Lilli Carati: La rédemption d'une Miss
Trop fragile, trop belle, trop seule... quand au bout de la gloire, il y a la destruction de l'être! Ainsi pourrait on définir le parcours de Lilli Carati qui restera comme l'une des starlettes italiennes les plus adulées dans le monde de l'érotisme. Celle à qui pourtant tout souriait à vingt ans a suivi à l'instar de nombreuses de ses consoeurs un chemin qui l'a mené vers la déchéance en l'espace de quelques années seulement, trop peu préparée à cet univers impitoyable qu'est l'industrie cinématographique. Mal conseillée, mal entourée et trop réservée pour s'affirmer et se battre, Lilli s'est effondrée au grand dam de son entourage qui n'a rien pu faire. Revenons donc plus en détail sur la montée et la chute de la si belle et si fragile Lilli Carati.
Née à Varese en 1956, Lilli Carati de son vrai nom Ileana Caravati va très vite se faire remarquer dés son adolescence par sa prodigieuse beauté. C'est en 1975 qu'elle explose aux yeux de toute l'Italie en finissant seconde à l'élection de Miss Italie. Il n'en faut pas plus pour que les producteurs la remarquent et voient en elle leur future nouvelle star. On est au milieu des années 70. L'Italie est à la recherche de nouvelles starlettes, les futures étoiles qui illumineront les écrans et remplaceront les actrices établies en voie de lent défraichissement. C'est l'ère des Gloria Guida et consort et le nom de Lilli Carati va vite rejoindre la liste.
Ses premiers pas au cinéma, c'est à Sergio Corbucci qu'elle les devra dés 1975 grâce à Di che segno sei, une comédie avec Adriano Celentano où elle y a un petit rôle.
En 1976, Michele Massimo Tarantini lui offre le rôle principal de sa sexy comédie La professoressa di scienze naturali / La prof du bahut, celui d'une jeune et séduisante professeur de physique fort convoitée, aux cotés de Ria De Simone. Elle retrouvera ce type de personnage pour La compagna di banco / Ma copine de la fac.
L'année 1977 sera une année faste et plutôt chargée pour la jeune actrice puisqu'elle ne tournera pas moins de films en vedette féminine principale. On la retrouve dans le polar musclé de Stelvio Massi Poliziotti sprint / Convoy Busters dont le héros est l'indétrônable Maurizio Merli dont elle est ici la petite amie. Puis, c'est Squadro antifurto / Hit squad de Bruno Corbucci, un polar dont elle partage la vedette avec Tomas Milian et L'avvocato della mala / Gangbuster de Alberto Marras. Dans ce petit polar fort sympathique qui tire vers le film noir, elle interprète la petite amie du toujours séduisant Ray Lovelock.
Elle terminera l'année avec Candido erotico de Claudio De Molinis. Cette historiette à l'eau de rose teintée de perversion narre les aventures de Carlo, un jeune artiste spécialisé dans les sex shows live qui entre deux représentations se prostitue avant de rencontrer la douce Charlotte interprétée par Lilli. Il va entraîner la jeune fille dans son univers dépravé après avoir découvert qu'il est incapable de faire l'amour ailleurs que devant un public. Brillante et lumineuse dans ce rôle aux cotés d'un Mircha Carven fadasse, Lilli démontre qu'elle peut être une très bonne actrice.
Elle continue sur sa lancée en 1978 avec Le evase, storie di sesso e violenza / Violez les otages de Giovanni Brusatori, film froid et dur où Lilli en chef de bande impitoyable va retrouver une brochette de sexy starlettes montantes dont Dirce Funari, Zora Kerowa ou encore Marina Daunia et Ines Pellegrini. Un tout petit rôle suivra dans le film de Lina Wertmüller Fine del mondo nel solito letto in una notte piena di pioggia avec Candice Bergen.
L'année 1978 sera surtout l'année de l'implacable Avere vent' anni de Fernando Di Leo. Film dur, film choc, Avere vent'anni nous conte la fin tragique de deux jeunes filles innocentes dans la fraicheur de leur vingt ans, une fin particulièrement abominable et odieuse qui secoua alors l'Italie. Lilli y a pour partenaire la splendide Gloria Guida avec laquelle elle va partager une scène lesbienne particulièrement torride et surtout sensuelle.
C'est à cette époque que la belle Lilli va commencer à prendre de la drogue. Guère préparée à cette gloire soudaine et terriblement timide, elle n'a jamais osé dire non à quiconque, proie facile pour les producteurs véreux qui ont su profiter de sa faiblesse et de son corps parfois. Mais Lilli n'a jamais rien dit, ne s'est même jamais confiée à ses rares vraies amies. Et tout le monde sait que dans l'univers du show biz, sex and drugs est le fin mot.
La belle Jenny Tamburi qui fut une de ses meilleures amies se souvient: Beaucoup de gens doivent avoir Lilli sur la conscience. Ils l'ont trompé, utilisé comme ils ont utilisé tant d'autres filles. Lilli était très fragile et n'a jamais eu une forte personnalité. Nous étions amies mais nous nous sommes éloignées car Lilli avait honte de son état. Nous nous sommes querellées. J'ai souvent cherché à la protéger à ma façon, à lui faire comprendre les choses. Elle cachait ses joints au fond de ses paquets de cigarettes et voulait m'entrainer avec elle dans ses vices mais j'ai refusé. Finalement, je me suis laissé tenter par les joints par charité mais j'ai toujours refusé les pilules et autres drogues dures.
Lilli va alors doucement commencer sa lente descente aux enfers. Elle continue de tourner et apparait dans deux films en 1979, Senza buccia de Marcello Aliprandi avec Olga Karlatos et la future Ilona Staller future Cicciolina et Il corpo della ragassa de Pasquale Festa-Campanile qu'elle retrouvera en 1980 pour la comédie à sketches Que la mano.
Les années 80 seront redoutables pour l'actrice. Le cinéma de genre italien est en perte de vitesse. La reconversion pour la jeune et si fragile actrice sera d'autant plus difficile que Lilli commence à être totalement dépendante de la drogue. Après quelques films en Espagne en 1981 et 1982 dont le polar mafieux de Gianni Siragusa Buitres sobre la ciudad dans lequel elle se fait brutalement violée et une comédie sexy déjantée dans la lignée de Ghostbuster C'è una fantasma nel mio letto / Y-a t-il un fantôme dans mon lit? de Claudio De Molinis, c'est Joe D'Amato qui va la prendre sous son aile pour quatre films érotiques.
Tout d'abord en 1984 c'est L'alcova / La retape avec une toujours aussi belle Laura Gemser et une Annie Belle vieillissante avec lesquelles Lilli va partager d'audacieuses scènes lesbiennes. Plus réussi sera en 1985 Il piacere / La femme pervertie mais beaucoup moins torride niveau érotisme. Puis ce sera Lussuria et enfin Voglia di guardare, tous deux tournés en 1986.
Dés lors, Lilli va se complaire dans des films de plus en plus osés avant de sombrer dans le X. Elle est ainsi l'héroïne de trois films où elle partage la vedette avec Rocco Sifredi Una ragazza molto viziosa, Una moglie molto infedele et Il vizio preferito di mia moglie. Lilli sera aussi la vedette d'une vidéo Lilli's dreams.
C'est en 1989 après Una scatenata moglie insaziabile et surtout The whore / La putain que Lilli quittera les devants de la scène totalement ravagée par la drogue. Lilli est au plus mal. Elle a touché le fond et s'en rendre compte l'a détruit encore plus. Quelques temps après qu'elle se soit retirée des feux de la rampe, Lilli fera une tentative de suicide dans la prison où elle était incarcérée pour détention de drogues. La jeune actrice tentera une seconde fois de se suicider en sautant du balcon de l'appartement familial. Elle se brisera les os et restera paralysée durant de nombreux mois. Ce profond handicap ne l'aidera pas et l'enfoncera encore plus dans le désespoir. Lilli parviendra pourtant à se remettre sur pied et entamera une sévère désintoxication.
Elle réapparaitra en 1992 pour un évènement dont l'Italie se souviendra longtemps.
Lilli fit sa rédemption devant les caméras de télévision. Elle parla de sa lente chute, de sa descente aux enfers et sa dépendance à la drogue. En larmes et visiblement émue, Lilli proclama haut et fort qu'elle regrettait tout ce qu'elle avait fait et demandait le pardon du public. Lilli s'est soignée et a réussi à se sortir de cet enfer. Elle s'est construit une nouvelle vie à la seule force de sa volonté et s'est tenu loin du monde illusoire du show bizz durant de nombreuses années.
Elle est réapparue en 2008 sur les chaines de télévision italiennes, très émue, presque en larmes, décidée à sortir enfin de l'ombre. A aujourd'hui 52 ans, Lilli aimerait rejouer mais surtout avoir de beaux rôles, forts, afin de prouver qu'elle peut être une bonne actrice, à des années-lumières de ces films qu'elle a pu interpréter jadis. Visiblement heureuse, Lili porte encore pourtant les affres de ses années douleur, le corps et le visage marqués par ces longues souffrances qu'elle n'oubliera pas.
L'ex-icône de la comédie sexy n'aura malheureusement pas eu la chance de voir ces espoirs se concrétiser. Son retour au cinéma en 2011 dans le film de Luigi Pastore, La fabia di Dorian, dut être annulé lorsque les médecins diagnostiquèrent chez Lilli une tumeur au cerveau. Ces dernières années, elle dut mener un nouveau combat particulièrement éprouvant mais malgré plusieurs opérations, la maladie eu raison d'elle le 21 octobre 2014.