Apo tin akri tis polis
Autres titres: From the edge of the city / Garçons d'Athènes
Real: Constantinos, Giannaris
Année: 1998
Origine: grèce
Genre: Drame
Durée: 94mn
Acteurs: Stathis Papadopoulos, Costas Kotsianidis, Panayiotis Hartomatzidis, Dimitris Papoulidis, Anitis polychronidis, Theodora Tzimou, Nikos Kamontos, Stelios Stemboglidis, Giorgios Mavridis, Emilios Chimakis, Vasias Eleftheraidis, Evri Sophroniadou...
Résumé: Sasha a 17 ans. Il est un Pontios, un fils d'immigrants grecs né en Russie sous Staline. Les Pontios vivent aux abords d'Athènes, marginaux déracinés qui rêvent d'argent facile afin d'appartenir à la société grecque qui les rejette. Sasha comme ses amis se prostituent et sont exploités par les plus riches. Ils sont sous la domination de maquereaux guère plus âgés qu'eux. Tous ensemble ils forment une sorte de famille mais pour eux il y a une grande différence entre louer son corps et être homosexuel. Drogues, prostitution, delits, ces jeunes marginaux ont il une chance de s'en sortir dans une société où ils n'ont aucun repère?
Réalisé par Constantinos Giannaris, lui même homosexuel et ancien prostitué, From the edge of the city nous entraine à Meinidi, cette zone pauvre de la banlieue d'Athènes où vivent les Pontios, immigrés russes d'origine grecque venus des bords de la mer noire sous l'aire de Staline. Les Pontios sont revenus en masse en Grèce aprés l'éclatement de l'ex URSS.
Si leurs parents parlent le grec, les adolescents utilisent plus souvent une langue hybride entre le grec et le russe, reflet de cette absence d'identité et de cette marginalisation qui les caractèrisent dans un pays particulièrement xénophobe où leur statut social est tout de même plus élévé que celui de leurs rivaux, les albanais. Cette marginalisation et ce mal de vivre sont le centre du film de Giannaris.
Sasha, 17 ans, fait partie de ces adolescents sans repère. En conflit comme la plupart de ses amis avec ses parents, Sasha est attiré par l'argent facile et une vie plutôt aisée qu'Athènes refuse à ces déracinés, sorte de conquérants d'un monde idéal. Il se prostitue donc en compagnie de ses amis, cotoie de petits maquereaux guère plus âgés que lui. Amis et maquereaux sont devenus une sorte de famille de substitution.
La vie de ces garçons mais aussi quelques filles sont toute étroitement liées et s'ils vendent leurs corps, ils font pourtant la différence entre le fait de se prostituer pour l'argent et être véritablement homosexuel. C'est le cas de Panagiotis, 17 ans lui aussi, qui est tombé amoureux de Nikos, son maquereau. Dans cet univers où vendre son corps est permis, l'homosexualité est pourtant condamnée. Sasha le lui rappelle en tentant de lui faire comprendre qu'il n'est qu'un garçon qu'on loue et non pas “une tarlouze qui donne son cul”. A ce stade, quelle est la différence entre baiser et se faire baiser lui répondra t-il tandis qu'un maquereau soulignera avec cruauté les tortures que les russes infligent aux homosexuels. Giannaris tente de mettre en exergue la perte d'identité sexuelle de tous ces jeunes, coincés entre leurs rêves et la triste réalité, leur façon de la vivre de façon ambigue tout en se moquant d'eux mêmes alors qu'ils sont exploités par les plus riches et la difficulté à faire face à la morale de leurs traditions et à leurs convictions.
From the edge of the city est construit comme un drame ethnique qui prend des airs de documentaire lorsque Giannaris y inclut des interviews de Sasha. Sorte d'anti travelogue, le film tend à nous entrainer dans cet univers d'immigrants qui cherchent à s'intégrer dans cette société grecque mais sont rejetés aux abords d'Athènes où la jeunesse déracinée sombre irrémédiablement dans la prostitution qu'elle soit gay ou hétérosexuelle, la drogue et les délits. A la fois victimes et bourreaux, ces jeunes paumés tentent d'exister dans une société à laquelle il ne se sentent pas appartenir.
From the edge of the city developpe un certain nombre de sous intirigues qui partent dans beaucoup de directions mais ne trouvent guère de justifications ou de réponses. Giannaris semble s'éparpiller en voulant trop vouloir montrer de choses qu'il laisse à l'état souvent végétatif ou simplement démonstratif. Il en résulte non pas de l'ennui mais un coté peut être trop superficiel qui fait perdre beaucoup de son intérêt et de sa force au film. On aurait peut être aimé que Giannaris développe plus les thèmes qu'il traite, l'abandon et le déracinement de ces jeunes, leur malheur, le dur monde de la prostitution, l'homophobie.
Il ne faut peut être pas trop attendre du film à moins de vouloir être déçu, le prendre tel qu'il est et se laisser séduire en le remettant également dans un certain contexte, celui d'un cinéma grec grand public qui s'interdit beaucoup. Si le film connut en Grèce un énorme succès, son contenu homosexuel fut pourtant passé sous silence alors que Giannaris osa un coming out risqué.
Et le film a de quoi séduire. Par son réalisme d'une part, accentué par des dialogues intelligents et la belle interprétation de jeunes acteurs non professionnels venus de la rue, choisis par Giannaris pour leur photogénie. A ce titre, From the edge of the city répond aux critères d'un certain homo-érotisme: sublimation du corps de ces éphèbes grecs dont la caméra lèche les bustes musclés, capte les regards angéliques et les mouvements gracieux dans de sublimes décors. Giannaris reste pourtant pudique et trés décent et s'autorise juste une scène de douche avouons le totalement gratuite où il détaille la nudité intégrale de son protagoniste principal et de son maquereau.
On se laissera d'autre part envoûter par la beauté des paysages naturels et l'onirisme de certaines séquences notamment les flashes-back où Sasha revit son enfance, tout en tons jaune et or, à l'image du bonheur qu'il vivait alors, sans oublier la fascinante séquence de rêve où, en plein désert, lors d'un banquet presque surréaliste, les protagonistes se mettent à danser, sorte de mise à mort chorégraphiée aussi saisissante que surprenante.
On se laissera bercer par la trés belle partition musicale qui mêle savamment folklore grec et accents techno.
Cette étude sociologique de la vie de ces jeunes immigrants aux périphéries des grandes villes est peut être trop légère pour qu'elle ait l'impact désiré sur le public mais en l'état From the edge of the city, prix du meilleur film et du meilleur réalisateur en 1998 au festival de Thessaloniki, acclamé au festival du film gay de Berlin, est un beau film qui ne changera en rien le problème mais fera simplement prendre conscience de certaines réalités. La beauté des jeunes acteurs et la sublimation de leur corps fera oublier aux autres la légèreté du propos. Voilà qui n'est déjà pas si mal!