Stridulum
Autres titres: Le visiteur maléfique / The visitor / Il visitatore
Real: Giulio Paradisi
Année: 1979
Origine: Italie
Genre: Fantastique
Durée: 104mn
Acteurs: Glenn Ford, Shelley Winters, Lance Henricksen, John Huston, Paige Conner, Franco Nero, Sam Peckinpah, Lou Walker, Steve Somers, Betty Turner, Calvin Embry, John Popwell, Weal Bortz, JA Townsend, Walter Gordon, Hsio Ho Chao...
Résumé: Quelque part en des temps immémoriaux le Bien et le Mal s'affrontait déjà dans de lointains univers. Atlanta de nos jours. Katie est une petite fille étrange. Elle serait la réincarnation du Mal dont l'objectif serait d'asservir notre monde. Un mystérieux vieil homme, Jawé, se présente comme baby-sitter. Il est en fait le messager du Bien chargé de détruire l'enfant. Katie, protégée par le Dieu oiseau Sadin, désire plus que tout un petit frère. Un soir sa mère, paralysée suite à un accident bizarre, est enlevée par d'étranges hommes qui l'inséminent tandis que les morts tombent autour de la fillette. Un immense complot triangulaire se met en place autour d'elle: une lointaine planète où vivent des extra-terrestres, émissaires du Mal, notre Terre et l'Enfer. Les forces du Bien et du Mal vont alors s'affronter avec au coeur de cet impitoyable combat Katie et sa mère.
Il est des films dont il est difficile de parler mais qu'on souhaite pourtant faire découvrir tant ils demeurent des cas isolés. Stridulum fait partie de ceux ci.
Véritable OVNI et le terme est ici des mieux adaptés dans le ciel du cinéma de genre transalpin, Stridulum vit le jour après que Ovidio Assonitis, le producteur, ait vu Rencontres du 3ème type qui fit naitre en lui bien des interrogations qu'il tente de développer ici. Le film est en fait un étonnant et improbable mélange de La malédiction, L'exorciste, Rencontres du 3ème type et Les oiseaux dont l'intrigue repose sur l'éternel combat du Bien et du Mal sur Terre.
Réalisé par Giulio Paradisi, metteur en scène spécialisé essentiellement dans la réalisation de spots publicitaires, Stridulum est une œuvre déroutante bien difficile à résumer tant l'histoire se perd dans un ésotérisme des plus confus à force de vouloir trop soulever de thèmes et sous thèmes. Le film débute par une séquence visuellement magnifique où, sur une lointaine planète, s'affronte le Bien sous les traits d'un vieil homme habillé d'une bure et le Mal, sombre silhouette qui prendra la forme d'une enfant. Paradisi nous emmène alors quelque part aux confins de l'univers (le Paradis?) où Jesus ou sa personnification conte à des enfants-bonzes l'histoire de ce douloureux combat. L'arrivée du vieil homme permet à Paradisi de nous ramener sur Terre, à Atlanta, pour nous faire faire la connaissance de
Katie, une petite fille aux pouvoirs diaboliques dont l'objectif est de faire triompher le Mal sur Terre. Tout se complique lorsqu'on apprend qu'une secte internationale a décidé de féconder sa mère afin qu'elle porte l'enfant du Démon. Encore plus délirant, Assonitis fait d'un peuple d'extra-terrestres les émissaires du Mal. Stridulum se transforme alors en une gigantesque conspiration triangulaire entre un monde extra-terrestre, l'Enfer et notre planète que tente de sauver le vieil homme, Jawé (Jahvé), qui se présente comme baby-sitter de l'enfant protégée par Sadin (Satan), le dieu oiseau. Les personnages eux mêmes se jouent des apparences et les masques, démoniaques ou non, tomberont en fin de film lors de l'époustouflant et apocalyptique final.
A l'instar de Chi sei / Le démon aux tripes avec lequel il entretient quelques points communs, Stridulum est une troublante métaphore où se mélangent les dimensions à la différence près qu'ici il n'y pas uniquement un espace réservé au Mal mais plusieurs dont un pour Dieu quelque soit l'appellation qu'on donne à toute personnification des forces du Bien. D'intéressantes questions sont ici soulevées dont l'évocation d'un éventuel Paradis et d'un supposé Enfer qui seraient en réalité des univers extra-terrestres comme certains écrits le suggéreraient. Leurs représentants se livreraient à leur guerre sur de lointaines planètes depuis l'aube des temps.
Dommage que tout cela soit ici si confus et trop hermétique par conséquent plutôt indigeste. Assonitis semble vouloir manger à tous les râteliers sans vraiment apporter de réponse aux hypothèses qu'il émet. En sort un film souvent difficile, énigmatique, mystique, bizarre mais pourtant fascinant. Car Stridulum est avant tout un film non seulement superbe visuellement mais également un film qui fait peur comme l'écrivaient jadis les critiques italiennes. La scène où la mère après avoir été enlevée se fait artificiellement inséminer par les sbires du Mal quelque part dans un camion surgit de la nuit tel un vaisseau spatial, la mort de Glenn Ford sauvagement attaqué dans sa voiture par un redoutable oiseau et le final qui verra des milliers de volatiles détruire l'Enfant dans un chaos total sont autant de moments de pure peur dont l'apothéose est la séquence où la petite fille fait du patin à glace dans une patinoire. Elle restera un moment d'anthologie, une réussite effroyable où dans une valse frénétique l'enfant démoniaque tuera tous ses partenaires dans un tourbillon de fureur sidérant.
A ces instants s'ajoutent la beauté de certaines scènes aux limites de l'onirisme telle l'ouverture du film où sur une Terre étrangère semblable à celle des nains imaginée la même année par Coscarelli pour Phantasm, se rencontrent le vieil homme et l'enfant. On restera béat face à la fluidité de la caméra qui donne l'impression de glisser, de voler jusqu'à parfois donner une étonnante sensation de vertige et ainsi créer une dimension de terreur viscérale.
L'interprétation est à la limite de la perfection, une palme d'honneur à la petite Paige Conner dont ce fut la seule véritable prestation pour le grand écran qui incarne une enfant diabolique effrayante et particulièrement investie par son personnage. A ses cotés, une distribution quasi stellaire puisqu'on reconnaitra tous plus excellents les uns que les autres Glenn Ford, Mel Ferrer, Shelley Winters, Sam Peckinpah, John Huston, Lance Henricksen et Franco Nero méconnaissable dans la peau d'un Jesus Christ décoloré. Franco alors exilé à Los Angeles demanda personnellement à Assonitis de lui écrire un rôle mais de ne pas apparaître au générique.
Enfin on saluera la très belle et efficace partition musicale signée Franco Micalizzi.
Stridulum, titre indéfinissable qui fait référence au cri strident des oiseaux (c'est également le mot que scande l'oiseau de bois, effigie du Dieu-oiseau maléfique, de l'enfant lorsque Glenn ford s'en empare) mais surtout imposé par les producteurs italiens désireux de trouver un titre étrange qui fasse penser aux œuvres de Dario Argento, est une curiosité aux pouvoirs attractifs puissants, une vision dense et violente souvent effrayante où se conjuguent mysticisme religieux et science-fiction qui ne laissera pas le spectateur indifférent. Bien au contraire. Un goût étrange le poursuivra bien après que le mot Fin soit tombé, interloqué par l'aspect mystique de ce délire ésotérique et le fabuleux vertige qu'il engendre.