Le beau mec
Autres titres:
Real: Wallace Potts
Année: 1978
Origine: France
Genre: Erotique / X
Durée: 71mn
Acteurs: Karl Forest, Carmelo Petix, Cédric Dumont, René, Frank Chazal, Philippe Renaud...
Résumé: Karl, un bel Adonis au corps parfait, est monté à Paris pour y trouver du travail mais il préfère être gigolo, strip-teaseur et se prostituer afin de gagner de l'argent et pouvoir ainsi sortir la nuit dans les hauts lieux de la capitale tout en nourrissant certains rêves de célébrité. Narcissique, il a le culte du corps et s'entretient entre deux clients et une partouze. Sexe et argent sont en définitive sa ligne de mise, jouer, toujours jouer et vivre au jour le jour en satisfaisant sa soif de sexe...
Acteur, réalisateur, producteur, scénariste l'américain Wallace Potts débuta dans le porno gay en 1976 avec More more more et Demi gods avant de donner à la France un de ses grands classiques du genre, Le beau mec, qui connut lors de sa sortie aux USA un énorme succès. Certes Potts n'est ni Norbert Terry ni Jean Etienne Siry ni Benoit Archenoul mais son film possède ce charme si particulier propre au porno gay français de cette fin de décennie, imaginatif, étrange, à la lisière parfois de l'onirisme, à la fois beau et crasse.
Le film se centre autour du personnage de Karl Forest, le beau mec du titre, un bel Adonis narcissique au regard candide qui raconte son parcours sous forme d'une interview en voix-off imagée par une série de saynètes inégales mais la plupart empreintes d'une certaine magie. Karl a eu ses premiers contacts sexuels à l'âge de 13 ans, ses premiers rapports à 15 ans. Il a toujours aimé jouer, aussi bien actif que passif, au gré de ses fantasmes, dominant ou dominé, que ce soit à l'école, à l'armée puis dans sa vie d'adulte. Il quitte sa province pour Paris dans l'espoir d'y trouver du travail mais il préfère être gigolo, strip-teaseur dans un cabaret ou se prostituer tout en gardant cependant une vie saine et équilibrée où le sport et surtout le culturisme tiennent une grande place. Son rêve secret serait de pouvoir partir vivre un jour en Amérique du Sud mais pour l'instant il vit dans la capitale. Est il heureux, est il triste, aime t-il vendre son corps, nourrit il quelque ambition? Une chose est sûre, il s'aime, il aime son corps et tient un discours assez tranché sur la gente masculine. Qu'est ce qu'un beau mec pour lui? A t-il un idéal masculin? En tant que prostitué, ses conquête doivent être bien faites et musclées contrairement à la majorité des français qui n'aiment pas les muscles. En tant que gigolo, il est beaucoup moins exigeant dans ses choix.
Le beau mec n'a pas l'ambition d'être un documentaire sur la vie d'un charmant prostitué narcissique et bête de sexe, ce n'est là qu'un prétexte à suivre les errances du puissant Karl Forrest dans un enchainement de séquences qui le met en scène sans pour autant s'aligner sur l'interview. Le film s'ouvre sur les ébats de Karl avec un bel éphèbe blond en plein coeur d'une forêt verdoyante tandis qu'un voyeur revêtu d'un uniforme militaire allemand les observe à la jumelle. Un homme qui trouve un fusil abandonné ne peut que se transformer en militaire nous dit Karl de sa voix monocorde. Magnifique, il s'agit là d'un des plus beaux moments du film, à la fois étrange, envoutant, qui laisse augurer du meilleur pour la suite. Accompagnée d'une partition musicale synthétique superbe, cette mise en bouche égale de par son onirisme les films de Terry. Malheureusement on ne retrouvera quasiment plus cette beauté, cette étrangeté dans le reste du métrage qui se contente de reprendre sans grande imagination une bonne partie des poncifs de l'imagerie du cinéma porno gay traditionnel.
Karl se revoit étudiant en proie aux fantasmes d'un motard puis d'un hell's angel avant que les rôles ne s'inversent lors d'une deuxième peu convaincante car trop artificielle. Suit une longue scène de prostitution dans une chambre miteuse d'un hôtel parisien quelconque durant laquelle Karl offre son sexe à un quadragénaire bien peu fantasmatique mais très gourmand qui le dévore littéralement. Interminablement longue et répétitive mais filmée en temps réel, elle a pour seul mérite de nous plonger au coeur même de l'univers des prostitués, glauque et miséreux, où l'unique plaisir qu'ils tirent de leur activité est celui des cigarettes qu'ils fument à la chaine pendant que leurs clients s'acharnent sur leur corps. Méprisant, froid, Karl n'a qu'une pensée, celle du billet ou l'éternelle recherche difficilement compatible du sexe et de l'argent, deux plaisirs qui ici deviennent presque pathétiques mais illustrent fort bien l'univers morbide de la prostitution.
Beaucoup plus intéressante est la partouze à laquelle il assiste quelque part dans une cave sombre et délabrée, ces lieux de rencontres interdits où prennent vie les fantasmes sadomasochistes les plus pervers. Faiblement éclairé par un seul projecteur, la séquence alterne les plans sombres et les flashes orangés durant lesquels on aperçoit les corps couverts de sueur se mêler, s'étreindre et s'introduire dans une ambiance glauque appuyée par une musique lancinante.
Le beau mec se conclura par un long et bel exemple de narcissisme. Karl tout de cuir vêtu se déshabille, se caresse et se donne du plaisir tout en s'admirant devant son miroir qui dédouble de façon presque surréaliste son image. "On est pas si mal à Paris" sera la conclusion de Karl qui terminera l'interview, assez inaudible et conduite par un homme de couleur au fort accent semble t-il, sur cette ludique constatation qui résume à elle seule la vie, un jeu perpétuel où sexe et argent en sont les principaux éléments.
Sorti tant en France qu'aux USA comme un simple film érotique, Le beau mec n'est guère explicite quant à ses scènes de sexe, peu recherchées, composées presque uniquement de fellations et de sodomies souvent assez sages. Le beau mec s'axe plus sur la plastique des corps, la beauté des courbes de ses protagonistes et de leur fessier rebondi, transformant le film en une sorte d'ode mineure aux fantasmes gay basiques mais surtout au corps et plus spécialement celui de l'éphémère icône gay Karl Forest, de son vrai nom Jean-Claude Dhoux qui sous ce pseudonyme américanisé tournera quelques X (Johan, carnet intime d'un homosexuel, Hommes entre eux) avant de disparaitre. Entièrement tourné à Paris en cette fin d'années
70, un réel plaisir pour les nostalgiques de la capitale où régnait alors un vent de totale liberté sexuelle, Le beau mec, film rarissime aujourd'hui fort recherché comme la plupart de ce type d'oeuvre sorties à cette époque, n'est pas un chef d'oeuvre. Potts manque quelque peu son objectif. Cette virée parisienne dans le monde d'un jeune homme sans ambition qui vit au jour le jour en se prostituant afin de gagner suffisamment d'argent pour s'amuser et sortir la nuit dans les lieux branchés dans l'espoir de devenir un jour quelqu'un n'est guère captivante car trop superficielle. Surnagent ça et là quelques envoutantes séquences, une vision du Paris gay des années 70 et le corps parfait de Karl que ses adeptes vénéreront.
Trop peu pour satisfaire vraiment nos instincts masculins bestiaux, suffisant comme simple apéritif à des moments de débauche entre hommes beaucoup plus puissants.
Signalons que la VHS jadis éditée fut doublée en anglais par dessus les voix françaises ce qui la rend très vite insupportable à écouter.