Taxi zum klo
Autres titres: Taxi to the toilet / Taxi al WC
Real: Frank Ripploh
Année: 1980
Origine: Allemagne
Genre: Drame
Durée: 95mn
Acteurs: Frank Ripploh, Bernd Broaderup, Orpha Termin, Peter Fahrmi, Dieter Godde, Klaus Schnee, Bernd Kroger, Markus Voigtlander, Gregor Becker...
Résumé:
Les années 70 et le début des années 80 ont vu toute une série de films traitant des divers faces de l'homosexualité souvent sous forme de semi-documentaires afin d'en renforcer l'impact. Des bas fonds Sado-masochistes new yorkais de Jacques Scandelari où l'homosexualité était montrée sous sa face la plus crasse à la recheche vaine de l'amour de Johan carnet intime d'un jeune homosexuel dans les milieux de drague publique, le film de Frank Ripploh est un joli croisé des deux.
L'un des gros atouts du film est que tout spectateur pourra s'identifier à son personnage central, un instituteur bien dans sa peau, aimé de tous et adoré de ses élèves malgré son homosexualité dont il ne se cache pas.
L'homosexuel n'est plus cette fois cet être persécuté qui doit se cacher, vivre sa sexualité en secret, en marge d'une société récalcitrante face à cette différence. Ripploh qui s'est entierement mis lui même en scène, osant les scènes les plus crues et surtout audacieuses, sait de quoi il parle puisqu'il fut instituteur avant d'être radié pour avoir publié avec leur accord les noms et adresses de centaines d'homosexuels berlinois dans le Stern en guise de lutte pour l'homosexualité.
Sous ce titre particulièrement outrageux mais qui illustre bien le propos du film (Taxi zum klo peut se traduire par Un taxi pour les chiottes), Ripploh nous fait partager son quotidien, une vie de Monsieur tout le monde dans ce qu'elle a de plus intime. Ce sont ses joies, ses peines, ses doutes, ses désirs les plus intimes qu'il met en scène sans jamais avoir peur de choquer, de dépasser les limites de la morale afin d'exprimer cette liberté dont il s'est fait ici le porte-parole.
A la fois tendre, égoiste, cruel, pervers et salaud, amoureux transi aussi désiré que désirable, amusant, Peggy est un peu de nous tous. Il fait de l'homosexuel non plus un être à part mais une personne à l'image de tout homme lambda, brisant ainsi l'image de cette marginalité dans laquelle il est souvent cantonné.
Ripploh joue intelligemment sur ces deux faces avec un humour constant qui ne peut qu'arracher rires et sourires. Peggy est un instituteur entier, dévoué à ses élèves mais il est un homme avec son quotidien, ce quotidien qu'on tait par pudeur mais qui est pourtant celui également de tout un chacun. Du lever matinal au passage aux toilettes et toutes les petites anecdotes plus ou moins salaces qui font partie intégrante de ces moments intimes, Ripploh accumule un luxe de détails si intimes mais tellement humains que tout en devient drôle.
Et si Peggy aide une vieille dame à traverser la rue, vient au secours d'une femme violée, il a aussi une vie sexuelle et comme tout homosexuel libertin elle est bien remplie d'autant plus que Peggy est un dragueur invétéré, un assoiffé de sexe auquel il ne met aucune limite.
Il corrige les devoirs de sa classe dans les chiottes publiques tout en observant par un trou les minets qui se doigtent avec febrilité dans les cabines avoisinantes avant qu'un sexe ne traverse cet orifice improvisé pour mieux se faire sucer anonymement.
Il enchaine les plans avec tous les sexes qui se présentent à lui dans les endroits de drague mais toujours avec bonne humeur car Peggy est un homme qui croque la vie à pleine dents. Il est le prototype même du "mec cool".
C'est alors qu'il rencontre Bernd, un petit commerçant sans le sou qui rêve du grand amour. Très vite, leur relation s'épanouit et ensemble ils forment un vrai petit couple. Malheureusement, Peggy ne peut se satisfaire d'une vie aussi routinière et calme où tout semble être rose.
Il lui faut de l'imprévu, des émotions fortes et surtout du sexe, vivre ses fantasmes au jour le jour avec qui bon lui semble.
Bernd s'accomode mal de cette liberté sexuelle à laquelle il n'est pas habitué, il supporte de moins en moins cette sexualité multiforme et en souffre. Peggy enchaine les plans et cela nous vaut quelques belles scènes qui au fil du métrage prennent une tournure de plus en plus crues.
Peggy drague en taxi, repère les lieu de drague où trainent les hommes au sexe disponible, derrière un arbre, dans un jardin publique, les toilettes.. il ramène ses conquêtes d'une heure chez lui au grand dam de Bernd qui doit supporter ses corps qui se sucent et se prennent sans honte dans la chambre conjuguale.
Peggy ne se fixe aucune limite: soirée SM cuir, plan urophile ( ce qui nous permet d'assister a une séance d'urophilie extraordinaire où Peggy urine dans la bouche de son amant ) jusqu'au jour où Peggy attrape une SMT anale. Si Peggy prend ce désagrément avec philososphie et bonne humeur, c'est aussi pour Ripploh l'occasion de nous faire faire la visite gynécologique de son anus par protoscope sans aucune pudeur mais avec beaucoup d'humour sous les sourires moqueurs de l'assistante du protologue.
Pourtant Peggy est amoureux de Bernd et leurs ébats sont montrés comme particulièrement érotiques. Il souhaite simplement allier les deux, cet amour tranquille et sa vie sexuelle multiforme.
A ce niveau Taxi zum klo pose la question de savoir si la jouissance, l'amour peut aller de pair avec le partage sexuel, si la simplicité peut aller de pair avec la recherche de plaisirs interdits incessante.
C'est aussi un film sur le respect de l'autre. Peggy dans cette quête de sexe continuelle, de plaisirs de plus en plus forts ne demande qu'une chose: que Bernd respecte son choix et sa vie tout comme il respecte son mode vie routinier tellement simple. L'acceptation des différences de l'autre peut avoir raison des difficultés qu'elles engendrent dans un couple. Plus simplement Ripploh se demande si la vie n'est pas faite pour éviter la routine et l'Homme n'a t'il pas mieux à faire que de toujours s'engoncer dans un train-train ronflant au détriment d'émotions fortes et de piquant?
La fin du film est tout en émotion. C'est en princesse des 1001 nuits que Peggy fera la classe, laissant derrière lui toute forme de paravent, faisant fi des conséquences et surtout éffondré d'avoir perdu Bernd. Pourtant la conclusion est pleine d'espoir. Peggy se pose les vraies questions: Doit il tout recommencer et vivre avec Bernd, doivent ils se suicider ensemble.. Non, on va réessayer se dit il, évasif. Chacun a tiré de l'autre une sorte d'apprentissage amoureux.. et le mot fin tombe sur ce visage à demi-démaquillé...
Taxi zum klo n'est jamais qu'un film fait de fragments de vie, une tranche de vie d'un homosexuel qui s'assume et veut être reconnu en tant que tel, un homme comme n'importe quel autre dont la sexualité est sans tabou.
Une des forces du film, jamais mièvre, jamais stupide et encore moins caricatural, est de parler ouvertement de sexe quelqu'il soit sans aucune forme d'avilissement. On va de partenaires en partenaires, de quêtes en quêtes, on montre la crudité de la sexualité gay mais sans pourtant ni la juger, ni la salir et encore moins en la montrant comme une maladie ou comme représentatif du milieu homo en général. Ripploh laisse derrière lui les grands discours moralisateurs au profit d'une histoire au quotidien, impertinente, simple, piquante et amusante.
Peggy est interprété par Ripploh lui même dont la moindre parcelle la plus intime du corps n'aura plus de secret pour le spectateur.
Amateurs de spectacles divertissants et impertinents, ce taxi est pour vous et vous conduira au bout de vos fantasmes les plus libertins!