Wrecked
Autres titres: Défoncés
Real: Bernard et Harry Shumanski
Année: 2009
Origine: USA
Genre: Drame
Durée: 73mn
Acteurs: Theo Montgomery, Benji Crisnis, Peter Petersen, Forth Ricahrds, Womack Daryl, Beatrice Carina, Heidi Glissenbach, Garett Dragovitz...
Résumé: Ryan a 18 ans. Il souhaite devenir comédien et suit assidument des cours de comédie. Un jour son ex, Daniel, revient vers lui. Ryan accepte de l'héberger s'il trouve du travail mais surtout arrête la drogue. Malheureusement Daniel va profiter de la gentillesse de Ryan et lui mentir. Son addiction au sexe et aux drogues dures ne fait qu'empirer. Las, Ryan va tenter de l'en sortir alors que Daniel le retient par le sexe. Ses efforts seront vains et lentement Ryan va tout perdre alors que son ami l'entraine avec lui dans la spirale infernale...
Premier film des frères Bernard et Harry Shumanski, Wrecked intelligemment retitré pour sa sortie en France Défoncés est une oeuvre indépendante étonnante qui risque de surprendre le spectateur tant par ses qualités que par ses défauts inhérents à tout premier film souffrant de plus est d'un budget plutôt miséreux.
Wrecked nous entraine dans la spirale infernale du sexe à outrance et des drogues dures que va connaitre bien malgré lui Ryan, un jeune garçon de 18 ans qui tente tant bien que mal de percer dans le monde du théatre. Aprés avoir accepté d'héberger Daniel, son ex, à la condition sine qua non qu'il trouve du travail et arrête les stupéfiants, sa vie va lentement se dégrader jusqu'au point de non retour.
Wrecked se veut une sorte de tranche de vie de trois adolescents que suit une caméra au quotidien. Il en ressort une forme de film-réalité parfois maladroit accentué par l'instabilité de l'image dûe aux différentes caméra utilisées: caméra video, caméra à la main... Une fois cela accepté et passé outre l'étonnement, Wrecked séduit trés vite par la sincérité de son propos et le naturel des jeunes acteurs tous non professionnels.
Wrecked n'est jamais qu'une fois de plus l'illustration d'un amour illusoire et impossible entre un jeune garçon sain et plein de volonté et son amant totalement dépendant à la drogue et au sexe montré lui aussi comme une addiction. C'est la lutte finalement vaine de Ryan contre les démons de Daniel qui inexorablemement vont le détruire, le menant à sa propre perte.
Si le propos n'est pas nouveau et qu'il rapelle sur certains points F. est un salaud de Marcel Gisler, Wrecked fera également songer à Shortbus voire à certains films de Larry Clarke notamment Ken park non seulement pour ses comédiens et son coté réaliste mais pour l'audace de ses scènes de sexe toute plus explicites les unes que les autres. Non simulées pour la plupart, elles avoisinent souvent le hardcore sans jamais être vulgaires ou sales bien au contraire. Elles contribuent soit à la beauté et la sensibilité de l'histoire soit à son coté misérabiliste. Wrecked nous gratifie ainsi d'une magnifique scène de triolisme, à la fois belle et tragique, particulièrement osée mais toute empreinte d'un étonnant charme homo-érotique. Jamais réellement pornographiques, elles aident beaucoup à donner force et crédibilité tant aux personnages qu'au film lui même. Elles ne sont jamais que le reflet du quotidien de ces garçons perdus.
Si la première partie de Wrecked est plutôt maladroite, presque amateur, dés la deuxième partie le film gagne en maturité jusqu'au dénouement aussi dramatique que déroutant tant il tranche d'avec le ton général du film. Longtemps aprés que le mot Fin soit apparu sur l'écran, le spectateur gardera un goût amer tant ces ultimes images sont bouleversantes et superbement filmées, quasi surréalistes, comme si tout cela n'avait été qu'un cauchemar malheureusement trop réel.
Peut être ce déséquilibre est il voulu, illustration du cheminement cahotique des différents protagonistes, plus précisément celui de Ryan qui en peu de temps doit passer du stade de jeune homme insouciant à celui d'adulte afin d'assurer outre une certaine stabilité dans sa vie amoureuse mais également de pouvoir se battre pour ses rêves et son avenir professionnel. Au même titre toutes les séquences où apparait Ryan sont brillantes, colorées, remplies d'un certain optimisme alors que celles où apparait Daniel sont ternes et sombres, remplies de désespoir. Les incessants changements de caméra quant à eux apportent une certaine épaisseur aux personnages et ajoutent à la confusion dans laquelle ils vivent.
Les Shumanski dépeignent un univers empoisonné controlé par la drogue et le sexe. Ce dernier s'il est dépeint comme une drogue dont ne peut se passer Daniel comme les rails de coke, l'ecstasy et autres pilules qu'avale par poignées le jeune homme, il est aussi une sorte d'arme. C'est par le sexe qu'il retient à chaque fois Ryan dans les pires moments de doute ou de désarroi mais c'est aussi une arme dont on se sert pour éviter d'affronter les véritables problèmes. L'addiction est d'autant plus dangereuse et c'est dans le sexe que Ryan noiera son désespoir et l'effondrement de sa vie avant de la perdre définitivement lors de sa première prise de cocaine.
Tourné pour quelques dollars seulement, Wrecked souffre de son micro-budget sans pour autant que le film en patisse réellement. Les décors se limitent à l'appartement de Ryan, la salle de répétition et une chambre d'hotel tandis qu'on pourra repérer facilement toutes les erreurs de montage et les faux raccords qui parsèment le film. Les lumières et vêtements changent selon les plans, on tente de dissimuler une fenêtre, un mur avec un simple drap mais ces erreurs donnent un certain charme maladroit à l'ensemble.
Le naturel et le charme des jeunes acteurs amateurs apportent la touche finale à l'émotion que Wrecked tente avec succès de dégager. Il est dur en effet de résister au charme homo-érotique que chacun d'eux dégage, particulièrement mis en valeur lors des scènes de sexe. Il est dommage que les Shumanski n'aient pas souhaité plus développer leurs rôles ce qui les aurait fait beaucoup gagner sur le plan psychologique.
Rythmé par une partition musicale par moment obsédante, Wrecked est une tragique illustration d'un amour impossible ruiné par la drogue, celle d'un univers où le sexe est une sorte de moteur comme bien souvent dans le milieu gay. Les Shumanski signent là un premier film fort qui leur laisse présager espérons le du moins une carrière prometteuse.