Mannaja
Autres titres: Mannaja l'homme à la hache / Mannaja a man called Blade
Real: Sergio Martino
Année: 1977
Origine: Italie
Genre: Western
Durée: 91mn
Acteurs: Maurizio Merli, John Steiner, Philippe Leroy, Martine Brochard, Sonja Jeannine, Donald O'Brien, Salvatore Puntillo, Rik Battaglia, Antonio Casale, Enzio Fiormente, Sofia Lombardo, Sergio Tadioli...
Résumé: Blade est un mystérieux chasseur de primes constamment armé d'une hache dont il se sert pour tuer ses ennemis. Il débarque dans une petite bourgade corrompue nommée Suttonville. Elle est tenue par un riche propriétaire paralytique, Mc Gowan. En fait le vieil homme a jadis tué le père de Blade qui est venu se venger. Il n'avait pas prévu que Mc Gowan lui demande de l'aider à se débarrasser d'un homme particulièrement dangereux et sadique, Noller, dont sa fille s'est éprise...
Né dans le milieu des années 60 le western-spaghetti connut ses heures de gloire dés la fin de la décennie avant de lentement s'éteindre vers 1975 malgré quelques sursauts d'agonie malheureusement pas toujours très glorieux. Mannaja l'homme à la hache fait partie de ces films qui tentèrent justement de donner un ultime souffle de vie au western italien et c'est à Sergio Martino qu'on doit cette fort tardive tentative.
Si le réalisateur avait déjà gouté au genre en 1970 avec le plaisant Arizona se déchaine, il ne s'y était par la suite plus jamais essayé. Sept ans plus tard il y revient donc avec Mannaja l'homme à la hache qui s'il ne renouvelle en rien un genre déjà bien essoufflé n'en est pas pour autant inintéressant puisque ce qui singularise ce nouvel héros justicier c'est avant tout l'arme dont il se sert. Si comme la plupart de ses confrères il sait user avec dextérité de ses revolvers, c'est étrangement la hache qui reste son arme de prédilection, une hache parfois bien rudimentaire puisque dans les conditions les plus extrêmes il sait s'en confectionner à l'aide de pierres taillées et de bouts de bois. Hormis ce détail qui donne son titre au film et ses quelques scènes horrifiques, Mannaja ne se distingue guère de ses illustres prédécesseurs.
Il faut reconnaitre que le scénario n'a rien de révolutionnaire. On retrouve en effet le sempiternel justicier, le parfait antihéros qui, traumatisé par de tragiques évènements survenus lorsqu'il n'était qu'un enfant, va tenter de se venger contre ceux qui ont jadis détruit sa vie et sa famille. Sur ce canevas maintes fois vu, Martino signe un film aussi conventionnel que prévisible dont on regrettera la superficialité et la linéarité. Tout en usant des clichés du genre, avouons tout de même que le cinéaste tente de redonner vie avec un certain soin à ce genre moribond mais sans réel coup d'éclat. L'ensemble donne l'impression d'avoir déjà été mille fois vu ailleurs mais en beaucoup mieux.
Malgré ce goût de réchauffé, Mannaja se laisse cependant voir sans déplaisir grâce notamment à ses quelques qualités et le savoir-faire légendaire du réalisateur. Martino toujours aussi professionnel et consciencieux, entre Keoma et Les 4 de l'apocalypse dont Mannaja se veut un bel hybride crépusculaire, a en effet su dépeindre un univers où il dénonce clairement la part de responsabilité qu'a le capitalisme sauvage dans la violence d'une Amérique qui n'a plus d'autre valeur que celle de l'argent et du pouvoir. Ce réalisme descriptif donne au film une force non négligeable et certaines séquences ont un impact indéniable. Ainsi le massacre des mineurs désarmés et la destruction de la mine est assez saisissante et démontre bien cette barbarie dans laquelle l'Amérique avait alors sombré.
A cela, Martino ajoute par instant une petite touche d'onirisme qui donne au film une note fantastique très agréable notamment lors de la séquence d'ouverture filmée au ralenti durant laquelle un hors-la-loi, traqué dans des marais embrumés, est poursuivi par un cheval qui semble sorti de nulle part. Cette magnifique séquence qui trouve écho dans celle qui clôture le film, le face à face entre le méphitique Noller et Blade, l'ennemi invisible tapi dans le brouillard qui de sa hache surgi du néant tuera le fourbe tyran.
Mannaja bénéficie en outre d'un rythme soutenu dépourvu de temps mort même s'il n'est pas excessivement violent et pourra donc décevoir l'amateur d'effets sanglants. On soulignera également la superbe musique signée Guido et Maurizio De Angelis dont on retiendra la chanson-thème qui n'est pas sans rappeler Keoma.
C'est John Steiner qui endosse la défroque du tyran, campant comme bien souvent un vilain particulièrement crédible. Une fois de plus il parvient à donner à son personnage une aura inquiétante toute empreinte de cette élégance, de cette classe qui caractérisait l'acteur. A ses cotés, Maurizio Merli dont ce fut la seule incursion dans le genre est quant à lui et bien malheureusement égal à lui même, aussi statique qu'il l'était déjà dans ses différents polizeschi. Ceci nuit beaucoup à son personnage de justicier assoiffé de vengeance. Plus de hargne et de force aurait beaucoup apporté à ce rôle-titre. Une fois de plus (de trop?) son manque de charisme, ce monolithisme qui caractérisait l'acteur, le fait échouer là où excellait
entre autres Franco Nero. Il n'est donc pas étonnant de voir le glacial et inquiétant John Steiner et le vétéran Philippe Leroy lui voler la vedette. A leurs cotés on aura le plaisir de retrouver Sonja Jeanine dans le rôle trouble de la fille du shérif, la généreuse Martine Brochard et Donald O'Brien.
Malgré ses défauts, Mannaja l'homme à la hache reste un très honnête western, un des ultimes sursauts du genre qui n'a pas réellement à rougir comparé aux grands classiques du western-spaghetti mais également à des oeuvres plus tardives bien plus faibles voire ineptes. On aurait simplement souhaité plus d'originalité et un peu plus de poigne.