Krampack
Autres titres: Nico and Dani / Nico y Dani
Réal: Cesc Gay
Année: 2000
Origine: Espagne
Genre: Drame
Durée: 91mn
Acteurs: Jordi Vilches, Fernando Ramallo, Esther Nubietas, Marieta Orozco, Chisco Amado, Ana Gracia, Mingo Rafols, Eduardo Gonzales, Muntsa Alnaniz, Myriam Meyzières, Jesus Garay...
Résumé: Nico comme chaque été va passer ses vacances chez son ami d'enfance Dani. Cette fois, les deux adolescents sont à l'âge où les principales occupations sont les filles d'une part et d'autre part perdre son innocence. Si Nico désire plus que tout perdre sa virginité avant la fin de l'été, Dani découvre son homosexualité et l'amitié qu'il a pour Nico se transforme en amour. C'est sans problème que Nico participe aux jeux sexuels de Dani dont le Krampack, technique masturbatoire cérébrale consistant à être en érection sans se toucher. Il couche également avec lui et accepte sans mal les relations homosexuelles qui pour lui ne sont qu'un jeu. Conscient que Nico n'est pas intéressé, Dani souffre et se détruit lentement jusqu'à penser tuer Berthe, la petite amie de Nico. Il va alors sombrer dans l'alcool et la déprime pour mieux se perdre dans les bras d'un homme de quelques 20 ans son ainé...
Nouveau talent du cinéma espagnol en ce début d'années 2000, Cesc Gay, après une première réalisation plutôt confidentielle et surtout très underground, Hotel room, met en scène ici son premier vrai long métrage adapté d'une pièce de théâtre éponyme écrite par le dramaturge Jordy Sanchez.
Krampack nous entraine dans un magnifique petit village côtier prés de Barcelone où Nico, 17 ans, va comme chaque été passer ses vacances chez son ami d'enfance Dani. Mais cette fois les choses sont un peu différente. On est l'âge où on découvre sa sexualité et l'arrivée de Berthe et Esther va jeter le trouble entre les deux adolescents. Dani découvre son homosexualité et sa relation avec Nico, toujours puceau, a pris au cours du temps une tournure plus ambigüe. Il réalise qu'il en est amoureux et supporte mal la présence des filles que Dani drague. Celui ci a en effet décidé de perdre sa virginité avant la fin des vacances. C'est pourtant sans problème qu'il participe aux jeux sexuels de Nico dont le Krampack, une technique masturbatoire cérébrale et sophistiquée consistant à être en érection sans se toucher. Au fil des jours Dani devient plus entreprenant. Du stade cérébral il passe à l'acte physique. Si au début Dani est surpris il accepte sans mal cette relation homosexuelle qui pour lui n'est finalement qu'un simple amusement. Conscient que son ami n'est pas intéressé, Dani souffre et se détruit lentement jusqu'à penser tuer Berthe, la petite amie attitrée de Nico de plus en plus présente. Il se perdra alors dans les bras d'un homme de quelques vingt ans son aîné, un écrivain qui l'a rencontré quelques jours plus tôt. L'homme lui fera prendre conscience de qui il est réellement. L'écrivain lui vole sa virginité pendant que Nico devient un homme auprès de Berthe. A la fin de l'été chacun sera à sa façon devenu un homme. Les choses reprennent leur cours normal.
Le sujet du film n'est pas très nouveau. Krampack n'est jamais qu'une nouvelle tentative d'approche de la sexualité adolescente et de l'homosexualité, la recherche de son identité sexuelle à un âge charnière, celui du passage de l'adolescence à l'âge adulte, où on se pose des questions sur son orientation, ses choix. Rien d'original certes mais Krampack est pourtant un véritable petit bijou de tendresse et d'émotion. Sans jamais juger ses jeunes protagonistes quelques soient leurs choix, leurs erreurs, leurs travers Cesc Gay signe un film d'une fraîcheur, d'une tendresse étonnante, renforcée par le naturel et la spontanéité de ses deux jeunes acteurs. Dani et Nico sont des adolescents comme tant d'autres, deux amis d'enfance qui sont arrivés à l'âge où les relations sexuelles et la perte de sa virginité sont devenus les principales obsessions. Il faut absolument devenir un homme en couchant enfin avec une jeune fille et les vacances sont le meilleur moment pour accéder à ce rêve. On drague maladroitement, on ment ou on se met en valeur mais il existe une grande différence entre Nico et Dani qui au fil du temps s'est accrue.
Dani préfère les hommes. Il s'est lentement entiché de Nico jusqu'à en tomber éperdument amoureux, un secret qu'il doit garder pour lui tout en jouant un rôle dans lequel il se perd. Il profite des instants où il est seul avec lui pour lui proposer des jeux sexuels anodins à travers desquels il assouvit son amour pour son ami.
Mais ces jeux peuvent devenir dangereux dès lors qu'ils touchent aux sentiments. Si pour Nico c'est sa façon à lui de vivre cet amour particulier, pour son ami il ne s'agit que de simples plaisirs masculins auxquels s'adonnent innocemment deux amis d'enfance, qu'il s'agisse des séances de Krampack, de simples masturbations et des nuits où ils dorment ensemble et se sodomisent. C'est aussi pour Nico une façon d'oublier sa sexualité quasi inexistante, ses éternels échecs amoureux dus à sa maladresse. Lorsqu'il est avec celle qu'il convoite c'est alors Dani qu'il oublie et refuse alors toute forme de jeu.
Au fil des jours, Berthe et ses amies deviendront des ennemies pour Dani, celles qui lui empêchent d'avoir Nico à lui seul. Tenu au secret, il souffre en silence, se perd dans l'alcool et la débauche notamment avec un professeur de lettres qui depuis longtemps a des vues sur lui. Aussi bas que tombera Dani Krampack se terminera cependant sur un happy end. A la fin de l'été, Chacun sera devenu un homme. Nico fier de ses conquêtes féminines partira vers d'autres conquêtes tandis que Dani se mettra à la recherche de jeunes et beaux amants sur la plage, libéré, soulagé.
Loin de toutes considérations psychologiques Cesc Gay signe une oeuvre potache aussi fraîche que drôle. Via la comédie il trace un portrait tout en justesse et douceur de ses jeunes héros certes très stéréotypés (le charmant blondinet qui plait à toutes les filles et le brun plus androgyne, un vrai joyeux luron un peu niais) mais aussi frais et naïfs que sympathiques. Il aborde leurs préoccupations, leurs doutes avec une bonne humeur et un humour omniprésent et surtout beaucoup de pudeur malgré un style très direct. Il ne prend pas de gant pour parler de sexualité, l'évoquer et la montrer ce qui à l'époque put surprendre, voire gêner certains bien pensants (nous sommes au tout début des années 2000 et le cinéma ibérique tout public n'avait pas encore l'habitude de montrer à l'écran l'homosexualité adolescente de façon si évidente, réservée habituellement à un cinéma plus intellectuel ou plus marginal). Au beau milieu de cette excitation pubère Cesc Gay nous fait passer avec une facilité déconcertante de l'émotion au rire, totalement séduit par la beauté des décors naturels dans lesquels évoluent nos deux jeunes et fort séduisants protagonistes régulièrement nus ou simplement vêtus d'un slip. Voilà un autre atout du film et non des moindres, les deux acteurs principaux. D'une part le ténébreux et gracile Jordi Vilches, 21 ans, une véritable "gueule", LA révélation du film absolument irrésistible dans la peau de Nico, à la fois drôle et touchant. Par la suite Jordi se spécialisera un temps dans ce type de rôle adolescent à connotation sexuelle (Dos tipos durosLocos por el sexo...) et deviendra par la suite une valeur sûre du cinéma et de la télévision espagnole. D'autre part le blond Fernando Ramallo dans le rôle de Dani qui lui aussi connaîtra une jolie carrière essentiellement à la télévision.
Sélectionné à Cannes en 2000, Krampack est une très agréable et touchante comédie gay aigre-douce, une bluette adolescente arc-en-ciel qui loin de toute analyse psychologique traite avec humour et de manière très simple d'homosexualité et de découverte de soi tout en dépeignant très justement . Krampack mérite amplement le prix de la jeunesse qu'elle y reçut. Le film fit aussi par la suite les beaux jours de très nombreux festivals.