Las joyas del diablo
Autres titres: Le diable aime les bijoux / El secreto del toison de oro
Real: José Maria Elorrieta
Année: 1969
Origine: Espagne / Canada / Tunisie
Genre: Action / Aventures / Fantastique
Durée: 81mn
Acteurs: Donald Lautrec, Michèle Torr, Mick Micheyl, Angel Picazo, Morucha, Zaaza Razak, Mariano Vidal Molina, Gerome Jeffrys, José Ignacio Pidal, Ramon Lillo, Antonio Jimenez Escribano, Juan Cazalilla, Charo Chalamier, Rosario Royo, Guillermo Mendez...
Résumé: Partout à travers l'Europe de précieux bijoux appartenant à un ancien ordre mystique sont dérobés malgré les mesures prises par Interpol. Entrainés malgré eux dans cette aventure une jeune et belle chanteuse et un séduisant artiste vont mener l'enquête. Leurs investigations les mènent jusqu'à un mystérieux personnage nommé le Duc. Il a pour objectif de faire revivre cet ordre secret dont il deviendra le Grand Maitre...
Le diable aime les bijoux. Quel joli titre qui pourrait facilement s'appliquer à un thriller grand cru. Il n'en est rien en vérité. Responsable d'une série de petits films d'horreur divertissants (La llamada del vampiro, Las amantes diabolicos, El espectro del terror) le vétéran espagnol José Maria Elorietta signe ici une pellicule hybride difficilement classable, une petite série B qui bien souvent flirte avec le Z et mélange sans honte mais avec un non sérieux avoué le film d'espionnage à la James Bond, l'épouvante gothique, l'action, le polar et la comédie. fantastique. Le résultat est surprenant dans le bon sens du terme bien sûr.
Toute une série de mystérieux vols se produisent dans les musées européens. Tous les bijoux dérobés appartiennent à une ancienne organisation secrète, l'Ordre de l'Aigle d'or. A Tolède, une exposition doit avoir lieu. Elle doit présenter une partie des bijoux de la collection. Malgré les précautions prises par Interpol un nouveau vol se produit. L'enquête menée par des agents secrets conduit à un mystérieux personnage nommé le Duc. Reclus dans son manoir il est en effet à la tête du groupe responsable de ces vols. Son but est de faire revivre l'Ordre de l'Aigle d'or. Une jeune chanteuse, Dorothea, et Alec, un séduisant play-boy également chanteur et gérant d'un night club, se retrouvent vite mêlés à cette affaire.
Dorothea, transformée pour l'occasion en détective, finit par se faire passer pour une domestique afin d'être embauchée au manoir du Duc. Juste après avoir découvert le passage secret menant à la salle où le Duc organise ses rituels sataniques elle est faite prisonnière. Les agents infiltrés sont eux aussi découverts. Tous les bijoux réunis la cérémonie qui donnera au Duc le titre de Grand Maitre de l'Ordre de l'Aigle d'or peut commencer mais parmi ses fidèles certains sont des traitres dont le but est de s'emparer de ce fabuleux trésor. C'est le cas de la fourbe Mick qui grâce à son arme paralysante, vole les bijoux et s'enfuit avec. Après bien des péripéties tout rentrera dans l'ordre. Le Duc est arrêté,
le trésor retrouvé et Dorothea est intronisée reine de l'Ordre de l'Aigle d'or par le Duc lui même devenu fou.
Tourné en Espagne le long des côtes d'Alicante, cette coproduction également connue sous le titre El secreto del toison de oro est une délirante pellicule dont le charme provient essentiellement de son n'importe quoi scénaristique. Inutile de chercher un réel sens à cette histoire, un fourre-tout où se mêlent insolemment les genres. Le film s'ouvre sur des vols de bijoux dans le plus pur style des films d'espionnage, se poursuit vers l'enquête policière puis l'aventure mâtinée d'action saupoudrée d'un zeste de fantastique (ou de science-fiction avec notamment cette arme fabuleuse, un télé objectif qui statufie ses victimes). On glisse vers
l'épouvante gothique avec le manoir, son passage secret et sa salle de torture médiévale, ses bourreaux cagoulés et ses rites sataniques de pacotille pour mieux repartir vers le film d'espionnage et terminer sur une note de comédie. On arrose l'ensemble d'une grande dose d'humour et d'un nuage de psychédélisme (le passage dans la discothèque) et on obtient ce film inénarrable, cette pépite du cinéma ibérique estampillée fin années 60, sorte de cartoon bordélique (ah le générique d'ouverture aux tons psychédéliques!) qui par instant rappelle Le bourreau écarlate de Massimo Pupillo. Impossible en effet de ne pas songer à ce film tant pour le contexte que pour l'ambiance farces et attrapes lors des scènes dans la salle
médiévale où opèrent de solides bourreaux dissimulés sous des cagoules noires, l'un d'entre eux responsable d'une inattendue décapitation à la hache (suggérée bien sûr) lors d'une exécution. Ce micmac se ressent aussi dans le scénario bien souvent dénué de cohérence, de véritable logique. Inutile d'en attendre quelques explications satisfaisantes. On visionne, on accepte, on rit avec cet attirail digne d'un sous James Bond du pauvre, notamment ce télé-objectif qui paralyse les gens dont on se demande bien la provenance, ces aventures rocambolesques sans queue ni tête que vivent des personnages indéfinis. Inutile de chercher qui est Dorothea, l'héroïne, pourquoi elle est mêlée à cette histoire au
même titre que Alec, gérant d'une discothèque qui n'aime pas qu'on y deale de la drogue. Il fallait une jeune et belle protagoniste. Point barre. On devine tout juste qu'elle aurait un lien avec un des voleurs dont elle serait la maitresse. Si on prend le temps d'une romance sur les plages d'Alicante, cela n'empêche que tout le monde trahit tout le monde, se perd, se retrouve, se cherche au nom de l'Ordre de L'Aigle d'Or, l'organisation secrète qui restera bien nébuleuse aux yeux du spectateur. Elle porte un joli nom et c'est déjà ça.
L'important est qu'on ne s'ennuie jamais, qu'on se laisse porter par la bonne humeur et le ton décontracté de cette aventure foldingue totalement farfelue qui de surcroit a deux autres
atouts à son actif. Le premier est le soin apporté à la photographie et aux décors tant intérieurs (le magnifique manoir fort bien mis en valeur et ses cryptes) qu'extérieurs (les très beaux paysages ensoleillés d'Alicante). Le second est sa surprenante distribution internationale dont la palme d'honneur de l'actrice la plus inattendue revient à Michèle Torr, notre Michèle Torr nationale, la chanteuse yé-yé de nos parents, dans le rôle de Dorothea. Michèle pousse évidemment la chansonnette puisqu'elle interprète la chanson titre ("Si tu pars") en duo avec son bref partenaire dans le film le canadien Donald Lautrec, également chanteur à succès dans son pays d'origine à cette époque. Michèle qui dans les années 60
aspirait aussi à une carrière d'actrice arborant un look à la Marylin Monroe trouvait là son premier rôle à l'écran. Ni bonne ni mauvaise Michèle s'en tire fort bien reconnaissons le, très attrayante dans ses tenues sexy, mini-jupes, mini robes et cuissardes noires, décalée dans les séquences psychédéliques auxquelles elles nous avaient jamais habitué, et même décemment osée lorsqu'elle sort de dessous le lit où elle est ligotée et bâillonnée, Elorietta osant un très furtif plan sur son entre jambe. Drôle, enthousiaste, investie même déguisée en soubrette et courte perruque noire Michèle est une piquante curiosité. En 1987 en revenant sur sa carrière, déçue de n'avoir pas eu la chance d'être comédienne, elle revenait
brièvement sur ce film qu'elle juge visiblement mauvais, heureuse qu'il ne soit jamais sorti en France tant c'est un grand n'importe quoi à ses yeux. Mais un grand n'importe quoi peut être fort sympathique et c'est le cas ici. Autre curiosité francophone la présence de l'artiste peintre, chanteuse yé-yé en son temps, Mick Micheyl qui joue la fourbe Mick dont on gardera en tête sa tenue en cuir noir et surtout sa lutte hilarante contre un des gorilles du Duc en fin de bande. Elle est aussi l'auteur de la chanson du film. Autour d'eux s'agitent quelques acteurs espagnols de renom dont les vétérans Angel Picazo, l'argentin Mariano Vidal Molina et Antonio Jimenez Escribano.
Sorti en Espagne en 1969 avec un succès certain malgré des critiques négatives, distribué au Canada la même année sous le titre Le diable aime les bijoux, ressorti en 1982 dans ce même pays sous le titre El tesoro del toison de oro, le film de Elorietta est malheureusement resté inédit chez nous. Seuls quelques cinémas du sud de la France le jouèrent avant qu'il ne soit jeté semble t-il aux oubliettes. Aujourd'hui considéré comme une pièce de collection Le diable aime les bijoux, oublié des éditeurs tant vidéos que DVD, est une rareté extrêmement recherchée des amateurs d'OVNI pelliculaires. Cette curiosité d'un
autre temps est un savoureux petit régal de stupidité hautement jouissif qu'on prendra beaucoup de plaisir à découvrir. Rire, détente, divertissement, étonnement, tout est là, Michèle en plus! Espérons qu'un jour un éditeur retrouve ce film et lui donne une seconde vie. En attendant ce miracle le seul moyen de visionner cette joyeuse ringardise (en espagnol uniquement puisque la version française semble avoir disparu depuis bien longtemps) est de se procurer une des rares copies télé diffusées il y a bien longtemps sur les chaines ibériques.