A very natural thing
Autres titres: Une chose trés naturelle
Real: Christopher Larkin
Année: 1974
Origine: USA
Genre: Drame
Durée: 86mn
Acteurs: Robert McLane, Curt Gareth, Bo White, Anthony McKay, Marylin Meyers, Jay Pierce, Barnaby Rudge, A. Bailey Chapin, Scott Eisman, Robert Grillo, George Diaz...
Résumé: David, 26 ans, a quitté le monastère pour pouvoir vivre une sexualité à laquelle il avait voulu se soustraire. Devenu professeur, il rencontre un jour Mark, un business man de trois ans son cadet. Il tombe amoureux de lui et trés vite ils emménagent ensemble. Malheureusement si David croit au mariage et à la fidélité, Mark est un garçon libéré qui vit d'aventures. Aprés avoir tenté en vain de lui faire goûter aux plaisirs orgiaques, Mark ne supporte plus la vision traditionnaliste de David. Ils se séparent. David va essayer de se débaucher mais il en ressort dégoûté. Alors que les premières marches homosexuelles se déroulent, David rencontre Jason, un jeune photographe recemment divoircé qui a décidé de vivre pleinement son homosexualité avec l'homme de ses rêves...
Injustement oublié, A very natural thing fut pourtant en son temps un des premiers films américains qui traitait de façon positive l'homosexualité à travers l'histoire d'un couple qui tentait de vivre une histoire d'amour sans faille à une époque où on prônait l'amour libre.
David a 26 ans, il refusé une vie d'écclesiaste afin de pouvoir vivre cette sexualité à laquelle il voulait échapper. Il est aujourd'hui professeur d'anglais dans un lycée. Il rencontre un jour Mark, un jeune business man de 23 ans, dont il tombe amoureux. Trés vite ils emménagent ensemble mais Mark a une vision de la vie et de la sexualité radicalement différente de celle de David. David souhaite une relation stable, traditionnelle, il croit en l'amour et au mariage. Mark incarne cette nouvelle jeunesse libérée qui préconise l'amour libre. C'est alors l'affrontement entre les valeurs d'hier et ces nouveaux courants de pensées qui vont mener à l'incompréhension et l'inévitable séparation.
David est ancré sur ses positions, rêve d'un amour idyllique tandis que Mark vit au jour le jour, d'aventures en aventures au rythme des rencontres qu'il fait, voulant sans cesse plaire et être désiré. Il va tenter d'initier David à cette vie libérée en l'invitant à une orgie mais le résultat sera catastrophique. Ce sera la fin de leur relation. Aprés avoir expérimenté les lieux de drague dont les saunas, sans plaisir aucun, David rencontrera un jeune photographe qui participe à une des premières gay pride.
Si le film de Christopher Larkin date de 1974 la première chose qui frappera le spectateur est son étonnante actualité. S'il est estampillé années 70 avec ses écarts linguistiques, ses cohortes de bikers et jeunes chevelus vibrant au son post-Woodstock, les problèmes qu'il soulève n'ont pourtant pas changé. La génération actuelle s'y retrouvera totalement. L'histoire de David et Mark est toujours autant d'actualité. Elle reste le reflet d'un éternel conflit, celui qui oppose le coté conservateur et traditionnaliste aux moeurs beaucoup plus émancipées nées de la libération sexuelle des années 70 qui frappa notre société y compris le milieu gay. C'est la notion datée de fidélité et de mariage qui se heurte à l'union libre, sujet toujours trés à la mode non seulement dans le cinéma gay mais dans l'univers gay en général.
Toujours aussi étonnant est la façon dont l'homosexualité est présentée. Tous les protagonistes la vivent en effet ouvertement en acceptant avec fierté cette différence aprés en avoir surmonté les premières difficultés. Là encore on constatera que le discours n'a pas changé, il est resté identique.
Moderne également le film de Larkin l'est dans son approche de l'érotisme. Sans jamais franchir le cap de la pornographie, il reste sexuellement explicite lors des nombreuses scènes d'amour et de nudité, aussi troublantes qu'excitantes, sensuelles ou plus épicées, notamment lorsque les deux amants s'aiment et s'ébattent. On retiendra tout spécialement deux séquences particulièrement audacieuses à une époque où le cinéma gay était encore rare, celle de l'orgie sous acides, sidérante, où David semble se noyer, être aspiré par une mer d'hommes, et celle où, déchiré entre la peur et l'excitation, il se laisse aller à la débauche dans un sauna, jeune proie sur laquelle se jettent fébrilement les mâles en rut.
Si intemporel soit il, A very natural thing fut pourtant lors de sa sortie boudé par le public qu'il ciblait et massacré par la critique. C'est d'une part dû à son rapprochement avec Love story dont il se voulait une sorte de parodie gay. Larkin y fait plus d'une fois allusion notamment lorsque les deux amants s'ébattent et roulent dans les feuilles mortes avant que Mark ne compare David à Ali McGraw. Trop présomptueux que de faire référence à un standard hollywoodien dans un tel film qui au départ se voulait un gentil clin d'oeil?
D'autre part le film fut distribué à une mauvaise période. En pleine ère de révolution sexuelle, la communauté gay qui elle aussi désirait son émanicipation ne pouvait s'identifier à David et ses idées d'un autre âge, ce romantisme et les idées traditionalistes obsolètes que le film véhiculait. Cela lui valut moqueries et désintêret de la part des principaux intéressés.
Mais cependant A very natural thing est plus qu'un film, il faut le voir aussi comme un documentaire, un témoignage dans lequel Larkin insère de nombreuses interviews de jeunes homosexuels et lesbiennes, fières de leur sexualité. Un des grands moments du film reste la vision d'une des premières gay pride de New York à laquelle on assiste, une marche des fiertés qui n'a ni vraiment changé ni perdu de son ampleur et de ses festivités.
Là encore les discours n'ont pas réellement évolué et les questions demeurent similaires. A travers les témoignages de ces jeunes, on constate malheureusement que bien peu de choses ont changé aujourd'hui et les préoccupations restent identiques. Il en va de même pour les motivations de chacun. Pour David, ces manifestations sont inutiles et ne changeront pas l'opinion qu'a la societé des homosexuels, elles peuvent surtout socialement nuire aux personnes qui y assistent en faisant un tel coming out. Pour Jason, son nouvel amant, elles sont nécessaires car elles ne feront que faire avancer le débat sur l'homosexualité.
Si c'est sur une note particulièrement optimiste que se concluera le film, chose plutôt rare dans le cinéma gay pour que le fait soit signalé. David trouvera en Jason, un jeune photographe fraichement divorcé pour vivre librement son homosexualité, l'homme de sa vie. C'est sur un magnifique ralenti aux accents lyriques, durant lequel les deux amants, nus, courent sur la plage avant de plonger et s'ébrouer dans les flots bleus de l'océan, que se terminera cette Love story qu'il faut peut être plus voir comme un essai politique, une oeuvre réaliste et surtout fort humble sur le militantisme gay, que comme un simple film.
Avec son coté parfois amateur, A very natural thing a un coté émouvant, cela lui donne un petit air supplémentaire de véracité non négligeable et cela en fait oublier ses défauts, une photographie un peu sombre notamment lors des scènes de nuit ou d'obscurité contrebalancées par de beaux paysages automnaux aux couleurs dorées et un final paradisiaque, des dialogues par instant un peu vides et une interprétation quelconque sans jamais être cependant mauvaise.
On n'oubliera pas le coté nostalgique du film qui fera découvrir ces lieux que furent entre autres les bains publiques, la plage gay naturiste de Fire Island, les bars gay d'alors et les ancêtres des marches homosexuelles.
Larkin de façon trés simple a su parfaitement illustrer la vie d'un couple gay montrée comme quelque chose de si naturel. Il met aussi en exergue certains points primordiaux comme l'envie de tout un chacun d'aimer et d'être aimé, la désillusion, l'affirmation de soi que ce soit au sein d'un couple que seul, l'exploration de ses sentiments dans un univers gay où se mèlent sexe facile et désirs plus profonds jusqu'au moment où il pose la question de savoir si oui ou non deux hommes peuvent vivre comme un couple héterosexuel. L'homosexualité est elle compatible ou non avec la notion de fidélité?
Avec délicatesse et savoir-faire, Larkin a réalisé une oeuvre séduisante, intelligente, tendre et charnellement excitante surlaquelle le spectateur pourra également s'interroger. Pour toutes ces raisons, A very natural thing, bercée par une bande originale trés rock, mérite amplement d'être redécouvert et gageons que beaucoup se reconnaitront dans ce couple O combien intemporel.
En tête d'affiche, on reconnaitra Robert McLane crédité sous le nom de Robert Joel dans la peau de David, un jeune acteur repéré dans le beach movie Blue summer et Megavixens. A ses cotés on succombera aux charmes de Bo White qui incarne Jason, Bo qui fut le partenaire de Robert dans Blue summer avant d'incarner Adam dans la version trés érotique de la Bible du réalisateur Chuck Vincent, Bible!.