La casa dalle finestre che ridono
Autres titres: La maison aux fenêtres qui rient / La porte de l'enfer / The house with the laughing windows / House with the windows that laughed
Real: Pupi Avati
Année: 1975
Origine: Italie
Genre: Giallo
Durée: 106mn
Acteurs: Lino Capolicchio, Francesca Marciano, Gianni Cavina, Giulio Pizzirani, Bob Tonelli, Pietro Brambilla, Vanna Busoni, Ferdinando Orlandi, Andrea Matteuzzi, Pina Borione, Flavia Giorgi, Arrigo Lucchini, Tonino Corazzari, Eugene Walter...
Résumé: Stefano, un artiste peintre, doit restaurer une fresque représentant le martyr de Saint Sébastien dans un petit village de Romagne. La fresque fut jadis peinte par un artiste fou qui s'est suicidé. Dés son arrivée, Stefano est confronté à d'étranges événements. Le prêtre du village tente de le détourner de son travail, une voix anonyme l'appelle régulièrement au téléphone alors qu'il se voit obligé d'habiter une demeure aussi sordide qu'inquiétante habitée par une vieille femme à l'agonie. Stefano va dés lors être confronté à de bien mystérieux faits et au sadisme jusqu'à l'incroyable découverte de la vérité, la révélation de l'innommable qui va enfin prendre figure humaine...
Giallo atmosphérique et vénéneux réalisé en 1975 par Pupi Avati, La casa dalle finestre che ridono fait quelque peu partie des outsiders dans le paysage du giallo italien. Devenu au fil du temps un film culte auprès d'un certain public, La maison aux fenêtres qui rient, titre qui jadis en a fait rêver plus d'un, est en effet un des gialli horrifiques les plus extraordinaires que l'Italie ait alors commis, un film qu'on pourrait aisément qualifier d'unique tant il se révèle original.
Se déroulant en Romagne, La maison aux fenêtres qui rient, dénomination qui provient des fenêtres autour desquelles sont peintes des bouches au large sourire, fait appel à ces fables, ces histoires populaires qu'on aime raconter le soir aux enfants au coin de l'âtre, ces contes aussi étranges qu'effrayants qui les terrorisent avant qu'ils aillent se coucher. Pupi Avati,grand spécialiste des ambiances étranges et pesantes, maître du bizarre, est parvenu à recréer cette atmosphère de terreur et d'angoisse propre à ces histoires qui font ressurgir
du plus profond de nos âmes nos peurs les plus enfouies. Si on pense parfois à Mario Bava à la vision du film, Avati a réussi à transplanter ces peurs au coeur d'un paysage typiquement italien et ensoleillé qui tranche fortement avec le coté sinistre et la noirceur du récit. Cette luminosité, la splendeur des terres d'Emilie-Romagne contrastent avec le coté pervers et malsain de cette histoire des plus insolites, des actes commis, cette horreur, terrible, qui s'y dissimule, particulièrement bien tapie.
Ici l'horreur n'est jamais graphique, elle est la plupart du temps suggérée, présente sous forme de simples allusions. Elle est souvent ambigüe et de cette ambiguïté nait un climat sourd, oppressant. L'innommable est là, jamais visible mais on le sent, on le devine, toujours palpable mais il n'apparait pas.
L'horreur quant à elle fait son apparition que très brièvement au détour d'images elles aussi allusives mais cela suffit à créer un climat lourd, aidé par la lenteur de la mise en scène. Il ne se passe rien mais ce rien devient vite étouffant jusqu'à la révélation finale, source d'une incroyable perversion et d'une étonnante folie. L'innommable prend enfin forme sous les traits d'un visage totalement inattendu et surtout blasphématoire, contre-nature, délirant dans le sens le plus pathologique du terme, ces deux créatures ignominieuses dont une, à notre plus grande surprise, hermaphrodite qui n'ont plus d'humain que l'apparence.
Cette fin géniale particulièrement hérétique qui jadis fit frémir la censure lors de la sortie en salles du film, inspirée soi disant d'un fait réel, n'est qu'une variation de la folie de Ligabue, une parfaite visualisation de la mort et de son agonie si effroyablement contés dans ces récits sanglants qui forment les contes et légendes des campagnes. La maison aux fenêtres qui rient fait irrémédiablement partie de ces fables campagnardes qui vous donnent la chair de poule.
Avati a donné vie à un livre d'images qui rappelle les ouvrages remplis de sorcières et de démons qui autrefois faisaient frissonner dans les chaumières et continuent aujourd'hui encore d'alimenter notre imaginaire afin de nous terrifier jusqu'au plus profond de notre âme.
Si quelques esprits chagrins pourront reprocher au film sa lenteur qui peut être aura raison de certains, plus habitués à des flots d'hémoglobine dont le film est dépourvu malgré la violence de quelques meurtres, elle donne pourtant au film non seulement toute sa force macabre mais également sa force narrative. D'elle et de la suggestivité dont fait preuve Avati nait ce climat d'angoisse indicible, exceptionnel, inquiétant qui va crescendo jusqu'aux ultimes et inoubliables minutes à proprement vous glacer le sang.
La maison aux fenêtres qui rient est une oeuvre glaciale, sinistre, inattendue et originale, fascinante, religieusement effroyable. Cette hallucinante fresque portée par les musiques oppressantes de Amedeo Tommasi est très certainement le chef d'oeuvre de son réalisateur. Pupi Avati a su avec une rare intelligence et beaucoup de savoir-faire marier folie et perversion dans ce conte morbide qui n'est rien d'autre que la représentation de l'horreur cérébrale absolue à l'état pur! Cette fable maladive sur la souffrance, le martyr est sans nul doute une des pièces maîtresse de l'âge d'or du cinéma de genre italien.
On soulignera la perfection de l'interprétation d'une belle brochette d'acteurs, Lino Capolicchio, Francesca Marciano, Giulio Pizzirani en tête sans oublier Gianni Cavina, également co-auteur du scénario avec le propre frère de Avati.