Il grande racket
Autres titres: Racket / The big racket / Big racket / El gran chantaje / I megali kobina
Real: Enzo G. Castellari
Année: 1976
Origine: Italie
Genre: Polizesco
Durée: 101mn
Acteurs: Fabio Testi, Vincent Gardenia, Renzo Palmer, Orso Maria Guerrini, Glauco Onorato, Marcella Michelangeli, Romano Puppo, Antonio Marsina, Massimo Vanni, Sal Borgese, Joshua Sinclair, Pietro Ceccarelli, Anna Zinnemann, Salvatore Billa, Roberto Dell'Acqua, Daniele Dublino, Edy Biagetti, Domenico Cianfriglia, Stefania Castellari, Ruggero Diella...
Résumé: Une bande de racketteurs s'attaque aux commerçants de Rome. Ils vandalisent leur magasin et s'en prennent à leur famille s'ils refusent de payer. L'inspecteur Palmieri est sur l'affaire. Il est persuadé que leur chef est un bonnet de la mafia surnommé Le Marseillais. Il parvient à les arrêter mais ils sont rapidement relâchés grâce à leur avocat véreux. Furieux, las de cette justice, Palmieri décide de mettre un terme à leurs exactions en utilisant des procédés illégaux. Aidés de quelques commerçants et de malfrats il va tenter de tendre un piège au Marseillais et ses hommes qu'ils piègent dans un entrepôt...
Troisième des quatre polizeschi que tourna Enzo G. Castellari entre 1973 et 1977 après Le témoin à abattre et Un citoyen se rebelle et avant La via della droga, Il grande racket est sûrement son polar le plus abouti mais également le plus brutal, le plus violent. Il signe là une bobine d'action coup de poing couleur rouge sang qui prend pour thème principal la justice sauvage, celle du citoyen face à l'incapacité de la police de mettre un terme à la délinquance urbaine.
A Rome une bande de délinquants sans scrupule rackettent quotidiennement de nombreux
commerçants qu'ils punissent de manière brutale s'ils refusent de payer. L'inspecteur Nico Palmieri et son adjoint sont sur l'affaire. Ils découvrent que les voyous qui mènent ces expéditions punitives appartiennent à un gang mafieux local. Palmieri est victime de la bande et son adjoint est tué. Après un séjour à l'hôpital, l'inspecteur, motivé par le désir de vengeance, se décide à les mettre hors d'état de nuire par tous les moyens possibles. Alors que les délinquants poursuivent sans relâche leurs exactions et violent la fille d'un restaurateur qui refusait de se soumettre Palmieri réussit à les arrêter mais grâce à leurs appuis politiques les racketteurs sont finalement libérés. Ils vont pouvoir continuer de plus
belle leur racket. Las d'une justice inexistante, motivé par la colère, Palmieri oublie ses principes et va utiliser des méthodes bien peu orthodoxes pour les mettre hors d'état de nuire et remonter jusqu'à ceux pour qui il travaillent. Palmieri découvre qu'à la tête de ce gang mafieux se trouve Rudy dit "Le marseillais" qui se prépare à attaquer un fourgon postal. Lui même est sous les ordres d'un mystérieux chef dont il découvrira l'identité dans l'entrepôt où il a réunit un groupe de justiciers composé de quelques uns des commerçants rackettés et quelques hors-la-loi qui ont de bonnes raisons de leur en vouloir. Ils s'apprêtent à rendre justice eux mêmes. Un véritable carnage se prépare à l'entrepôt.
Pour son troisième polar Castellari alors en très grande forme se lance à son tour dans le vigilante movie à l'italienne dont de nombreux exemples déferlaient alors sur les écrans, une gamme de films où face à l'incapacité de la police à faire son travail, face à une justice corrompue qui n'a plus de juste que le nom le peuple las de cette violence qui envahissait les rues de son pays faisait lui même justice aidé par un commissaire aux méthodes plus qu'illégales. Après Maurizio Merli, Luc Merenda, Tomas Milian c'est au tour de Fabio Testi d'endosser le rôle de ce commissaire de fer, l'inspecteur Palmieri qui a fort à faire avec une bande racketteurs féroces aux ordres d'un gang mafieux. Force est de constater que Enzo
Castellari signe ici un des meilleurs films italiens du genre, une bande explosive découpée en trois parties toutes aussi intéressantes et sanglantes les unes que les autres.
La première pose les bases de l'intrigue et présente les divers protagonistes en donnant un aperçu de la violence qui attend le spectateur durant les 100 minutes qui vont suivre. Un gang de racketteurs, deux hommes (le violeur et le dur des durs) et une femme (une féministe endurcie encore plus cruelle que ses partenaires) sème la terreur à Rome en exigeant des commerçants qu'ils leur payent des sommes exorbitantes s'ils ne veulent pas subir de représailles. Ils menacent, détruisent tout sur leur passage, passent à tabac, une
déferlante de violence que Castellari filme de façon implacable parvenant par instant à dépasser les débordements d'un Umberto Lenzi ou d'un Di Leo. Pour tenter de mettre un terme à leurs méfaits un inspecteur, célibataire donc sans attache, se voit confier l'affaire. Sa détermination le conduira à l'hôpital suite à une impressionnante chute de voiture filmée avec brio. La petite fille d'un restaurateur rebelle sera quant à elle kidnappée et violée, l'occasion pour Castellari de nous offrir une magnifique séquence que certains trouveront dérangeante, le viol explicite d'une fillette, un des grands moments du film qui réjouira les amateurs de sadisme sexuel et débouchera sur une deuxième partie tout aussi agitée.
Cet acte odieux va déclencher chez Palmieri l'envie de poursuivre son enquête de manière bien moins officielle avec l'aide de deux mafieux notoires, un important nom des milieux de la drogue et un petit cambrioleur qui n'a plus vraiment les pieds dans son époque dont Palmieri est resté proche. Cette collaboration conduira à de nouvelles bagarres musclées, des règlements de compte et su clôturera par un sanglant affrontement des autorités et du clan du Marseillais, l'occasion pour le cinéaste de déclencher une nouvelle explosion de violence dans une station désaffectée.
C'est à une véritable montée dramatique à laquelle on assiste en troisième partie de film
avec deux moments forts, le renvoi de Palmieri pour ses méthodes peu orthodoxes et la mise en place du piège qu'il a préparé dans l'entrepôt où vont s'affronter les hommes du Marseillais et les justiciers désabusés, désillusionnés, réunis par l'inspecteur composé d'hommes tous plus fragilisés les uns que les autres mais déterminés car tous ont une très bonne raison d'éliminer cette racaille. Si jusque là Castellari n'avait pas été avare de scènes choc sanguinolentes cette ultime partie montée comme un flamboyant western urbain est une véritable apothéose qui débute par le viol spectaculaire d'Anna Zinnemann (par devant par derrière s'il vous plait) sous l'oeil de son époux puis brulée vive dans l'incendie de leur
maison et se clôture par l'affrontement final, une tempête de plomb, un déluge de feu, un massacre sans précédent dans la carrière du réalisateur qui à ce jour reste une des séquences monument du polizesco. Menée de main de maitre, tambour battant, par un Castellari particulièrement en forme et surtout inspiré elle met en exergue les points faibles de chacun mais aussi leur folle détermination face à la cruauté et l'habileté des mafiosi. En poussant un peu l'analyse on pourrait même dire sans trop se tromper que Il grande racket s'approche dans sa construction et sa violence des grands polars américains, digne héritier d'un Peckinpah ou d'un Bronson.
L'interprétation est à l'image du film: excellente. Plus sobre dans son jeu qu'un Tomas Milian mais plus charismatique qu'un Maurizio Merli Fabio Testi incarne un Palmieri plus en retenue que les commissaires que jouaient ses confrères mais tout aussi désireux d'accomplir son devoir et assouvir s vengeance par tous les moyens possibles. On l'aime ou on ne l'aime pas, chacun ses goûts, mais force est d'admettre que Testi trouve là une de ses meilleures compositions. Il est entouré de grands noms du cinéma italien tels Renzo palmer, bouleversant dans le rôle du restaurateur dont la fille a été violée, un des rôles les plus forts du film, Orso Maria Guerrini, tout aussi parfait dans la peau d'un ex-champion de ball-trap
devenu fou suite à la mort de sa femme, Romano Puppo, Massimo Vanni, Giovanni Cianfriglia, Joshua Sinclair, Glauco Onorato, ou encore Roberto Dell'Acqua. Pas d'actrice potiche cette fois mais une dure à cuire, une féministe cruelle dont le sadisme la rend encore plus dangereuse que ses complices, une véritable hyène comme on les adore tant jouée par Marcella Michelangeli, la compagne d'alors de Lou Castel qui devait lui aussi jouer dans le film mais ne fut pas retenu, dont la performance reste stupéfiante. Elle sera l'année suivante la terroriste de Italia: ultimo atto? de Massimo Pirri. Notons la présence de la fille de Castellari lui même, Stefania, dans le rôle de l'adolescente violée.
Tourné à Rome en 1976 lorsqu'en Italie la montée de la violence urbaine et de l'insécurité étaient en pleine expansion Il grande racket témoigne parfaitement du climat d'alors tout en évitant un discours trop réactionnaire comme il évite de façon assez judicieuse d'être trop réaliste. Ce troisième polar de Castellari est plus un jeu de massacre ininterrompu boosté à l'adrénaline, un film d'action pure particulièrement cru qui fait oublier de par sa mise en scène et son intrigue jouissive un scénario somme toute peu original voire par moment un brin bâclé (la découverte de celui pour qui travaille le Marseillais plutôt mal amenée).
Rythmé par l'excellente partition des frères De Angelis Il grande racket est un des meilleurs polizeschi d'alors et sans nul doute le chef d'oeuvre de la carrière de son auteur (en ballotage pour beaucoup avec Le témoin à abattre) qui avoue aimer ce film et surtout le final dont il est dit-il très fier.