O ritual dos sadicos
Autres titres: L'éveil de la bête / O despertar da bestia / Il risveglio della bestia
Real: José Mojica Marins
Année: 1970
Origine: Brésil
Genre: Horreur / Drame
Durée: 93mn
Acteurs: José Mojica Marins, Ronaldo Assuncao, Ronaldo Beibe, Andrea Bryan, Joao Callegaro, Maurice Capovila, Carlos Vila, Ozualdo Ribeiro Candeias, Maria Cristina, Emilia Duarte, Jairo Ferreira, Jaciana Ducena, Graveto...
Résumé: Afin de prouver les effets néfastes qu'à le cinéaste José Mojica Marins sur la jeunesse et son public, quatre psychiatres débattent sur son cas et vont mettre en place des expériences sur des étudiants auxquels ils injectent du LSD afin d'étudier leurs réactions. Ils mettront ainsi en évidence les effets de la drogue sur cette jeunesse très influencée par les idées perverses du cinéaste. Puis c'est au tour de son public de le juger et prouver ou non que l'amoralité de artiste peut être dangereuse à la société.
Scénariste, acteur, réalisateur brésilien, José Mojica Marins est surtout connu dans le monde de l'exploitation et du cinéma d'horreur pour le personnage qu'il créa dans les années 60, Zé Do Caixao / Coffin Joe. S'il fut au centre d'une longue série de films souvent inégaux ouverte en 1964 avec A minuit j'emporterais ton âme cet être maléfique particulièrement subversif fut surtout à l'origine de nombreuses indignations dans son pays d'origine et souleva moult critiques négatives avant de devenir au fil du temps un personnage reconnu que de très nombreux adeptes aujourd'hui vénèrent à travers le monde.
Une longue cape noire, un chapeau haut de forme, d'interminables ongles crochus, Zé Do Caixao, en quête de la femme parfaite qui pourrait lui donner l'enfant rêvé, symbole de sa puissance et de son immortalité, est un croque-mort nihiliste, immoral, hérétique terrifiant, dont l'idéologie fit autrefois frémir le gouvernement brésilien qui censura ses films. Conscient du trouble qu'il semait, Mojica Marins eut l'idée en 1970 de faire un film dans lequel Zé Do Caixao serait jugé pas seulement par des psychanalystes mais également par le public, une sorte de tribunal populaire et médical qui devrait débattre et trancher sur le
danger que pouvait ou non représenter ce personnage diabolique sur l'inconscient collectif. Zé était il ou non responsable de la perversion d'une jeunesse qui se perdait dans une sexualité déviante et vicieuse que l'utilisation d'acides tel le LSD rendait encore plus odieuse? Tel est le thème de O ritual dos sadicos, un film qui longtemps fut décrié et interdit. Produit et réalisé en 1969, il ne fut en effet visible qu'en 1983, projeté à Sao Paulo.
Le film est scindé en deux parties. La première s'intéresse aux effets du LSD sur la sexualité d'une jeunesse très influencée par les films et les théories de Zé Do Caixao. En présence de José Mojica Marins lui même et d'un journaliste réputé, un groupe de psychanalystes
injectent donc de l'acide dans les veines de quatre étudiants volontaires et vont analyser leurs réactions afin de déterminer si oui ou non l'artiste est responsable de leur immoralité. S'ensuit un enchainement de séquences tournées en noir et blanc toutes plus sulfureuses les unes que les autres qui mettent chacune à leur manière en exergue des déviances sexuelles dont la zoophilie fait partie. A grands renforts de zooms déformants, de grand angle, d'images bizarres, Marins filme les trips sous acides de ses étudiants en pleine débauche, tous ayant des réactions différentes mêlant sexe, perversions et sadisme une fois sous l'emprise de la drogue. après quelques plans de seringues s'enfonçant dans la chair,
une étudiante fait un strip-tease devant un parterre de vieux vicieux qui l'implore d'uriner dans un pot de chambre, ce qu'elle fera avec grand plaisir. Sous l'effet de l'alcool et de la marijuana, un groupe de jeunes hommes jouent les voyeurs avec une jeune fille exhibitionniste qui les aguichent. Un garçon la rejoint et se met nu. Excités, le cerveau embrouillé par les diverses drogues et le son obsédant des tambours, ils inventent un jeu dont le but et de se se glisser sous la jupe de l'adolescente, d'arracher sa culotte avec les dents et qu'elle leur montre ses fesses pendant qu'ils font des doigts d'honneur. Un des hippies lui enfoncera ensuite un long pieu dans le vagin sous le regard concupiscent de ses
amis. La jeune fille meurt. Une torture (filmée en ombre chinoise) digne de l'Enfer de Dante clame un des psychiatres, un rituel pervers qui reflète l'immoralité d'une jeunesse frustrée. Afin d'illustrer la dégénération de l'Homme, d'autres exemples vont suivre. Un garçon fait l'amour à deux femmes tout en se faisant une injection d'acide tandis qu'un autre fait se soumettre trois prostituées. Une bourgeoise frustrée épie sa fille qui tout en fumant un joint fait de son laquais de couleur son esclave, l'obligeant à faire le chien avant de lui faire l'amour. Celui donne des envies zoophiles à sa mère qui caresse frénétiquement son poney! Un docteur tout en chair exige d'une jeune vierge, assise face à lui sur son bureau, jambes
écartées, qu'elle le regarde avaler goulument des spaghettis. Comme elle refuse d'avoir une relation sexuelle avec lui, il invite un jeune homme à venir la violer pendant qu'il les espionne par le trou de la serrure. Ainsi se clôt cette première partie riche en imagerie déviante, aussi suggérée et légère soit elle, propre à titiller les instincts "lubrico-pervers" d'un spectateur avide d'amoralités.
La deuxième partie du film s'intéresse quant à elle à Zé lui même, l'artiste, l'homme de télévision et de cinéma, jugé cette fois par les spectateurs, par son public. La question posée est de savoir si on doit laisser ou pas Zé continuer à exercer son métier et s'il a réellement
une influence néfaste sur son audience. Les avis divergent, on aime ou on déteste le personnage qui en aucun cas ne laisse indifférent mais rien ne prouve là encore que Zé soit coupable des faits reprochés. On assiste alors à un film dont il est le principal protagoniste, un film d'horreur dans la grande tradition du personnage, violent, subversif et tout spécialement misogyne. Il nous projette dans un univers satanique qui baigne dans une débauche de couleurs vertes et rouges et de fumigènes, une sorte d'inquiétante grotte dans laquelle un groupe de femmes à demi-nues sont enchainées, battues, giflées, fouettées, réduites en esclavage, totalement soumises tant sexuellement que physiquement à
l'Homme tout puissant représenté par Zé qui à travers cette nouvelle oeuvre met une fois de plus en avant ses théories sur la femme, un être inférieur qui depuis la nuit des temps est uniquement fait pour assouvir les moindres désirs de l'homme, lui obéir. L'homme a été crée pour dominer, commander, la femme pour servir et être son esclave. Rien ne devra changer jusqu'à la fin des temps. Nous ne le contredirons pas!
Fortement estampillé années 70 avec son déluge de couleurs psychédéliques et de lumières flashy, cette ultime partie portée par une bande son stridente composée quasi uniquement de cris est typique des productions érotico-horrifique de l'époque. Avec sa forte connotation sadomasochiste de pacotille, l'Enfer
de Marins, comparé ici à un long trip sous acides, ressemble à ces vieilles bandes dessinées pour adultes au milieu desquelles trônerait en maitre tout puissant Zé, triomphant, exultant, exposant avec verve ses théories misogynes qui en leur temps ont du donner bien des hauts le coeur aux féministes et autres gardiens de la bonne morale. La violence est très théâtrale, presque chorégraphiée, les effets spéciaux comme les effets sanglants sont plutôt sommaires. Comme dans la plupart des oeuvres de Mojica Marins les obsessions du cinéaste, ses cauchemars, son univers macabre, sont principalement illustrés par de longs discours, les mots sont beaucoup plus forts que les images somme
toutes assez conventionnelles. Marins c'est avant tout une atmosphère, une imagerie à laquelle on sera plus ou moins sensible, un ressenti personnel qui n'empêche pas de lui accorder les qualités qu'elle mérite ni même de reconnaitre combien la filmographie du metteur en scène put choquer remise dans le contexte de son époque.
O ritual dos sadicos possède la magie des oeuvres de son auteur même si aujourd'hui il paraitra bien gentillet dans les thèmes qu'il soulève. Réalisée avec entrain et audace par un
Marins roublard cette auto parodie sur sa propre oeuvre à polémique reste fascinante sur bien des points et devrait sans aucun doute plaire d'une part à tous les amateurs de perversion qui ne jurent que par le mot déviance sexuelle malgré le coté soft de l'ensemble si on le compare au monde de l'exploitation transalpine et ibérique des années 70, d'autre part à tous les petits misogynes qui trouveront à travers les speeches de Zé une jouissance sans limite. Les fervents admirateurs de Marins flotteront quant à eux dans leur élément.