Sesso delirio
Autres titres: Grida di estasi / Cries of Ecstasy / Blows of death / L'urlo in gola
Real: Antony Weber
Année: 1972-1973 (?)
Origine: Italie
Genre: Post nuke
Durée: 75mn
Acteurs: Dianne Bishop, Michael Abbott, John Martin, Sandra Carey, Sherri Mason, Clayborne Whitcomb, Dede Diaz, Ushi Digard, Kim Lu, Steve Bennett, David Silverman, Sidney Olivetti, Leo Tio...
Résumé: 2080 - La Terre huit ans après l'holocauste nucléaire. Les survivants doivent porter des masques à gaz et vivent désormais en trois différents clans dans des déserts arides. Chacun des clans est habillé de vêtements aux couleurs spécifiques et aucun ne doit se mélanger sous peine de mise à mort immédiate. Ils vivent sous des dômes translucides dans lesquels ils passent leur temps à faire l'amour alors que des bandes de motards sillonnent le désert, violent et tuent les membres des deux autres clans. Pourtant certains bravent les ordres afin de copuler avec les habitants des autres dômes...
Voilà bien un des films les plus mystérieux que l'Italie ait alors produit, si mystérieux qu'il est difficile d'en trouver trace et même ignoré de la filmographie de Lorenzo Onorati dans l'incontournable Imdb si toutefois le film fut bien réalisé par le metteur en scène lui même. Le doute subsiste encore aujourd'hui dans bon nombre d'esprits tant et si bien que la paternité du film demeure à leurs yeux trouble. Levons aujourd'hui le voile sur cette énigme. Si beaucoup attribuent Sesso delirio à Onorati c'est en raison du pseudonyme sous lequel il signa la majorité de ses films, Lawrence Webber. En fait le film fut réalisé par l'américain Antony Weber un énigmatique réalisateur spécialisé dans les petites productions pornographiques. Assez prolifiques au début des années 70, il en tourna toute une série avec comme actrice fétiche Sandra Carey également au générique de Sesso delirio.
Sesso delirio qui aurait été réalisé approximativement entre 1972 et 1973 est une des oeuvres les plus étranges du cinéma d'exploitation américain d'alors puisqu'il tente de croiser un sous genre assez en vogue depuis la sortie de quelques films d'anticipation et de science-fiction dite écologique, à savoir le film post-apocalytique, et le softcore, un mariage alors inédit mais O combien surprenant voire fascinant.
Totalement inédit si on passe sur l'existence d'une rarissime vidéo italienne de piètre qualité, cette petite bande surgi de nulle part connue aussi sous le titre Cries of ecstasy / Grida di estasi vaut essentiellement non pas pour ses qualités mais pour son étrangeté. Première surprise est le double générique qui ouvre le film.
Celui débute en effet sur un premier générique qui donne au film le titre Grida di estasi durant lequel on assiste durant près de 10 minutes à de longues palabres entre des chefs militaires entrecoupées de quelques séquences où des hommes revêtus de combinaisons de décontamination et au visage recouvert de masque à gaz déambulent ça et là avant qu'un énorme champignon nucléaire ne ravage notre planète. Un deuxième générique apparait alors donnant au film un autre titre: Sesso delirio. Commence dés cet instant le véritable métrage de Antony Weber soit 60 minutes bizarres comme le cinéma d'exploitation d'alors en avait rarement engendré.
En effet, l'ouverture du film n'est jamais qu'une récupération de scènes empruntées à The crazies de Romero assemblées entre elles avant d'y intégrer outre le sempiternel champignon nucléaire récurrent à tous les films post-apocalyptiques tout un éventail d'images d'archives en N/B de terres ravagées, de villes détruites, de décombres lugubres, de charniers particulièrement surprenantes cette fois créant une atmosphère un brin suffocante, aidée par une musique assourdissante, qui ne s'estompera plus puisqu'elle perdurera durant toute la seconde partie réalisée par Weber plaisamment nommée Sesso delirio.
Dès lors commence un étrange film dénué de tout véritable scénario qui s'ouvre sur une séquence de viol en plein désert. Une bande de motards attaquent deux jeunes femmes dont ils vont abuser avant de leur trancher la gorge. Une voix-off nous explique de façon lugubre que désormais les survivants de l'holocauste sont répartis en plusieurs clans chacun habillé d'une toge à la couleur spécifique: rouge, verte et jaune. Aucun ne doit se mélanger sous peine de mise à mort immédiate. Un seul point commun les relie: tous doivent porter un masque à gaz afin d'éviter de respirer les radiations nocives qui ont pollué notre air. Si les motards, cruels, sillonnent le désert, les deux autres clans vivent dans des dômes translucides qui se dressent au milieu des étendues arides sous lesquels ils passent leur temps à faire l'amour.
Voilà une des premières originalités du film, ces curieux dômes transparents qui non seulement rappellera à l'amateur une certaine science-fiction toute droite surgi des années 70 mais donnent également au film une note futuriste des plus agréables. A l'intérieur de ceux ci, les survivants s'adonnent aux joies du sexe dans des décors plastiques aux dominantes rouges et jaunes, les parois cristallines donnant vue sur des déserts sans fin sur lesquels courent de longs cylindres noirs qui servent à filtrer le peu d'eau encore potable.
Ce coté très étrange est appuyé par une bande son composite faite essentiellement du souffle du vent, de battements de coeur et de gémissements étouffés qui par instant fait ressembler Sesso delirio à un film expérimental, une impression renforcée par le grain et la surexposition de l'image. Les séquences de sexe sont quant à elles accompagnées par un air de piano qui ramène directement aux bons vieux films muets d'antan.
Parsemé de quelques légers plans sanglants, il ne faut pourtant pas attendre de Sesso delirio un véritable hardcore sur fond de monde post holocauste. Il s'agit plutôt d'un softcore du moins dans la version telle qu'on la connait. Les séquences de sexe, ébats à deux ou scènes d'orgie, restent toutes fort sages ce qui pourra en frustrer plus d'un. Si on appréciera bon nombre de nus féminins frontaux on regrettera par contre l'absence de tout plan de nus frontaux masculins. La question est de savoir s'il existe une version hardcore du film, quelques scènes d'ébats semblant par instant volontairement mutilées. Le film fut semble t-il distribué en salles en Italie dans les années 90 sous le titre L'urlo in gola avec cette fois des séquences pornographiques. Reste à savoir s'il s'agissait de simples inserts rajoutés pour l'occasion ou d'une version intégrale du film. Nous dirons simplement qu'il s'agit d'UNE version X et non pas de LA version X puisque en effet l'omniprésente Marina Frajese apparaitrait au détour de certaines scènes.
Véritable expérience pour l'amateur, étonnante surprise pour les afficionados de post-nuke, Sesso delirio est une sorte d'OVNI dans le ciel du cinéma de genre, une fort plaisante découverte qui devrait en séduire voire en fasciner plus d'un. Tout précaire et fauché soit il, il se dégage du film de Antony Weber quelque chose d'à la fois fascinant et oppressant, une sorte de doux malaise, mélange de ludisme et de folie pure. Voilà un pur gemme pour l'amateur de bizarreries transalpines.
On reconnaitra parmi les comédiens aux noms tous bien américains (pseudonymes?) confirmant ainsi les réelles origines du film deux habituées des productions érotiques et pornographiques des années 70 et 80: la suédoise Ushi Digard et bien sûr Sandy Carey, la comédienne fétiche du metteur en scène.