Hooks to the left
Autres titres:
Real: Todd Verow
Année: 2006
Origine: USA
Genre: Drame
Durée: 75mn
Acteurs: Yann De Monterno, John Michael Dion, Brad Hallowell, Jono Maineri, Pablo Malan, Todd Verow...
Résumé: Nail, un ancien prostitué new yorkais a quitté le trottoir lorsqu'il trouva le grand amour. Sa relation a duré 10 ans. Lorsqu'elle se termine, il retourne à la prostitution et découvre comment la révolution internet a transformé le plus vieux métier du monde. A l'aide de la caméra de son portable il part filmer autour du monde les lieux de prostitution masculine afin d'écrire son journal...
Réalisateur indépendant souvent controversé, Todd Verow, surnommé The veteran of new queer cinema, à qui on doit notamment le fracassant Frisk met en scène en 2006 un des films les plus étranges de la décennie, Hooks to the left.
Auteur d'un cinéma gay souvent décrié, Verow traite une fois de plus d'un sujet de société assez dérangeant en plongeant son public dans le monde de la prostitution masculine dont le protagoniste principal, Nail, a fait partie durant dix ans.
Nail est un ancien prostitué new yorkais qui a quitté cet univers le jour où il est tombé amoureux. Lorsque son histoire d'amour se termine bien des années plus tard, il retourne sur les trottoirs vendre son corps mais il découvre les nombreux changements survenus dans le plus vieux métier du monde suite à la révolution informatique et l'essor d'internet. Aujourd'hui on ne vend plus réellement ses charmes dans la rue mais via la toile avec les avantages qui l'accompagne.
Hooks to the left ou le journal intime d'un prostitué new yorkais. L'idée n'est pas nouvelle mais c'est ici le traitement qui l'est totalement au risque de choquer ou décontenancer le spectateur. En effet, Hooks to the left est une sorte de voyage auto-biographique autour du monde puisque durant plusieurs mois Verow s'est infiltré dans cet univers afin de filmer la prostitution masculine, les lieux de drague gay sordides, toilettes, backrooms... sur fond de sexe trash où fellations, sodomies, Sado-masochisme sont les maitres mot d'une sexualité interdite dans un monde tout aussi interdit à une époque Post-Sida, avec pour seule caméra celle de son portable, un NOKIA. Il en résulte un film parfaitement innovateur et trés approximatif composé de 75 minutes d'images pixellisées d'assez mauvaise qualité qui donnent l'impression de visionner un film crypté d'autant plus que la technologie n'était pas encore aussi développée qu'aujourd'hui.
Le résultat est surprenant. Hooks to the left est un composite d'images abstraites, floues, pixellisées et multicolores qui donnent la sensation de vivre une sorte de rêve, par moment suffocant, un effet que la voix off du narrateur, gutturale, et la trés belle partition musicale aérienne renforcent.
Les images deviennent plus claires en deuxième partie de film même si elles demeurent floues. Elles évitent surtout la pixellisation. Verow nous ballade alors dans de magnifiques paysages maritimes, des bords de mer et nous invite à quelques envolées vers un ciel bleu azur au dessus de prairies verdoyantes. On quitte l'univers urbain de la prostitution pour des univers plus joyeux mais tout aussi condamnables. On ne se donne plus forcément sur des plages de béton mais sur des plages de sable ou des aires balnéaires. La révolution internet a facilité beaucoup de choses. Si elle a fait diminuer quelque peu la vie des trottoirs, la prostitution ne s'est jamais aussi bien portée avec l'avenement du web à l'abri des regards dans un environnement plus sain. Verow à travers son film tente de montrer cette évolution, à sa manière
Le décalage voulu entre la narration et certaines images assassine toute forme de repère dans le temps. Ainsi le narrateur nous parle d'une fellation sur des images d'un train qui passe. Le résultat est pour le moins mystérieux et trés personnel, fascinant.
On aimera ou on détestera Hooks the left. Tout dépend de quel coté on se positionne. La pixellisation aura raison de certains en quelques minutes, un mal de crâne en cadeau, et de ceux qui attendaient un contenu voyeuriste fracassant. Impossible de dicerner correctement ce que dissimule la pixellisation si ce n'est des silhouettes, des ectoplasmes de chair qui se mèlent, s'emboitent et se déboitent, s'embrassent et se positionnent. Les autres resteront fascinés comme hypnotisés une fois l'effet de surprise passé, la pixellisation faisant travailler l'imagination. L'homo-érotisme qui s'en dégage s'en trouve alors intensifié.
Réalisé sans aucun budget, Hooks to the left, s'il est au départ un véritable challenge fort risqué, prouve qu'on peut faire un film sans moyen, à la fois étrange et fascinant, superbe et créatif ou hautement detestable mais qui ne laisse pas indifférent. En ce sens, le film de Verow est un véritable petit chef d'oeuvre du cinéma expérimental.