Ronda nocturna
Autres titres: Ronde de nuit / Night watch
Real: Edgardo Cozarinsky
Année: 2005
Origine: Argentine
Genre: Drame
Durée: 81mn
Acteurs: Gonzalo Heredia, Rafael Ferro, Dario Tripicchio, Gregory Dayton, Roman Chaplovski, Diego Cunill, Mariana Angilheri, Susana Varela, Diego Trerotola, Jana Bokova, David Solona, Marcello Iglesias, Milita Brandon, Maria Bulacio, Vero, Loana, Bianca, Lorena, Christian Pereira, Jeronimo Vargas, Hernan Buffa, Kyrylo Morekhodov, Horacio Guisados, Horacio Derron,...
Résumé: Victor a 20 ans. Il se prostitue et vend de l'herbe la nuit dans les rues de Buenos Aires et les quartiers gay de Santa Fe. En cette soirée du 1er novembre, il nous entraîne dans un voyage au bout de la nuit durant lequel il va rencontrer quelques uns de ses amis qui disparaitront tour à tour, vend son corps dans différents endroits, d'hôtels de luxe en salles de sport en passant par les bas-fonds de la capitale. Plus la nuit avance, plus Victor se sent menacé par d'invisibles spectres tandis que les affres de son passé resurgissent. Sera t'il toujours vivant lorsque poindra l'aube?
Installé en France depuis quelques années déjà, le réalisateur argentin Edgardo Cozarinsky, exilé politique, nous propose avec Ronde de nuit un voyage au coeur des nuits de Buenos Aires à travers les errances nocturnes d'un jeune prostitué et dealer de 20 ans, Victor. Ronde de nuit est en fait une sorte d'exploration des différentes facettes des nuits de la capitale argentine, un éventail assez large de la misère tant sentimentale que matérielle mais également des peurs, des menaces qui semblent se terrer derrière le voile obscur de la nuit. Mais au bout du compte, par le biais de ce voyage de nuit le film de Cozarinsky est surtout une illustration des recoins les plus sombres de l'âme humaine.
Au gré de ses rencontres, de ses ébats, Victor erre, se promène, témoin insouciant et innocent, dans les rues de Buenos aires, dans le quartier gay de Santa Fe qui offrent une vision totalement différente de celle que la ville peut donner de jour. C'est une toute autre vie, une toute autre faune, d'autres repères et surtout d'autres préoccupations, d'autres peurs qui semblent poindre. Tant le centre ville, brillamment éclairé de ses néons d'or, que les quartiers frontaliers et banlieues plus sombres et miséreuses offrent leurs plaisirs, leurs mystères, leurs angoisses et terreurs tandis que les menaces invisibles semblent envahir aussi bien les rues que traversent le jeune homme que Victor lui même.
Plus la nuit avance, et ce n'est pas un hasard si le réalisateur a choisi le nuit du 1er au 2 novembre pour situer son film, plus la mort semble rôder, vouloir s'emparer de Victor tant et si bien que Ronde de nuit se transforme dans sa deuxième partie en un voyage surréaliste où la frontière ténue entre le rêve, l'imagination et la réalité se confondent, un parcours où Victor semble devoir lutter pour rester en vie, échapper aux griffes de la nuit afin d'attendre et d'atteindre l'aube salvatrice alors que les affres de son passé resurgissent et le déchirent.
Cozarinsky a su magnifiquement mettre en scène la nuit et les spectres qu'elle dissimule, capter cette ambiance si particulière qui lui est propre, mettre progressivement en avant toutes les peurs et angoisses qu'elle engendre
chez l'Homme, ses peurs souvent indissociables de la mort qu'abritent notre inconscient jusqu'à créer dans la toute dernière partie du film une véritable atmosphère d'oppression où visions et réalité se mélangent de façon effrayante.
Ronde de nuit est également un tour d'horizon des nuits chaudes de Buenos Aires durant lequel le réalisateur nous offre de très jolies séquences d'un homo-érotisme remarquable notamment une scène de douche dans une salle de sport hi-tech qui sert de lieu de rendez-vous pour jeunes prostitués et une magnifique scène d'amour entre Victor et son ami dans un hôtel de luxe.
Comment ne pas résister au charme foudroyant de Victor interprété avec une désinvolture désarmante par le jeune hidalgo Gonzalo Heredia, célèbre acteur argentin qui a fait sa carrière à la télévision, qui nous offre son corps et sa nudité avec grande aisance, désiré et désirable. On ne résistera pas non plus à la beauté du jeune Dario Tripicchio ni à toute cette faune nocturne latine faite de prostitués, travestis et autres transsexuels déambulant seuls ou en groupes sous les yeux de clients libidineux.
Bénéficiant d'une très agréable partition musicale et d'une sublime photographie qui sait mettre en valeur les décors électriques de la capitale et ses bas fonds, Ronda nocturna est un périple captivant, une sorte de fantasmagorie gay dense et originale qui devrait séduire tous ceux que la nuit et son milieu fascinent et effraient.
Le film de Edgardo Cozarinsky est une preuve de plus que le cinéma gay sud-américain est particulièrement riche et surtout hautement intéressant, souvent insolite et sombre. Voilà qui incite encore davantage à le découvrir.