Endgame
Autres titres: Cercle vicieux
Real: Gary Wicks
Année: 2001
Origine: Angleterre
Genre: Thriller
Durée: 110mn
Acteurs: Daniel Newman, John Benfield, Corey Johnson, Toni Barry, Mark McGann, Adam Allfrey, Darren Bancroft, Julius D'Silva, Philip Manikum, Alain Bourgoin, Ben McLeod, Perry Banks, Rachel Izen...
Résumé: Tom vit de la prostitution. C'est un rent boy, un garçon à louer. Grâce à cela, il peut louer un luxueux lotf à Londres. Son principal client, Norris, est un quadragénaire violent pour qui il n'est qu'un simple objet de chair avec lequel il assouvit ses pulsions les plus abjectes. Il nourrit pour l'adolescent une fascination quasi obsessionnelle. Pourtant entre eux existe une sorte de relation ambigüe faite de plaisir et de dégout. Une nuit, las des crises de violence de Norris, Tom le tue. Le jeune homme demande à ses voisins, un couple en pleine crise relationnelle, de l'aider à échapper à la police. Ils l'emmènent dans leur cottage perdu dans la campagne anglaise. Malheureusement l'inspecteur chargé de l'enquête est un client de Tom. Lorsqu'il découvre que l'adolescent filmait tous ses ébats, il est décidé à le retrouver coute que coute pour détruire les bandes et le tuer. Une traque sanglante commence alors...
Seul et unique long métrage du producteur scénariste Gary Wicks, Endgame diffère quelque peu de la production underground gay non seulement de par son budget qu'on devine coquet mais également de par la maitrise de son scénario et de sa mise en scène, tranchante, acérée à l'image de la violence de son propos.
Endgame sorti en France sous le titre Cercle vicieux est un pur thriller qui nous plonge dans l'univers impitoyable de la prostitution adolescente, du sadomasochisme et de la corruption. On suit la lente descente aux enfers d'un jeune garçon de 20 ans, Tom, un rent boy, un garçon à louer qui par la prostitution peut se permettre d'habiter un loft hi-tech luxueux. Son principal client, Norris, est un quadragénaire, un père de famille qui cache derrière cette apparence d'homme d'affaires irréprochable un être odieux et pervers à la sexualité violente. Il tient Tom sous sa coupe, il est son jouet, sa poupée de chair avec laquelle il assouvit ses fantasmes les plus abjects et fait chanter. Il n'accepte pas que quelqu'un d'autre puisse le toucher ou l'approcher hormis les riches notables londoniens à qui il le prête. Un soir, Tom, las de sa jalousie obsessionnelle, s'oppose à lui alors qu'il tentait de le violer et le tue. Commence alors pour Tom une longue cavale en compagnie d'un couple dont il était devenu l'ami en sachant pertinemment que l'inspecteur qui le traque fut un de ses clients. Impitoyable, le flic corrompu va tout mettre en oeuvre pour le retrouver puisque Tom possède l'enregistrement vidéo de leurs relations interdites.
Situé à Londres, le film est à l'image de la ville, sombre, noir, désespéré. Wicks dépeint un monde où le sexe est une monnaie, les jeunes prostitués des jouets tenus en laisse dont on use et abuse de la façon la plus vile, des esclaves dénués d'âme avec lesquels les notables satisfont leurs pulsions les plus perverses. Cercle vicieux est aussi le portrait d'un jeune garçon dont la beauté est un gagne-pain mais elle est surtout un redoutable fardeau qui depuis sa plus tendre enfance ne lui a apporté que des malheurs. Par le biais de flashes-back bucoliques qui tranchent avec le ton général de l'ensemble on apprend que Tom fut la victime d'un beau-père pédophile. Wicks en profite donc pour aborder ce douloureux sujet et l'insérer dans une histoire qui n'est jamais qu'un aller sans retour au bout de l'enfer. On pourra regretter qu'une fois de plus le réalisateur semble faire un raccourci plutôt dangereux en associant pédophilie et homosexualité puisqu'il est évident que Tom a choisi la prostitution et par conséquent est devenu homosexuel suite aux abus dont il fut victime.
Comme si cela ne suffisait pas, Wicks fait de tout ses personnages des êtres ignominieux, nauséeux, des notables sous coke, vicieux, dépravés, corrompus et bien cyniquement homophobes qui la nuit écument les clubs gays pour terroriser leurs gérants et accessoirement les torturer pour mieux les intimider. Et l'aide ne viendra guère de la police puisque leur chef en fait partie. En ce sens, l'inspecteur Dunston est un véritable cauchemar, cette ombre qui vous suit et ne vous lâche pas, prêt à tous les sévices, les plus inhumains, pour vous faire taire à tout jamais et parvenir à ses fins. Dans cet univers de ténèbres, de sexe bestial où sperme et monnaie en seraient les deux mamelles, seule l'épouse de max semble représenter une issue de secours, une seconde chance que se verrait offrir Tom non seulement pour retrouver une sexualité normale mais aussi cette vie tranquille à la campagne à laquelle il aspire. Ce sont les seuls moments du film qui respirent la fraicheur, la sérénité, ce retour à la normal que laisse entrevoir l'escapade de Tom et du couple d'amis dans les terres verdoyantes et sauvages de l'Angleterre profonde. Tom ne saura malheureusement pas saisir cette chance, dévoré par ses démons, incapable d'aimer et d'être aimé pour ce qu'il est, un être humain, un tragique constat qui nous vaut un des moments les plus émouvants du film.
L'aspect sexuel joue ici un rôle prédominant. Wicks est parvenu à instaurer une atmosphère particulièrement vénéneuse, à la fois belle et terriblement dangereuse. Derrière les murs de ce loft multicolore aux couleurs fluo aux décors hi-tech se cachent les pires perversions filmées sur bandes vidéos. Entre attirance et répulsion, amour et haine, envie et dégout, Tom se perd ou se cherche, à la fois fasciné et révulsé par son principal client. Cette fascination le spectateur la ressent aussi, créant un indicible malaise, charnel, envoûtant, suffocant, presque claustrophobe à l'image même de ce monde dans lequel Tom s'est enfermé. Wicks sait parfaitement faire monter la tension sexuelle, lentement, inexorablement, mettre en place un véritable climax, montrer les rapports de force entre dominants/dominés qui finalement conduiront à la sanglante tragédie. Aussi violent soit il le sexe est empreint d'une sensualité exacerbée susceptible de faire naitre chez le spectateur tout un flot de fantasmes à l'image
même de Tom interprété par l'étourdissant Daniel Newman, éblouissant dans ce rôle particulièrement difficile. Découvert adolescent dans Robin des bois puis le Dracula de Coppola, Il est ici une "salope" plus vraie que nature, à la fois fort et fragile, jouant avec une étonnante justesse sur l'ambiguïté de se émotions, un mélange de plaisir et de dégout, de tendresse et de fermeté. Dangereusement beau, il séduit, fascine autant qu'il enflamme les sens du spectateur qui se laisse alors aller dans un monde de désirs et d'interdits masculins. Si la nudité reste discrète, Wicks se permet cependant quelques plans propre à exalter notre libido, léchant de sa caméra ses courbes parfaites, son corps svelte et musclé, son fessier de rêve ainsi qu'une séquence de douche fantasmatique à l'homo-érotisme exacerbé où Daniel dévoile enfin pour notre plus grand plaisir toute son intimité.
Tout aussi brutales sont les scènes de violence et les meurtres, dignes d'un véritable film d'horreur. Wicks n'y va pas avec le dos de la cuiller. On frappe, on fracasse, le sang coule. Les tortures qu'il inflige à ses protagonistes devraient également en mettre plus d'un mal à l'aise. On retiendra notamment la scène où un malheureux gérant de boite est sodomisé à l'aide d'un pieu en métal géant, la castration de l'inspecteur qui n'est pas sans rappeler celle de La dernière maison sur la gauche et surtout le supplice de la chaise roulante durant lequel les plus sensibles fermeront surement les yeux. Quant au massacre de Norris, il n'est jamais que l'extériorisation de ce que Tom a emmagasiné en lui durant toutes ces années passées sous le joug de son maitre. Et c'est sur une note tout aussi âpre que se conclura le film. Pas de happy end ici, Wicks confirme tout simplement le vieil adage qui dit qu'on ne change pas la nature profonde de l'homme. Pute tu es, pute tu resteras.
Certes Cercle vicieux n'est pas parfait. Il est parfois maladroit, pas toujours crédible. Wicks est cependant parvenu à mettre en scène un thriller malsain et redoutable aussi torride que brutal sur fond d'analyse psychologique intimiste un brin superficielle à travers la relation de couple que vivent les amis de Tom. Fascinant, troublant, Cercle vicieux devrait marquer les esprits non seulement par sa noirceur et son pessimisme mais également par sa dépravation. Quand homosexualité et jeux de domination/soumission forment un cocktail explosif, celui ci ne peut qu'assouvir notre soif de perversion encore plus s'il nous est servi par de jeunes adonis qui se louent sur simple demande.