Passing strangers
Autres titres:
Real: Arthur J. Bressan Jr
Année: 1974
Origine: USA
Genre: X
Durée: 76mn
Acteurs: Robert Adams, Tom Camagey, Arthur J. Bressan, Eddie Cdena, David Dehr, Grant Dietzler, ChuckFeil, Edward Guthman, Terry Hunter, Ricahrd Locke, Darren Mascall, Patrick Lee...
Résumé: Robert a 18 ans. Il n'a encore jamais eu de relation sexuelle. Il répond à une petite annonce, envoie la lettre à son destinataire, espérant un retour. L'homme en question, Tom, a 22 ans. Il aime errer sur Polk street, y repérer un homme et passer un bon moment avec lui. Tom enchaine les plans d'un jour. Il répond à Tom. Ils se rencontrent, font l'amour. Ils tombent amoureux...
S'il n'est pas le plus connu Arthur J. Bressan fut néanmoins un des pionniers du film gay américain indépendant passant sans mal du simple documentaire au drame homosexuel en faisant un détour par la pornographie, soit en tout huit films devenus au fil du temps de véritables oeuvres cultes très recherchées qui auront marqué le mouvement de libération homosexuelle dans les années 70. Passing strangers, son tout premier film réalisé en 1974, a un statut un peu spécial dû à sa rareté. En effet longtemps considéré comme totalement perdu, absolument invisible depuis des décennies, ne semblait rester de la
pellicule que quelques extraits, quelques scènes qui furent montées sous forme d'un court métrage de 33 minutes puis éditées en DVD chez Bijou classics sous le titre Lost encounters. Si cette petite demi heure donnait un avant gout de ce qu'avait été le film d'origine il laissait cependant un léger gout d'amertume dans la bouche de l"amateur tant ce montage aléatoire était aguicheur. C'était sans compter les efforts de certains collectionneurs assidus qui retrouvèrent en Amérique une copie de Passing strangers sous forme d'une vieille vidéo d'époque sortie chez Intelligence video. Le premier long métrage de Bressan pouvait enfin renaitre de ses cendres et les fans de porn gay vintage enfin découvrir cette
bande longtemps restée une énigme, in Graal.
Ceux qui ont eu le plaisir de visionner Lost encounters y retrouveront le coeur, les bases de de l'histoire. Certaines séquences qui pouvaient paraitre simplement obscures trouvent ici explication. L'intrigue est des plus simples. San Francisco. Robert, un garçon de 18 ans, n'a encore jamais eu de relation sexuelle. Il décide de répondre à une petite annonce dans un magazine spécialisé, celle de Tom, un jeune homme de 22 ans, un inconditionnel de sexe qui aime errer chaque jour sur Polk street en quête d'hommes à draguer et baiser. Les aventures masculines de l'homme sont entrecoupées par les appels téléphoniques d'un
projectionniste de salles porno, Artie, qui pour passer le temps discute avec Tom qui s'avère être un ami à lui. Il lui conseille de moins penser au sexe et plus à l'amour. Finalement Tom et Robert se rencontrent. Tom initie l'adolescent aux plaisirs du sexe. Les deux hommes tombent amoureux. Ils ne se quittent plus. Tom emmène Robert à une grande marche pacifique homosexuelle sur Polk street. Avec Robert Tom l'insatiable a trouvé amour et stabilité.
Si Lost encounters par la force des choses et son montage anarchique ressemblait à un somptueux kaléidoscope de séquences particulièrement excitantes mises en scène de
manière souvent quasi onirique, s'il s'en dégageait quelque chose de magique, fascinant Passing strangers paraitra d'emblée un peu plus fade, moins accrocheur et surtout assez différent. Exit l'aspect onirique, énigmatique, on se retrouve simplement face à un porno gay traditionnel scindé ici en deux parties distinctes. La première tournée en noir et blanc s'attache aux rencontres de Tom, un de ses nombreux hommes accro au sexe qui le long des trottoirs de Polk street à San Francisco se cherchent, se suivent, se repèrent, s'abordent pour passer quelques de plaisirs ensemble. On suit notamment Tom dans sa chambre après qu'il ait invité un beau garçon à l'y suivre.
Parallèlement on découvre le jeune Robert, un bel adolescent qui souhaite avoir sa première expérience gay. Bressan le filme chez lui entrain d'écrire ses lettres, lire les réponses qu'il reçoit, très excité. Il se masturbe, se donne du plaisir en attendant patiemment que son correspondant l'invite enfin. L'ensemble est ponctué par les apparitions du projectionniste qui seul dans sa cabine, téléphone à Tom alors que défilent les images du film projeté.
Les scènes de sexe sont belles, jamais vulgaires, joliment filmées, artistiquement recherchées, composées essentiellement de masturbations, de fellations, de sodomies et de 69. On pourra être étonné par leur sagesse. Contrairement à bien de ses confrères
Bressan préfère la douceur, la tendresse, la beauté des ébats qui deviennent assez vite routiniers même si le cinéaste les agrémente de temps à autre de quelques pointes de poésie voire de surréalisme (le maquillage de Tom façon clown blanc et surtout la très belle orgie imaginaire au milieu de bulles de savon).
Placée sous le signe de l'amour la deuxième partie tournée cette fois en couleur s'attache uniquement à la relation amoureuse de Tom et Robert. Les deux hommes se rencontrent, font l'amour en pleine nature, tombent amoureux. Promenade en vélo, moments de détente sur des manèges, balade en bord de mer, ébats dans les prés Bressan nous offre une jolie
romance gay que certains pourront trouver ennuyeuse. Du noir et blanc informel des rencontres d'une heure sur les coins de rue, ces fameux étrangers qui passent, on saute dans un monde d'amour, coloré, joyeux sous le soleil d'un milieu de décennie placé sous le signe de la libération des moeurs.
C'est sous forme de documentaire que se clôt le film, la participation des deux amoureux à un défilé pour les droits des homosexuels le long de Polk street, une fête chevelue et pacifiste sous le soleil de San Francisco, un long moment de joie collective prise sur le vif. Loin de l'image queer aujourd'hui véhiculée, à des années lumière de cette extravagance,
cette excentricité qui déforme, ridiculise, décrédibilise de nos jours l'homosexualité, c'est ici une foule de visages christiques, des cascades de cheveux longs, un essaim de hippies solaires, heureux de vivre, qui s'aiment et défilent... ou quand la nature humaine était au sommet de sa beauté, quand la gente masculine était à l'apogée de son charme.
Si à travers Passing strangers Bressan a voulu à l'époque faire son coming out, le film plus qu'un simple porn gay vintage est avant tout un gentil film quasi documentaire sur l'homosexualité au coeur de son berceau qu'était San Francisco, un témoignage sur son univers lorsqu'on se rencontrait encore par petites annonces et draguait ouvertement le long
des avenues ensoleillées, des années de totale liberté, sans tabou, où le sexe se faisait sans plastique (fort heureusement!) mais où les homosexuels revendiquaient déjà leurs droits à la reconnaissance. 100% positif Passing strangers prouve que l'amour existe entre deux hommes, que l'homosexualité peut être belle, poétique, fraiche, chose rare dans le porn gay qui très souvent dépeint un monde sombre, dur, parfumé aux senteurs de sueur et de sperme. Passing strangers est une bouffée d'air frais.
Agrémenté d'une partition musicale éclectique qui va de la ballade folk hippie à des notes plus romantiques ou distordues, étranges selon, doté d'une distribution accroche-l'oeil, en
tête l'androgyne Robert Adams, le moustachu Tom Camagey, Arthur J. Bressan lui même en projectionniste, devrait ravir tous ceux qui d'une part vénèrent les années 70 et sont en adoration devant la beauté de garçons aux cheveux longs, au corps longiligne, ces demi-dieux "woodstockiens" à l'entre-jambe boulimique, tout en chemises à fleurs et jean pattes d'éph' ultra moulants sous lesquels ils ne portaient pas de slip, vite nus pour se laisser langoureusement aller à de coupables ébats.
Selon nos sources une édition DVD de ce film aujourd'hui très recherché devrait voir bientôt le jour en Amérique. Affaire à suivre avec attention.