I figli di Zanna Bianca
Autres titres: The sons of White Fangs
Real: Maurizio Pradeaux
Année: 1974
Origine: Italie
Genre: Comédie / Aventures
Durée: 85mn
Acteurs: Sal Borgese, Ileana Rigano, Claudio Giorgi, Danny Ribol, Claudia Bianchi, Piero Fabiani, Antonio Maimone, Gualtiero Rispoli, Luciano Rossi, Carla Mancini, Maria Tedeschi, Rossana Palazzone, Alessandro Perrella...
Résumé: Alors que Luisa et Giorgio, le fils d'un riche industriel, sont en pleine séparation leur bébé est kidnappé. Giorgio alors en vacances avec sa maitresse accepte de payer la rançon et demande à la police d'arrêter leur enquête. C'était sans compter sur Boubou le chien et Clan-Clan le canard qui avec l'aide d'un autre chien vont tout faire pour retrouver le bébé...
Essentiellement connu pour ses deux gialli, Passi di danza su una lama di rasoio et Passi di morte perduti nel buio, le très peu prolifique Maurizio Pradeaux (sept petits films en 25 ans) n'aura guère marqué le cinéma italien. Outre ses deux thrillers on mentionnera un western totalement oublié, un petit polar 60s dont l'intrigue tient dans son titre (28 minutes pour 3 millions de dollars) et un tout aussi petit film de guerre (I leopardi di Churchill) et surtout I figli di Zanna Bianca, une sorte d'OVNI dans le ciel du cinéma de genre transalpin, une hallucinante mièvrerie qui aujourd'hui encore laisse bouche-bée.
Giorgio Arrighi, fils d'un richissime industriel, a décidé de se séparer de son épouse bien aimée Luisa malgré la naissance de leur petite fille Loretta. Il part en vacances avec sa maitresse Greta laissant Luisa désespérée. En apprenant la nouvelle son père décide pour le punir de le déshériter et de lui couper les vivres, une décision qui met très en colère le fils indigne. C'est alors que deux hommes kidnappent le bébé et demandent aux parents une rançon d'un milliard de lires. Paolo est disposé à payer et demande à la police d'arrêter l'enquête mais il n'entend pas revenir pour autant vers sa femme éplorée. C'était sans compter sur le chien Buck surnommé Boubou qui adorait le bébé. Avec l'aide d'un autre
berger allemand, son meilleur ami, et du canard Cla-Cla dont le bébé ne pouvait se pousser, les trois animaux vont partir sur la piste des kidnappeurs, aidant bien involontairement Alberto Bellati un journaliste aussi farfelu qu'incapable dans ses investigations. Après moult aventures les deux chiens et le canard ramènent le bébé à ses parents et démasquent les responsables de l'enlèvement, Schultz le secrétaire du vieil industriel et la vénale Greta.
Il faut le voir pour le croire! Comment une telle histoire a t-elle pu germer dans l'esprit de scénaristes? Comment a t-on pu imaginer un tel scénario dont on se demande à qui il peut être destiné? Aux enfants? Peut être. I figli di Zanna Bianca se veut une comédie familiale
mais passé quatre ou cinq ans comment peut on prendre plaisir devant une sucrerie aussi niaise et surtout irracontable? Que Pradeaux ait voulu à son tour surfer sur le succès des films tirés de l'oeuvre de Jack Landon est évident puisque la même année étaient sortis les deux films de Lucio Fulci suivis d'autres pellicules du même acabit. Le souci est que de Croc-blanc il n'y en a pas trace ici, remplacé par un berger allemand stupidement nommé Boubou follement épris d'un horripilant nouveau-né, la très ingrate Loretta (qui d'ailleurs change de visage selon les plans). Adieu les neiges du Canada et les chercheurs d'or, cet opus se veut une comédie policière située dans la verdure fleurie des montagnes de
Bolsano, un décor idéal pour un quelconque épisode de Heidi. Jusque là il n'y a rien d'extraordinaire que de transplanter Croc-Blanc de nos jours. Mais il fallait oser et qui sait être sous l'emprise de substances qui font rire pour imaginer un chien et un canard amoureux d'un bébé, ce même bébé qui ne peut dormir sans avoir le volatile poser sur son visage!!! A ces délires plus qu'improbables on ajoute une épouse éplorée d'une rare stupidité (tout ce qu'elle trouve à dire aux kidnappeurs lorsque enfin ils l'appellent c'est comment changer un bébé et qu'ils doivent absolument lui faire faire son rot après la tétée... on comprend pourquoi ils lui raccrochent au nez et pourquoi son mari la quitter pour Greta!),
un journaliste en tweed écossais sosie raté de Sherlock Holmes aussi maladroit que bête et incapable muni d'une loupe géante, d'un parapluie, d'un vélo aménagé et d'un side-car branlant, un commissaire étourdi mais soupçonneux et surtout beaucoup d'animaux ainsi qu'une horripilante bande originale plus que sirupeuse, dégoulinante remplie de pleurs, de gazouillis insupportables de bébés, d'aboiements et de coins-coins insupportables au bout de trois minutes.
Ainsi décrit le tableau est déjà fort singulier mais c'était sans compter les séquences animalières soit les trois-quart du film qui le rendent tout simplement hallucinant et
totalement impensable de nos jours. Pourrait-on encore aujourd'hui imaginer un réalisateur laisser un canard et surtout un berger allemand grimper sur un bébé, lui lécher le visage en toute quiétude (et sans trucage surtout), le prendre dans sa gueule pour le transporter (même si pour les plans les plus difficiles il est clairement remplacé par une poupée) ou le laisser dériver sur l'eau sur une simple planche de bois? Il est certain que toutes les ligues humanistes lui tomberaient dessus en hurlant au scandale. Mais il est clair que toutes ces séquences font l'intérêt de ce délire invraisemblable qui multiplie les aberrations. Il faut par exemple voir Boubou penser, imaginer en visualisant dans son petit cerveau de chien des
gestes humains comme fabriquer une brouette, faire un biberon ou trouver des couches... La scène de la nurserie notamment laisse pantois mais reste culte! Et les deux bergers ne sont pas les seuls à penser car même le canard s'y met aussi sauf que Cla-Cla est plus indiscipliné et a parfois envie de satisfaire ses appétits sexuels! Point d'inquiétude. Boubou veille et sait le remettre dans le droit chemin. Finalement I figli di Zanna Bianca pourrait être un croisé sous acides entre Rintintin et Saturnin le canard où se serait égaré Sherlock Holmes!
Et l'intrigue alors? Voilà un gros souci car il n'y en a pas. Il ne se passe quasiment rien
durant 90 minutes si ce ne sont ces exploits canins, ces deux chiens et ce canard transformés en baby-sitter, qui malheureusement sont si répétitifs qu'ils perdent une bonne partie de leur impact même si on reste fasciné par l'imagination débridée des scénaristes qu'on visualise bien un joint au bec (de canard). Voilà qui pousse à rester devant son poste pour voir ce qu'ils ont inventé et jusqu'où ils oseront aller dans le trash néonatal. Pour le reste on suit dépité les péripéties désolantes d'un Sherlock Holmes du très pauvre sur son vélo aménagé, son side-car, une machine à écrire sous sa veste, un énorme parapluie, un filet à papillons et une loupe (qui lui sert notamment à observer un caca dans une couche!). Il
bafouille, il trébuche, il s'égare, il "draguouille" une vieille secrétaire myope, le tout dans le plus pur style british à la Benny Hill. On pleure de consternation d'autant plus qu'il ne sert pas à grand chose puisque seuls les animaux ont un semblant d'intérêt.
On passera sous silence les dialogues qui comptent parmi les plus idiots jamais écrits comme on aura peine à citer les personnages secondaires, l'épouse éplorée qui passe son temps à pleurnicher, une véritable nunuche de roman-photo à l'eau de rose édulcorée, le commissaire de police idiot qui se veut sérieux, le fils goujat et sa maitresse Greta que le scénario laisse vite de coté même si au départ ils étaient au coeur de l'histoire sans oublier
la domestique gourde mais Pradeaux parmi toute cette guimauve a tout de même tenu à nous offrir une petite scène de cruauté animale, la bataille sanglante entre Boubou et le vilain doberman des kidnappeurs, et c'est bien entendu le doberman qui finira en charpie. (Dommage que ce ne fut pas le bébé!)
On peut se demander comment Sal Borgese, une des gueules du cinéma de genre italien, habitué aux rôles de flics et de vilains, s'est retrouvé dans cette praline et accepté de jouer ce Sherlock foufou? Il en va de même pour Luciano Rossi qui garde son aura de truand mais joue les garde-bébé empâtés à l'instar de Piero Fabiani plus connu pour ses apparitions en méchant dans une poignée de coproductions italo-turques. Autant dire que la crédibilité n'est
pas au rendez-vous et le reste de l'interprétation est au diapason. La pauvre Ileana Rigano est condamnée à jouer les pleureuses cruches, Claudio Giorgi plus connu comme réalisateur sous son pseudonyme Claudio de Molinis (American fever, Candido erotico, Tranquille donne di campagna) s'avère un piètre acteur. Reste l'apparition toujours aussi plaisante de la fellinienne Maria Tedeschi en vieille secrétaire myope éprise de son Sherlock d'amour.
Véritable OVNI du cinéma Bis familial, délire animalier pour pensionnaires de crèches, délire hallucinant pour soirées Marie-Jeanne difficile de trouver le juste public de cet incroyable I figli di Zanna Bianca que tout amateur de genre italien devra sans faute voir un jour pour
constater de ses propres yeux cette aberration canine sortie de l'imagination de Pradeaux. Incrédulité, rire, consternation, curiosité, fascination mais aussi crispation pour ceux qui comme nous détestent les bébés, leurs pleurs et gazouillis (combien de fois souhaiteront-ils qu'il se fasse dévorer, noyer, exploser...) voilà un mix de sentiments qu'on ressentira à la vision de cette bande d'un autre temps qui montre l'audace du cinéma italien d'hier, une audace aujourd'hui impensable. C'est bien là le plus incroyable. Landon doit se retourner dans sa tombe... de rire espérons le pour lui!