Memories within Miss Aggie
Autres titres: Psychoses et fantasmes sexuels de Miss Aggie
Real: Gerard Damiano
Année: 1974
Origine: USA
Genre: X
Durée: 78mn
Acteurs: Deborah Ashira, Patrick L. Farelly, Kim Pope, Mary Stuart, Darby Lloyd Rains, Eric Edwards, Harry Reems, Ralph Herman, Christopher Kersen, Leo Zerba...
Résumé: Aggie, une vieille femme vivant seule dans sa ferme isolée de Pennsylvannie, raconte ses souvenirs érotiques de jeunesse à son amant lové dans son rocking chair. De la perte de sa virginité à ses diverses expériences sexuelles, on découvre le parcours d'Aggie. Mais tous ces souvenirs sont ils l'exacte vérité ou ne sont ils que les fantasmes issus du cerveau névrosé d'une femme qui a depuis longtemps perdu la raison? A moins que la vérité ne soit encore plus horrible...
Gerard Damiano est sans nul doute le réalisateur qui contribua le plus à donner au X ses lettres de noblesse en offrant quelques chef d'oeuvres prouvant ainsi qu'il était possible de marier le porno à d'autres genres de façon belle et intelligente. Malsain, glauque, pervers, scabreux voilà quelques adjectifs qui bien souvent qualifièrent son cinéma. Within the memories of Miss Aggie sans nul doute un de ses films les plus connus avec Waterpower ou Deep throat ne déroge pas à la règle même si à la brutalité des oeuvres citées plane cette fois durant tout le film un voile d'onirisme et de tristesse.
Miss Aggie est une oeuvre austère, froide qui visite les confins de la folie, embrasse les psychoses d'une femme vieillissante qui vit recluse quelque part dans une ferme isolée dans la campagne hivernale de Pennsylvanie. Déchirée entre ses fantasmes et une réalité qu'elle fuit depuis l'adolescence, elle se nourrit de ses rêves érotiques. De prime abord, Aggie est une vieille fille des plus charmantes au regard triste, perdue dans ses souvenirs de jeunesse qu'elle raconte à son amant lové dans un vieux rocking chair.
Le film se divise en trois segments soit trois histoires, trois étapes de la vie sexuelle d'Aggie.
Le premier nous montre comment Aggie a perdu sa virginité lorsqu'elle était une belle jeune fille blonde et innocente qui préparait avec amour et tendresse cet instant capital de sa vie de jeune femme. Damiano de par cette atmosphère feutrée qu'il parvient à instaurer, cette douceur et cette pureté quasi angélique qui émanent des images traduit à la perfection les attentes d'Aggie.
Le deuxième segment nous montre cette fois Aggie plus âgée, une jeune femme seule et frustrée qui vit sous le joug de sa mère. Elle vit enfermée dans sa chambre où elle se donne du plaisir à l'aide d'une poupée en plastique qui lui sert de godemichet avant de connaitre l'amour dans les bras virils d'un livreur rustre de passage à la ferme. A la beauté angélique du premier segment Damiano préfère cette fois un érotisme plus hard dénué de tout romantisme, première étape de la déchéance d'Aggie et ultime pas avant de sombrer dans la véritable pornographie sale et sordide.
Le troisième segment nous montre donc une Aggie d'âge mûre transformée en putain en rut tentant de donner du plaisir à un jeune freluquet qu'elle essaie en vain d'exciter, se déchainant sur son membre désesperemment mou. Elle n'a plus rien en commun avec la belle et romantique jeune fille du début. Elle est désormais devenue une sorte de tigresse insatiable satisfaisant ses amants d'une nuit.
C'est dans sa ferme qu'on retrouve ensuite Aggie vieillissante, le teint blême, le trait tiré, hagarde. Les souvenirs deviennent confus, tout semble s'emmeler tandis que son amant toujours lové dans son rocking chair refuse de croire à ses récits. Aggie se revoit alors inviter chez elle un beau jeune homme tombé en panne sur qui elle a jeté son dévolu. elle lui offre l'hospitalité avant de s'offrir à lui, timide mais décidée. Il est en fait le seul homme qui ait connu Aggie et le seul homme qu'elle ait aimé semble t'il. Souffrant depuis son adolescence d'une névrose qui au fil du temps s'est transformée en une sorte de folie qu'elle n'a cessé d'entretenir, Aggie s'est inventée une vie, un passé dont elle est aujourd'hui prisonnière.
Si à l'instar de son amant, on s'interroge sans cesse sur la véracité des récits d'Aggie, la preuve de sa folie nous sera donnée lors de l'extraordinaire final, innattendu ici. Damiano s'est souvenu de Psychose puisque dans un flash-back sanglant on découvrira qu'Aggie a sauvagement tué le jeune homme afin qu'il reste à jamais à ses cotés. L'occupant du rocking chair n'est rien d'autre que son affreux squelette, compagnon macabre de toute ces années de vie de réclusion.
Etonnante est aussi la partition musicale utilisée lors de ces sanglantes révélations puisque Damiano reprend le célèbre Amazing grace ce qui apporte une touche supplémentaire d'onirisme au film, tranchant fortement avec l'aspect macabre du final.
Bénéficiant d'une solide mise en scène et d'une interprétation sans reproche, Miss aggie est une fable funeste et austère, un conte atmosphérique que la beauté des décors enneigés et la musique planante viennent sublimer.
Le film, présenté jadis à Cannes, un des meilleurs opus du réalisateur, fut un de ses films les plus exploités en salles, gagnant au fil du temps ses galons d'oeuvre culte, prouvant ainsi que le X intelligemment mis en scène pouvait être un véritable genre cinématographique en lui même.