Vivi ragazza vivi
Autres titres: Vivi ragazza viv! / Morir por amar
Réal: Lorenzo Artale
Année: 1971
Origine: Italie
Genre: Drame
Durée: 88mn
Acteurs: Pilar Velázquez, Aldo Reggiani, Rossano Brazzi, Victoria Zinny, Domenico Calandruccio, Carlos Casaravilla, Nello Pazzafini, Umberto Di Grazia, Irio Fantini...
Résumé: Barbara et Marcello, deux jeunes issus de milieux sociaux différents, sont amoureux mais leurs parents n'acceptent pas cette relation. Ils n'ont d'autre solution que de s'enfuir. Ils emménagent dans une vielle cabane située sur une colline. Marcello trouve un travail sur un chalutier mais il fait vite des jaloux parmi les autres marins, plus particulièrement le capitaine Emanuele et Damiano, un marin. Ils essaient de l'intimider puis de le chasser mais échouent. Décidés à se débarrasser de lui ils s'en prennent à Barbara...
D'origine sicilienne Lorenzo Artale fait partie de ces réalisateurs aujourd'hui complètement oubliés comme le sont également leurs films qui le plus souvent ont disparu au fil des années. La carrière de Artale fut assez brève puisqu'il ne réalisa que quatre pellicules entre 1964 et 1972, quatre drames bien ancrés dans l'ère de leur temps qui prouvaient l'amour qu'avait Artale pour un certain cinéma. Malgré leurs défauts, leur maladresse, ils témoignaient d'une certaine ambition, possédaient un style parfois proche du néoréalisme alors à la mode. Sept ans après son premier film, le rarissime Quei pochi giorni d'estate, Artale met en scène son troisième long métrage, Vivi ragazza vivi, également connu sous le titre tout aussi explicite Morir por amar.
Barbara et Marcello s'aiment mais ils viennent de milieux différents. Barbara est issue d'une famille bourgeoise, Marcello est fils d'agriculteurs. Pour le père de la jeune fille leur amour est une hérésie. Il va même jusqu'à faire passer à tabac Marcello par deux de ses hommes pour le dissuader de la revoir. Il décide aussi d'envoyer sa fille en Angleterre afin qu'elle l'oublie. Refusant l'idée d'être séparée de Marcello Barbara fugue. Elle se rend chez lui. Marcello la présente à ses parents et leur annonce leur prochain mariage. Son père refuse cette union. Les deux amants n'ont plus qu'une solution, fuir. Ils partent en moto, les
hommes du père de Barbara à leurs trousses. Il refuse en effet que la police s'en même afin d'éviter un scandale. Le couple trouve une vieille maison abandonnée au sommet d'une colline qu'ils emménagent. Marcello doit maintenant trouver du travail. Il parvient à se faire embaucher comme matelot sur le bateau de pêche du capitaine Matteo. Son arrivée provoque la jalousie des autres marins, surtout celle des rivaux de Matteo, la concurrence étant rude entre marins-pêcheurs. Il est vite pris en grippe par Emanuele et Damiano. Lorsque Marcello monte en grade ils jurent de se débarrasser de lui. En apprenant qu'il habite la maison de la colline ils tentent de le faire passer lui et Barbara pour des hippies
afin que le Docteur Graziani, le propriétaire, les chasse. Ils échouent. Damiano décide alors de s'en prendre à Barbara. Une nuit alors que Marcello est en mer il s'introduit dans la maison et tente de violer la jeune femme. Elle réussit à s'enfuir mais il la rattrape. Le destin du couple va alors se jouer.
Il n'y a aucun doute possible. Avec Vivi ragazza vivi Lorenzo Artale s'inspire de Love story sorti l'année précédente, revisite Roméo et Juliette en version hippie. La trame est quasi identique. Deux jeunes issus d'un milieu social différent tombent éperdument amoureux. Marcello est fils d'agriculteur, un petit prolétaire dont le père aimerait qu'il reprenne plus tard
l'exploitation familiale. Il est hors de question qu'il accepte que son fils quitte tout pour dixit le père une petite pute en chaleur. Sa petite amie est la fille d'un couple de bourgeois qu'on devine haut placé pour qui il est hors de question qu'elle s'affiche avec un tel cul terreux. Les sentiments étant plus forts que tout les deux amants s'enfuient en moto et vont vivre leur amour loin de tout, dans une cabane abandonnée qu'ils transforment en un petit nid douillet. L'histoire est belle, la mise en scène l'est un peu moins. On retrouve une fois encore les défauts récurrents aux oeuvres du metteur en scène à savoir un manque de profondeur, de psychologie et pas mal de maladresse. Faute d'être suffisamment définis il est difficile de
s'attacher aux différents protagonistes. Les parents de Barbara sont quasi inexistants, réduits à de simples silhouettes dont on ne sait rien si ce n'est que la mère est une femme en apparence frustrée, soumise à un mari intransigeant qui n'a jamais vu que son honneur et ses intérêts. Ni plus ni moins. On se contentera de ça. Des parents de Marcello dont le temps d'écran n'excède pas cinq minutes on sait juste qu'ils exploitent une ferme. Quant aux deux amoureux ils s'aiment à la folie et sont prêts à vivre d'amour et d'eau fraiche après une fugue peu crédible à l'image même de l'installation de leur nid d'amour dans une bicoque isolée sur une colline. Voilà qui est frustrant tant les possibilités étaient nombreuses. On a
un peu de mal à y croire donc à adhérer à cette cavale, cette escapade de jeunesse.
En plus de l'intrigue principale Artale soulève bon nombre de sous thèmes tout juste esquissés qu'on aurait aimé voir un peu mieux développés. Cela aurait donné plus de consistance au scénario et de force à cette histoire qui se veut aussi un documentaire vérité sur la difficile vie des marins, la rivalité, la concurrence entre pêcheurs et le monde de la jeunesse hippie mal perçue par l'ancienne génération. Outre une belle et tragique romance Vivi ragazza vivi est également une jolie histoire de solidarité et surtout d'amitié entre Marcello et le vieux capitaine. Voilà tout un amalgame de bons sentiments malheureusement mal agencés dans un scénario simplifié à l'extrême.
Cela n'empêche pas le troisième film de Artale d'être un beau film, attachant, émouvant, ne serait-ce que par la pureté de l'amour qu'éprouvent les deux jeunes protagonistes l'un pour l'autre. Ces Roméo et Juliette des temps modernes, chevelus et libérés, ont quelque chose de touchant. On se laisse ainsi porter par leur amour, leur innocence et on suit avec plaisir leurs aventures rythmées par une très agréable partition musicale et une chanson-thème tout aussi belle. On se laissera charmer par la beauté des décors extérieurs, cette colline surplombant le littoral où se dresse la cabane de pierres de nos amoureux en cavale. On retiendra quelques jolies scènes comme la fête hippie sur la colline, la vendetta des
beatnicks contre les ennemis du couple, le viol de Barbara et surtout le magnifique final, tragique, très dur, qui ne laissera personne insensible. Difficile de ne pas verser une petite larme qu'on soit ou non un coeur d'artichaut. On saluera aussi l'interprétation des deux principaux protagonistes dont la jeunesse n'a d'égal que leur fulgurante beauté. L'espagnole Pilar Velazquez qui n'est pas sans rappeler Ali McGraw est sublime et nous offre même quelques plans seins nus. Aldo Reggiani (Le chat à neuf queues) et ses faux airs à la Lino Capolicchio est tout aussi séduisant. Ils forment un petit couple parfait, solaire. On saluera
la prestation de Victoria Zinny (la mère de Marcello), le visage ravagé par la douleur tout au long du film. Nello Pazzaffini et Domenico Calandruccio sont odieux à souhait.
Vivi Ragazza vivi n'est pas parfait mais au delà de ses imperfections et de ses maladresses, comme pour Edipeon et I pugni di Rocco, les autres réalisations de Artale, voilà un film plein d'émotions, de bons sentiments et de positivité contagieuse qui font chaud au coeur. Le cinéaste nous fait simplement partager un moment de vie, de bonheur, d'amour sur fond d'idylle hippie malheureusement trop courte. Cela est ici suffisant pour apprécier ce film et passer un très bon moment.