Maniaco Deprebis

Né en 1895 sous la plume de l'écrivain italien Emilio Salgari, le personnage de Sandokan fut le héros de quelques romans fort populaires au siècle dernier avant d'être adapté au grand écran dés le début des années 60. Le célèbre pirate surnommé le Tigre de Malaisie fut au centre de quelques récits notamment celui de Umberto Lenzi alors à l'aube de sa carrière. Comme bon nombre de ses confrères le cinéaste se plait comme le veut alors la mode à mettre en scène une poignée de sympathiques petits films d'aventures dans lesquels on retrouve des héros tels que Robin des bois, Maciste, Zorro, le cavalier masqué et enfin

Sandokan dont ce Tigre de Bornéo fut les premières aventures au grand écran.
Le gouverneur anglais Lord Guillonk a capturé le sultan de Mulader, le père de Sandokan, un homme aussi redouté qu'insaisissable qui souhaite renverser la dictature anglaise. Alors que Guillonk prépare avec son ami Yanez un plan destiné à débarquer sur les côtes de Labuan et à prendre en otage le gouverneur. Dans un premier temps Yuanez se fait passer pour un messager de sa Majesté et annonce à Guillonk que Sandokan est mort. Le gouverneur peut alors retirer ses armées chargées de faire prisonnier Sandokan. La voie désormais libre le Tigre de Mompracem et ses hommes peuvent prendre d'assaut le fort de

Guillonk. Sandokan fait prisonnière la nièce du gouverneur, la jolie Mary Ann, et l'emmène avec lui. La jeune femme ne tarde pas à tomber amoureuse du séduisant pirate et va l'aider à se dresser contre son oncle, une lutte à laquelle vont se joindre quelques tribus indigènes. Un traitre qui s'est glissé parmi les hommes de Sandokan va lui mettre des bâtons dans les roues jusqu'à l'assaut final de la forteresse que Sandokan et ses tigres vont tenter de rejoindre en passant par les terribles marais de la mort infestés de tribus cannibales...
Pour beaucoup Sandokan restera à jamais associé à l'interprétation qu'en fit Kabir Bedi en 1976 dans l'inoubliable version télévisée puis cinématographique de Sergio Sollima dans

lesquelles le cinéaste mit tout le talent qu'on lui connait afin de donner vie à une magnifique et épique fresque d'aventures maritimes. Il est évident que comparée à l'adaptation de Sollima celle de Umberto Lenzi va vite sembler bien plus légère mais elle mérite cependant toute l'attention de l'amateur friand d'aventures de jungle puisque Sandokan tigre de Bornéo n'est plus ni moins qu'un joli film de jungle entièrement tourné dans les somptueux décors naturels de Ceylan. Sandokan tigre de Bornéo nous entraine au coeur de la forêt du Labuan où Sandokan et une poignée de pirates doivent combattre le perfide Lord Guillonk bien décidé à se débarrasser de cet homme, fils du sultan, son ennemi de toujours. Sur cette

base d'intrigue Lenzi concocte une très sympathique petite pellicule d'aventures exotiques, un film familial riche en rebondissements mais jamais très sanglants. On y retrouve la plupart des éléments récurrents à ce type de cinéma: traitrise, embuscades, combats, attaques d'animaux sauvages, traversées de marais hautement périlleuses, tribus indigènes féroces et rites locaux, sans oublier une jolie romance entre Sandokan et la charmante Mary Ann jusqu'au final assez spectaculaire, l'attaque de la forteresse de Guillonk et la défaite du machiavélique gouverneur due en partie à une gentille guenon qui suit nos héros. Tarzan n'est pas loin. Et c'est justement à Tarzan qu'on pense le plus en visionnant ce premier

épisode des aventures du Tigre de Malaisie, bien plus qu'au pirate féroce et vindicatif décrit par Sollima treize ans plus tard.
L'histoire est certes classique mais suffisamment captivante ne serait ce que pour ses décors et ses rebondissements pour ne jamais être vraiment ennuyeuse malgré une durée plutôt conséquente de quelques 108 minutes. et les séquences situées dans les villages indigènes n'ont rien à envier aux futures films tropicaux des années 70 et 80. Lenzi s'amuse même à y introduire une petite touche,, toute petite touche de cannibalisme lors de la visite chez les Dayaki, la tribu des redoutables coupeurs de têtes, et montrait déjà un penchant

pour les tueries d'animaux, ici un serpent... mais est ce un mal?
On pourra peut être reprocher au film son manque d'énergie par instant. Certaines scènes, certains passages auraient mérité un traitement plus dynamique. L'ensemble manque parfois de punch. Cette inégalité de rythme, ces coups de mou nuisent quelque peu au film qui régulièrement retombe pour ensuite repartir peu aidé il faut le reconnaitre par l'apathie de Steve Reeves, le légendaire Hercule dont c'était le tout premier film depuis qu'il avait abandonné la jupette du héros qui l'avait rendu célèbre à travers le monde. Trop pataud, trop peu énergique Reeves n'est pas un Sandokan très convaincant. C'est certainement là l'erreur

de Lenzi, avoir transformé Hercule en pirate. Fort heureusement il se rattrape sur le reste de la distribution, délirante, comme seul le cinéma Bis pouvait alors en imaginer. Sandokan est américain (Reeves), son ami Yuanez est slave (Andrea Bosic), les anglais sont tous pratiquement espagnols ou italiens (Antonio Molino Rojo, Leo Anchoriz sosie de Frank Wolff, Rik Battaglia), les amis malaisiens de Sandokan, Les Tigres, sont italiens ou... français (Giovanni Cianfraglia, Gino Marturano, Maurice Poli). et la belle Mary Ann n'est autre que Geneviève Grad la future fille de Louis De Funès dans la série des Gendarmes!
Sandokan tigre de Bornéo est une très honnête et sympathique pellicule qui fleure bon les

films d'aventures d'antan, mêlant action, romance et perfidie sur fond de jungle, un spectacle familial gentiment réalisé par un Lenzi certes débutant mais déjà inspiré. Il récidivera dans le genre l'année suivante avec Le temple de l'éléphant blanc puis mettra ensuite une deuxième aventure de Sandokan intitulée Les pirates de Malaisie dans laquelle Steve Reeves reprend son rôle toujours aux cotés du fidèle Andrea Bosic et Leo Anchoriz qui endosse cette fois l'uniforme du vilain Lord Brooks.