Piu tardi claire piu tardi
Autres titres: Run psycho run
Real: Brunello Rondi
Année: 1968
Origine: Italie
Genre: Giallo
Durée: 92mn
Acteurs: Gary Merril, Brunella Andersen, Rossella Falk, Adriana Asti, Tania Beryl, Ivy Holzer, Michel Lemoine, Marina Malfatti, Angela Minervini, Janine Reynaud, Georges Riviere, Margherita Robles, Demofilo Fidani...
Résumé: 1910 - La jeune Claire, son mari George et leur fils passent leurs vacances d'été dans leur splendide manoir londonien en compagnie de toute leur famille. S'il s'avère que Claire n'est pas réellement heureuse, elle attise surtout la haine de sa soeur qui a des vues sur son mari. Elle pense que Claire ne mérite pas un tel homme. Si Claire semble avoir des amants, elle n'entend pas divorcée au grand dam de sa soeur. Après une altercation entre les deux femmes, Claire est assassinée sous les yeux de son fils qui, terrorisé, s'enfuit. Il se tue en tombant d'un escalier. Quelques années plus tard, George, hanté par le souvenir de sa défunte femme, s'est engagé auprès de Anne, le sosie de Claire. Il organise une réunion familiale afin d'annoncer leur mariage. Toute la famille va se liguer contre Anne, laissant échapper toute la haine qu'ils ont pour elle. Ce qu'ils ignorent, c'est qu'il s'agit d'un piège imaginé par George pour découvrir qui a tué Claire...
Un scénario ou un film signé Brunello Rondi est la plupart du temps digne d'intérêt même si en tant que réalisateur Rondi fut parfois inégal. C'est plutôt mitigé que le spectateur risque de sortir de la vision de Piu tardi Claire piu tardi, un thriller précurseur de la vague des futurs gialli qui allait déferler sur l'Italie deux ans plus tard.
Toute l'intrigue tourne autour de l'assassinat tragique de Claire et de la mort de son jeune fils. Mariée à Georges, un noble anglais, Claire embrase la jalousie et la haine de sa soeur qui selon elle ne mérite pas un homme tel que lui. Si Claire joue la carte de l'épouse heureuse elle lui avoue pourtant avoir des amants mais qu'elle n'abandonnera jamais son mari. Le soir même, la jeune femme alors qu'elle conduisait son fils à sa chambre est assassinée. Le jeune garçon, paniqué, s'enfuit et se tue en tombant de l'escalier. Des années ont passé. George s'est engagé auprès de Anne, une femme qui est le sosie de Claire. Le jour où il annonce leur mariage, toute la famille se dresse contre cette intruse et laisse échapper la haine qu'ils lui vouent. En fait il s'agit d'une ruse de George afin de découvrir qui a assassiné sa femme.
Une des originalités de ce thriller en costumes pré-giallo est son ambiance à l'anglaise qui le rapproche des romans d'Agathie Christie dont il semble s'inspirer. Situé dans une somptueuse demeure victorienne qui se dresse au dessus de la mer, Piu tardi Claire piu tardi, phrase prononcée par la soeur de Claire quelques heures avant sa mort, n'a rien à envier à ces thrillers "so british" qui virent le jour dans les années 60. Rondi tente d'en imiter l'ambiance en se faisant se dérouler l'histoire dans le Londres du début du siècle. Une famille italienne vient passer l'été dans leur splendide manoir pour mieux faire resurgir querelles et jalousies. Argent, soupçon d'adultère, rancoeur, cupidité, sont les moteurs de ce drame familial qui conduira à la mort de la jeune femme et de son fils.
Rondi joue beaucoup sur les non dits, les jeux de regard, l'ambiguité des personnages tous plus odieux les uns que les autres. Aucun n'attire la sympathie, pas même Claire, et tous autant qu'ils sont cachent un vice ou complotent y compris les domestiques. Si souvent cela parvient à créer une certaine atmosphère de tension, un certain suspens, un sentiment d'oppression, ce n'est pas forcément le cas cette fois. Rondi n'arrive pas réellement à insuffler de poison pour donner au film cette ambiance vénéneuse qu'il réclamait. Il ronronne doucement et les séquences d'angoisse telle la mort de Claire et son fils se laissent regarder dans une certaine indifférence. Surnagent quelques scènes troubles et troublantes comme celle où la jeune paysanne simple d'esprit joue avec le fils de Anne, un couteau de boucherie à la main.
La deuxième partie du film, l'annonce du mariage de George et de Anne, est tout aussi peu percutante. Obsédé par la mort de Claire, vivant dans son souvenir, George s'est fiancé à un sosie de sa défunte épouse. Tout le coté morbide de sa pathos est ici trop effleuré pour vraiment fonctionner et la haine que voue tous les membres de la famille, y compris le docteur qui soigne George, se limite à de longues palabres et des regards en coin. La visite de la chambre de Claire où sont rassemblés étrangement ses affaires, son portrait, son journal intime, quelques dessins osés et un horrible crâne caché sous une perruque a quelque chose d'éminemment fantastique mais n'impressionnera malheureusement guère.
Quant à savoir qui a tué Claire, le final pourra là encore décevoir. On pouvait s'attendre à une tonitruante révélation, c'est à une simple constatation qu'on aura droit. Le plan de George le conduira à penser qu'il n'y a pas qu'un seul assassin mais que d'une manière générale toute la famille est à sa façon coupable. Voilà qui est un peu facile et surtout un brin décevant.
Dénué de tout meurtre et autres effets sanglants, Piu tardi claire piu tardi est plus un drame familial qu'un véritable thriller dont il n'emprunte que quelques éléments. Sans être mauvais, le film de Rondi souffre essentiellement de sa réelle absence d'atmosphère, ce poison qui aurait du s'infiltrer au coeur de cette famille de nobles ravagée par l'envie et la jalousie.
Reste un très beau film esthétiquement parlant, tourné dans un sublime noir et blanc, ce qui lui donne un aspect quelque peu suranné, de tout aussi magnifiques costumes, son style très anglais, quelques jolies séquences et une distribution alléchante. On y retrouve en effet les superbes Rossella Falk, Elga Andersen et Adriana Asti. On notera également la brève apparition du réalisateur Demofilo Fidani.
Piu tardi Claire piu tardi reste surtout intéressant vu sous un certain angle cinématographique puisqu'il est à sa façon un des précurseurs d'un genre qui allait dés l'année suivante doucement envahir l'Italie.