pour ça venir de Hong-Kong un jeune comédien, Hua Yueh, ainsi qu'un acteur de couleur de

télévision, Mark Hannibal, pour accentuer le coté action de l'intrigue. Superuomini superdonne superbotte était né et contrairement au film de Young qui connut des difficultés à trouver un distributeur il sortit dans la foulée et rencontra un vif succès en Italie d'autant plus qu'il s'inscrivait dans le prolifique filon de la série de films 3 supermen débutée à la fin des années 60 même s'il ne respectait pas les codes des précédentes pellicules, déconcertant ainsi les fans.
Un village est entièrement soumis à la puissance des Amazones qui gouvernent le territoire. Les villageois font confiance au Grand Dharma, un être masqué soi-disant immortel, censé les protéger. Ils ignorent que le Grand Dharma est en fait une imposture. Mortellement blessé lors d'un combat il demande à Aru, son jeune assistant, de le remplacer dans ce rôle. Aru accepte. Pour l'aider dans sa mission il s'unit à deux autres hommes, Molosse, un

homme de couleur dont la force n'est plus à démontrer, et Chung, un spécialiste des arts martiaux. Pour les convaincre de se battre avec lui contre les Amazones il leur promet de leur révéler le secret du feu sacré, le feu qui rend immortel. Les trois super héros peuvent déclarer la guerre aux puissantes guerrières dont l'objectif est découvrir le secret de l'immortalité du Grand Dharma afin d'acquérir le pouvoir suprême. Aru est malheureusement fait prisonnier. Ses deux acolytes parviennent à le libérer. Aidés par Akela la reine des Amazones qui a choisi de trahir son peuple par amour pour Aru, ils mettent à sac le village des Amazones et réussissent à les combattre. Une fois vaincues les trois hommes peuvent

tranquillement rentrer à la grotte d'Aru qui leur fausse compagnie. Il s'enfuit avec Akela. Molosse et Chung, leurrés, n'auront jamais le pseudo secret d'immortalité.
Mélanger le film d'Amazones, le film d'arts martiaux et le film de super héros masqué sur fond de pure comédie était un gros risque. L'amalgame allait il prendre sans tomber dans le grotesque, la farce potache? La réponse est définitivement oui. Certes Superuomini superdonne superbotte est une véritable petite série Z mais intelligemment mise en scène par un Brescia visiblement enthousiaste qui connait son métier. La grande force de cette comédie martiale est qu'elle ne cesse de passer du sérieux au rire, Brescia alterne avec brio

des séquences de pure action parfois assez violentes voire gore, notamment la scène d'ouverture (l'élection de la commandante des Amazones), et de séquences cocasses, légères voire stupides propre à la comédie avec son lot de gags éculés et d'anachronismes, l'ensemble filmé à cent à l'heure avec force et vigueur. Autant dire que le spectateur n'a pas le temps de s'ennuyer une seule seconde. Combats, affrontements, poursuites et autres mésaventures s'enchainent sans temps mort sur fond d'incessants salto avant, salto arrière, double salto et autres hautes voltiges. Autant dire que tous les genres auxquels Supermen contre les Amazones fait référence sont respectés et trouvent leur place au sein du film,

toujours dans la joie et la bonne humeur, sans jamais tombés dans le ridicule ou l'enfantillage. Quant au final, excellent, il reste un des meilleurs moments du film avec son coté épique, ses enchainements d'effets pyrotechniques et ses quelques trouvailles fort drôles (les proto chars à feu).
Les comédiens s'en donnent à coeur joie et semblent tous autant qu'ils sont réellement s'amuser, un atout non négligeable qui accentue la bonne humeur de cette bande dominée par le cascadeur et figure générique Aldo Canti sous le masque et dans le slip de Aru qui ne cesse de tourbillonner, voltiger et sauter en tout sens. Assassiné au début des années 90 ce

fut pour le séduisant Aldo Canti un des seuls véritables rôles qui l'eut durant sa longue carrière de cascadeur et de générique, un rôle qu'il avait déjà tenu dans I tre supermen fantastici. A ses cotés outre Hua Yueh, récemment décédé, et le robuste Mark Hannibal (un sosie de Fred Williamson), tout aussi parfaits, on reconnaitra le comique Giacomo Rizzo et Riccardo Pizzauti, un récurrent du western spaghetti, respectivement Canicule et Froidure les deux traitres, Magda Konopka, masculine, enlaidie sous sa perruque à bouclettes, en intraitable commandante des Amazones, la starlette d'un jour Kirsten Gilles sans oublier Malisa Longo en reine des guerrières puisqu'il était impossible qu'elle ne fasse pas partie

du projet... et bien entendu toutes les filles déjà présentes dans Le guerriere dal seno nudo et Amazones filles pour l'amour et pour la guerre.
Supermen contre les Amazones est un hybride totalement réussi et maitrisé qui se laisse voir tant pour son coté divertissant et bon enfant que pour la présence des Amazones, hargneuses, vindicatives qui donne au film son très agréable coté péplum mais aussi les meilleurs moments de cette petite bande qui navigue sans cesse entre l'hilarité et le sérieux.