Il mostro dell'opera
Autres titres: L'orgie des vampires / The monster of the opera
Réal: Renato Polselli
Année: 1961
Origine: Italie
Genre: Epouvante
Durée: 85mn
Acteurs: Giuseppe Addobbati, Marco Mariani, Barbara Hawards, Alberto Archetti, Carla Cavalli, Aldo Nicodemi, Jody Excell, George Arms, Gaby Black, Romy von Simon, Erich Schonbrunner, Christine Martin, Liz Poitel, Milena Vukotic, Olga Jala, Maureen Verrich, Elyane Pade, Renato Montalbano, Vittoria Prada, Fidel Gonzáles, Walter Brandi...
Résumé: Une troupe de comédiens répète son prochain spectacle dans un théâtre abandonné depuis des lustres et ce sans tenir compte des mises en garde du vieux gardien. Très vite la peur s'empare des comédiens notamment de Giulia qui semble connaitre ces lieux. Elle serait la réincarnation de la jeune fille qu'un homme devenu aujourd'hui vampire par sa faute a éperdument aimé jadis...
Riccardo Freda allait en 1957 ouvrir la voie à un tout nouveau filon du cinéma d'épouvante, l'épouvante gothique à l'italienne, lorsqu'il réalisa I vampiri / Les vampires suivi de près par les premières oeuvres de la célèbre firme anglaise Hammer. Historiquement parlant c'est cependant à un autre italien, Renato Polselli, qu'on doit le premier véritable film de ce nouveau style, L'amante del vampiro, suivi de très près par Des filles pour le vampire / L'ultima preda del vampiro de Piero Regnoli. Un an après L'amante del vampiro Polselli signait un second film d'épouvante gothique, très proche de son premier essai, Il mostro
dell'opera stupidement retitré à l'occasion de sa sortie française L'orgie des vampires qui ne sortira à la sauvette que quatre ans plus tard en Italie suite à des soucis financiers et huit ans plus tard en France.
Giulia, une jeune femme en nuisette, est poursuivie par un homme inquiétant dans la crypte d'un château. Il tente de la tuer à l'aide d’une fourche. Elle s'échappe mais elle est rattrapée par son persécuteur qui la mord violemment au cou. Ce n’était qu’un cauchemar. Giulia, danseuse dans une troupe de théâtre, se réveille, affolée. Sandro, le directeur et metteur en scène de la prochaine pièce que la troupe doit jouer, loue pour les répétitions un théâtre
abandonné réputé maudit. Bien des femmes y auraient mystérieusement disparu autrefois. Malgré les mises en garde du gardien la troupe s’installe et commence à travailler mais les jeunes danseuses se sentent espionnées. Giulia s'égare dans les couloirs de l'opéra et rencontre un vieil homme qui l'effraie. Ses cris alertent la troupe. Elle ignore pourquoi mais l'homme ne lui ait pas inconnu mais il lui est impossible de dire pourquoi. Entre alors en scène un homme étrange qui sème la panique au sein des comédiens. C'est en fait un vampire répondant au nom de Stefano. Il attire Giulia et l'entraine dans les sous sol du théâtre pour la vampiriser. Elle est la réincarnation de Laura, celle qu'il aima jadis à la folie,
responsable de la malédiction qui pèse désormais sur lui...
L'amante del vampiro avait pour seule véritable originalité scénaristique d'avoir tenté de moderniser le mythe du vampire en transposant l'histoire de nos jours, un essai marqué par la présence d'une troupe de jeunes et jolies danseuses aux formes généreuses, un ballet contemporain venu répéter son prochain spectacle. Sur ce contexte moderne se greffaient tous les éléments propre à l'épouvante gothique comme ce château lugubre avec ses cryptes et ses couloirs, cette campagne peu rassurante et ces nuits d'orage, des ombres menaçantes et des cochers fous, sans oublier crucifix, gousses d'ail, tombes et canines
acérées. Polselli pimentait la légèreté de l'ensemble en y ajoutant une romance édulcorée entre deux tourtereaux sur le point de se marier et surtout un zeste d'érotisme plutôt osé pour l'époque par le biais des poses lascives et suggestives des danseuses, les gros plans sur les petites culottes des danseuses et les scènes de vampirisation indéniablement saphiques. Avec Il mostro dell'opera il reprend exactement le même schéma avec encore moins d'originalité peut-être parce que cette seconde bande lui fut commandée par un aristocrate décadent, grand admirateur du premier volet, qui voulut faire un film calqué sur le précédent. Ce deuxième film toujours écrit par Ernesto Gastaldi qui
s'inspire ici de Dracula, du Fantôme de l'opéra et de Dorian Gray (la destruction du portrait par le feu pour mettre fin à la malédiction) n'est donc qu'un simple copier-coller du premier où il ne change que quelques points du scénario. Ce n'est plus un ballet de danseuses venu répéter son spectacle cette fois mais une troupe de comédiens de théâtre qui répète sa prochaine pièce non pas dans un château mais un vieil opéra abandonné depuis des années où se terrent un vieil homme et bien sûr un vampire. L'opéra abandonné offre autant de couloirs, pièces, chambres d'accessoires, sous-sols angoissants que le château du premier opus. L'érotisme est toujours présent, tout aussi sulfureux, cette fois une des
comédiennes est ouvertement lesbienne et les tentatives de séduction de plus en plus ostentatoires.
La recette reste donc inchangée mais force est de reconnaitre qu'elle fonctionne un peu moins bien cette fois faute à une réalisation peu inventive et une trame narrative trop lente, bien trop lente. Après une ouverture fort appétissante et onirique qui laissait augurer du meilleur, la traque d'une donzelle en nuisette dans la crypte de l'opéra par le vampire armé d'une fourche, il ne se passe quasiment plus rien durant les trois-quart du film si bien que l'ennui prend vite possession du spectateur. Polselli se contente de multiplier les scènes de
répétition de la pièce, les séquences de danse et de longues scènes de bavardages entre les protagonistes que viennent tout juste pimenter quelques pointes d'épouvante disséminées ça et là souvent noyées dans une ambiance joyeuse, décontractée de mauvais aloi. Peu efficace pour provoquer quelques petits frissons. C'est bien dommage car tous les éléments étaient présents pour donner vie à un sympathique petit film de vampires gothique doucettement effrayant.
Ce qui sauve en fait L'orgie des vampires (il n'y aucune orgie bien sûr, le titre était surtout commercialement judicieux) c'est outre son noir et blanc magnifique la beauté de certaines
séquences, le prologue bien entendu mais surtout la plupart des scènes finales reléguées pour la plupart lors des vingt dernières minutes. Le ballet frénétique ordonné par le vampire (les comédiens se mettent à danser jusqu'à l'épuisement derrière un mur invisible), les quelques tentatives d'étreintes saphiques lascives, les plans embrumés, les meurtres à coups de fourche, le ballet des squelettes sans oublier le flashback qui narre l'histoire de notre vampire et de sa malédiction, pas forcément réussi mais fonctionnel, et surtout l'attaque de l'héroïne par une horde de femmes-vampires à demi nues et enchainées. On retrouve aussi lors de cette ultime partie la future folie, cette absence de toute logique et cet
imaginaire délirant qui durant tout le restant de sa carrière sera la marque de fabrique de Polselli. C'est bel et bien ces éléments qui donnent au film tout son intérêt. On retiendra également l'interprétation de Giuseppe Addobbati dans le rôle du vampire qui empreinte sa gestuelle et ses grimaces à Christopher Lee. Il parvient à être crédible et même par moment à impressionner en exagérant le jeu. Le reste de la distribution n'a rien d'exceptionnel. Chacun fait son travail. Ni plus ni moins. La plupart des actrices sont de parfaites (mais belles) inconnues qui disparurent comme elles étaient arrivées sur le plateau, certaines ayant tout de même encore travaillé pour Polselli sur ou deux autres films,
à l'exception de Milena Vukotic qui connut une longue carrière par la suite.
Ce mélange de mythes n'est pas à proprement parler un vrai film de vampires dans le sens où Stefano est sous l'emprise d'une malédiction qui l'a conduit à devenir une créature de la nuit immortelle, on est plus dans le domaine de la réincarnation ici même si Poselli joue avec les règles et les légendes à sa manière, c'est à dire dans un joli fatras qu'il explique sans grande crédibilité. L'orgie des vampires est une sarabande joyeuse, allègre, jamais effrayante, une danse endiablée où on trouve un peu tout et n'importe quoi qui se laisse voir essentiellement pour les scènes citées, sa touche de poésie et son coté un peu fou, autrement dit polsellien. Le film fut très longtemps invisible ce qui en fit un objet de collection aux yeux des amateurs du genre jusqu'à ce qu'il réapparaisse et soit réhabilité grâce à ses éditions DVD tant italiennes que françaises éditées il y a maintenant quelques années.