El espanto surge de la tumba
Autres titres: Horror rises from the tomb / Mark of the devil 4 / Blutmesse der zombies
Real: Carlos Aured
Année: 1973
Origine: Espagne
Genre: Horreur
Durée: 89mn
Acteurs: Paul Naschy, Emma Cohen, Helga Liné, Christiana Suriani, Betsabé Ruiz, Victor Alcazar, Julio Pena, Luis Ciges, Juan Cazalilla, Maria José Cantudo, Francisco Llinas, Ramon Centenero, Elsa Zabala, Francisco Nieto, Montserrat Julio...
Résumé: Alaric de Marnac et sa compagne Mabille de Lancré sont condamnés pour sorcellerie par l’inquisition. Elle sera pendue tandis que Alaric après avoir juré de revenir se venger, sera décapité. Sa tête et son corps seront ensuite enterrés séparément afin qu’il ne puisse jamais plus user de ses pouvoirs démoniaques et maudire sa descendance. Bien des siècles plus tard, Hugo de Marnac, le descendant d’Alaric, entreprend avec l’aide de sa femme et de son ami Maurice, descendant de l’inquisiteur, de retrouver le corps et la tête de son aïeul dans la propriété ancestrale. S'ils retrouvent bel et bien les deux morceaux de Alaric, celui va vite se reconstruire, ramener sa compagne à la vie et mettre sa vengeance à l'oeuvre...
L'acteur, scénariste, metteur en scène Paul Naschy, alias Jacinto Molina, fut dés le début des années 70 un des principaux pivots du cinéma d'horreur ibérique, une sorte de petit génie qui s'il signa bien des déceptions fut aussi à l'origine d'excellentes surprises. Plus que tout Naschy aimait créer des personnages à qui il donnait vie. Son plus célèbre restera le loup-garou Waldemar Daninsky qu'il mit en scène dans onze films entre 1968 et 2004. Alaric
de Marnac qu'on retrouvera dans deux films en fait également partie. Avant toute chose il est bon de revenir sur la naissance de cette petite bande horrifique franchement réjouissante. Ecrit en seulement deux jours par Naschy lui même, le script du film échoit entre les mains du producteur de La révolte des morts vivants de Amando De Ossorio, Perez Giner, qui souhaite alors monter une nouvelle maison de production. Sans film à produire, le malheureux se retrouve dos au mur. C'est ainsi qu'il se tourna vers Naschy qui lui écrivit ce scénario. Le moindre qu'on puisse dire est que le célèbre acteur y a mis toute son
imagination. Il y mélange en effet avec un évident plaisir différents grands mythes du cinéma fantastique dont entre autres le vampirisme, les morts vivants, les malédictions ancestrales, la sorcellerie, l'inquisition... le tout sur fond de cinéma gothique, tous les éléments y étant quasiment présents. On y retrouve en effet avec une joie non dissimulée cryptes maléfiques, séances de spiritisme, nuits d'orage, cimetière lugubre, tableaux qui saignent, belles en détresse, victimes ou non, errant en nuisettes transparentes, villageois superstitieux aux moeurs aussi cruelles que primaires, le tout sur fond de décors hivernaux. De quoi satisfaire tous les amateurs du genre d'autant plus que Carlos Aured, le metteur en scène, très inspiré apparemment, semble en connaitre toutes les ficelles.
Outre ses inspirations gothiques et ce savant mélange des thèmes, un des aspects fascinants de El espanto surge de la tumba est son principal personnage Alaric de Marnac. Il puise ses origines quelque part en France au quinzième siècle. Accusé de satanisme, condamné à être décapité pour avoir bu du sang de vierge et mangé de la chair humaine au cours de messes noires, Alaric et sa compagne, Mabille De Lancré, sont exécutés par les membres de l'inquisition dont fait partie son frère après avoir juré qu'il reviendra se venger et bien pris soin de maudire ses descendants. Pour éviter qu'il ne revienne, sa tête et son corps
sont donc enterrés séparément. L'originalité provient donc du fait que Alaric doit retrouver sa tête puis la rattacher à son corps afin de pouvoir revenir dans le monde des vivants. Il lèvera alors une armée de zombies qu'il dirigera depuis la crypte où se trouve la tombe contenant son corps. Intéressants également sont ses moyens de survie qui empruntent tant au vampire qu'au zombi, il boit le sang de ses victimes qu'il mord au cou et dévore leur coeur. Quant à la façon de le détruire, seul un talisman, le marteau de Thor, peut en venir à bout tandis qu'une épingle en argent doit transpercer la poitrine de sa compagne. Peut être est ce là un malicieux clin d'oeil à la lycanthropie dont Naschy fut si friand, une référence à sa longue série de films de loups-garous.
On l'aura compris, El espanto surge de la tumba est un beau salmingondis qui mange à tous les râteliers d'où parfois un léger sentiment d'oeuvre brouillonne mais l'ensemble est si bien mené, si ludique qu'on en oublie très vite ses incohérences, son aspect patchwork pour n'en retenir que son coté excessif O combien plaisant et malgré tout sensé. Aussi composite soit il le film de Aured n'en est jamais pour autant idiot, les ingrédients se mélangent entre eux et la mayonnaise prend. On se pose bien des questions mais on se moque bien d'y trouver ou non une réponse tant on se divertit et se prend au jeu. C'est d'autant plus facile que El espanto surge de la tumba bénéficie d'une magnifique photographie qui met particulièrement bien en valeur les décors hivernaux de ce village perdu, de la crypte
ancestrale et les couleurs chatoyantes de l'ensemble, véritable festival multicolore, ainsi que de solides effets spéciaux qui devraient ravir à coup sûr les amateurs d'effets gore. Aured s'en donne en effet à coeur joie et nous offre entre autres quelques belles décapitations, une poitrine ouverte, des coeurs arrachés à pleines mains sans oublier cette tête détachée de son tronc. Le tout est arrosé d'une gentille dose d'érotisme, quelques plans de nus frontaux féminins et de nus dorsaux masculins, afin d'émoustiller les sens du spectateur. Signalons que le film fut tourné en deux versions comme la coutume l'exigeait alors. L'une intégrale était destinée à l'exportation, la deuxième expurgée de ses séquences de nudité et des détails sanglants pour sa distribution sur le territoire espagnol. On devine bien entendu l'évident
manque de budget mais les effets spéciaux, aussi artisanaux soient ils, sont si bien agencés et si joliment travaillés qu'ils parviennent à bluffer même si parfois Aured en dévoile malencontreusement la technique. Les créatures sont quant à elles toutes aussi délectables les unes que les autres notamment les morts-vivants.
Accompagné d'une bande musicale composée de nappes d'orgue peut être un brin répétitive mais tout à fait en adéquation avec le film, El espanto surge de la tumba bénéficie en outre d'une interprétation convaincante de la part d'une jolie brochette de comédiens, Paul Naschy en tête qui s'octroie pour l'occasion pas moins de trois rôles, celui de Alaric, de son
descendant, Hugo, et d'Armand de Marnac. A ses cotés on reconnaitra Helga Liné dans la peau de sa compagne maudite ainsi que Emma Cohen, une figure récurrente du cinéma espagnol qu'on put voir dans Cannibal man, La cruz del diablo, La femme aux bottes rouges, El techo de cristal, Le miroir obscène..., Betsabé Ruiz (La fille de l'exorciste) et Christina Suriani. El espanto surge de la tumba est un très attachant film d'horreur à consonances gothiques qui jongle merveilleusement bien avec toutes les influences dont il tire ce scénario abracadabrant mais si agréable, certainement un des meilleurs de Naschy à qui on pardonnera de bon coeur ses quelques erreurs. Aured n'avait il pas raison de confesser que ce film était sans doute son meilleur? Laissons la réponse au spectateur.
Paul Naschy endossera à nouveau la cape de Alaric de Marnac en 1983 pour Latidos de panico qu'il mettra cette fois lui même en scène.