La France interdite
Autres titres:
Real: Jean-Pierre Garnier, Gilles Delannoy, Jean-Pierre Imbrohoris
Année: 1984
Origine: France
Genre Mondo
Durée: 90mn
Acteurs: Christian Barbier (narrateur)
Résumé: Les réalisateurs nous proposent un petit tour de France pour nous faire découvrir la face cachée de notre pays, ces univers fait de sexe, de violence et diverses perversions, de rites et coutumes aussi peu orthodoxes qu'insolites...
Alors que l'Italie et les USA inondaient depuis le milieu des années 60 les salles obscures de mondos, genre cinématographique parmi les plus controversés, tous plus croustillants les uns que les autres, ce n'est qu'assez tardivement que la France s'est à son tour amuser à nous livrer quelques pseudos-reportages ayant pour but de nous faire découvrir la face cachée de notre bel hexagone, un univers fait bien entendu de rites étranges et de perversions sexuelles de toutes sortes, ces déviances et cette vie secrète que personne tout
bon français n'aurait osé imaginer. Parmi les quelques fleurons du genre qui firent les beaux jours des vidéo clubs d'alors, il y eut notamment Et il voulut être une femme, Prostitution clandestine et cette France interdite qui nous promet une plongée extraordinaire dans un monde de perversions incroyables, la vision d'une facette de notre pays totalement insoupçonnée faite de sexe, de violence et de rites aussi insolites que secrets. La France interdite se range donc aux cotés des traditionnels sex mondo transalpins et américains, ces spectacles trash destinés à un public voyeur entièrement fabriqués par les metteurs en scène eux mêmes qui sous leur aspect documentaire ne sont en fait ni plus ni moins qu'une forme de pornographie déguisée. Souvent ridicules voire absurdes, outre le coté voyeur, c'est souvent l'hilarité qui l'emporte. La France interdite ne fait pas exception.
Un an de recherches pour obtenir des images authentiques, la vérité ne supporte ni excuse ni hypocrisie. Les gens que vous allez voir sont des gens comme vous qui vont au delà des limites nous annonce t-on. Le ton est donné dés le générique alors que défilent sous la voix off monotone du narrateur, le comédien Christian Barbier, des images d'une (fausse) prostituée qui tente bêtement de dissimuler son visage à la caméra car elle roule nue dans sa voiture, d'une femme qui se caresse les seins en masturbant la statue d'un saint dans un cimetière et quelques touristes en slip qui bronzent le long de la Seine. Si ce sont ces limites que les protagonistes du film, ces fameux gens lambda, vont tenter d'exploser on ne va guère voler très haut! La vision de cette France interdite va malheureusement confirmer cette constatation.
Après un petit tour dans la mode avant-gardiste parisienne avec un faux défilé de faux mannequins portant des robes conçues pour le film que même Lady Gaga refuserait de porter (cette hideuse robe-bouche dont les ornements tiennent par des fils invisibles trop... visibles, ces chiffons garnis de pointes en plastique que le plus médiocre des post-nuke italien aurait jeté à la poubelle), nous voilà projetés dans l'univers de la boxe thaï féminine, segment absolument inutile tout comme le collectionneur de vieilles voitures, les femmes qui pratiquent le body building sept jours sur sept, la visite d'une plage naturiste, les nuits folles de St Tropez et une femme qui fait du cheval nue à la campagne. Tout cela n'est il pas en effet extraordinaire et dépasse en entendement tout ce qu'on aurait pu imaginer en France?
Les parties suivantes pourront rappeler des émissions télévisées du style "Mystères", la grande arnaque des années 80 puisqu'on nous fait visiter une maison hantée (en fait une vieille masure délabrée), une grotte où sont censées se dérouler des messes noires, le pont du Diable en Arriège où aujourd'hui encore nous dit-on de véritables sabbats sont organisés. Nous aurions aimé en voir plus mais le budget n'a peut être pas permis aux auteurs de filmer les faits évoqués pour notre plus grande frustration... à moins qu'il n'y ait aucun fait à voir! Affirmer c'est bien, montrer c'est encore mieux. On aura juste droit aux prémices d'un sacrifice diabolique dont le but est de rendre fertile une femme. On se frotte les mains à l'idée de voir enfin un peu de sensationnel. C'est alors que Christian Barbier de sa voix toujours aussi monotone, à croire que le malheureux s'endort face aux images qu'il doit commenter, nous informe que les caméras n'ont pas eu le droit de filmer la cérémonie! Du rite nous n'aurons vu qu'une femme nue maculée de sang d'oiseau allongée sur un autel prés duquel s'affaire un homme cagoulé!
C'est très certainement l'aspect sexuel qui intéresse le plus l'amateur de ce type de produit. La France interdite a t-elle de quoi satisfaire sa soif de perversions et satisfaire ses vices les plus pernicieux? La réponse est non. On a ici droit à la traditionnelle petite promenade nocturne au Bois de Boulogne où on fait connaissance avec deux prostituées dont l'inévitable travesti. Rien d'extraordinaire si ce n'est la supercherie puisque les deux filles de joie pour leur séance de tapin ne sont plus au Bois mais adossées à deux pauvres arbres chétifs supposés représenter Boulogne la nuit, le but du segment étant surtout de nous montrer le travesti entrain de ranger son pénis dans sa mini culotte en nous expliquant qu'il doit le
rentrer dans ses fesses pour créer l'illusion, images à l'appui. On assiste ensuite à une interminable fête lesbienne dans un triste appartement dans lequel est rassemblé un groupe de femmes androgynes qui s'embrassent, se fouettent mollement et s'empoignent paresseusement tout en dansant avant un petit tour dans un peep show de Pigalles. Nous voilà ensuite au coeur d'un casting où sont sélectionnées les futures stars du porno qui regroupe la timide, l'audacieuse, la bourgeoise, la fille de couleur qui toutes doivent faire leurs preuves devant l'objectif sous les directives d'un metteur en scène compréhensif mais profiteur. On quitte Paris pour un donjon en Province où les week-end sont organisées des séances de sadomasochisme, une occasion pour nous rincer l'oeil devant quelques
godages, quelques coups de fouets et de martinet bon enfant pour terminer sur le piercing d'une vulve et d'un téton. Rien de très méchant donc, pas de quoi donner de coupables frissons!
Nous conclurons par la partie gay de cette France interdite soit une descente dans un club SM où de jolis moustachus tout en cuir noir qui, nous apprend Christian Barbier, se laissent eux aussi filmer pour la première fois dressent un jeune soumis qui ne demande que ça. Crachats, menottes, fessées, cage.. tout l'attirail du parfait petit sadomasochiste dominant est là pour un bon moment d'hilarité tant tout sonne faux. On reste dans le soft bien entendu, c'est à peine si on aperçoit un sexe mais les dialogues stéréotypés, la mollesse de la
séance et le manque de conviction des protagonistes font tout l'intérêt de la séquence. On mentionnera aussi un petit passage par les saunas gay où discrétion et efficacité sont les maitres mots des hommes qui souhaitent rencontrer des hommes pour un bon moment de plaisir... qui sera également le nôtre puisque c'est une des rares scènes du film où on pourra voir quelques pénis... à travers les vapeurs!
Il est clair qu'il n'y a rien de très interdit dans cette France encore moins de limites exposées. Si le vice et la perversion se résument à monter à cheval nu, pratiquer le naturisme, faire la fête à St-Tropez ou voir des femmes soulever des haltères, notre beau pays comme tant
d'autres comptent quelques millions de pervers. Quant au contenu sexuel, il est si inoffensif et maladroitement fabriqué pour l'occasion qu'il donne plus envie de se coucher que de se toucher. A une lettre près, c'est fort dommage!
Ce qui est surtout étonnant et dépasse ici les limites de l'entendement c'est qu'il aura fallu trois réalisateurs pour mettre en scène ce sex mondo à la française, Gilles Delannoy à qui on doit aussi Carré blanc, Jean-Pierre Garnier et Jean-Pierre Imbrohoris, le scénariste de Joy et Joan.
Pure escroquerie franchement ennuyante mais joli moment d'hilarité pour l'inconditionnel un tantinet persévérant La France interdite pourra cependant se rattraper auprès des amateurs de musique disco synthétique façon Giorgio Moroder grâce à sa bande son fort dansante dans la grande tradition de l'électro-dance 100% années 80.