Liquid sky
Autres titres:
Real: Slava Tsukerman
Année: 1982
Origine: USA
Genre: Science-Fiction
Durée: 112mn
Acteurs: Anne Carlisle, Paula E. Sheppard, Susan Doukas, Otto Von Wernherr, Bob Brady, Elaine C. Grove, Stanley Knapp, Jack Adalist, Lloyd Ziff, Harry Lum, Sara Carlisle, Roy McArthur...
Résumé: Margaret est une jeune modèle new-yorkaise qui aime errer dans les milieux branchés underground. Un jour, elle découvre qu'une mini soucoupe volante a atterri au sommet du toit de son immeuble. Des micro-aliens observent les humains et plus particulièrement Margaret et son double masculin, le flamboyant Jimmy, créature androgyne adulée tant par les hétérosexuels que les homosexuels. Ces aliens se nourrissent d'une drogue nommée Liquid sky proche d'une substance que produit le corps lors de l'orgasme. Margaret découvre que son corps fabrique cette drogue lorsqu'elle fait l'amour. Elle se retrouve au coeur d'une série de meurtres bien malgré elle puisqu'elle tue ses amant(e)s lors de ses ébats...
Liquid sky qui dans le langage des héroïnomanes désigne une héroïne pure est une sorte de video-clip géant situé dans l'univers underground new-yorkais des marginaux branchés où vit Margaret, la principale protagoniste de cette fable moderne de science fiction.
Sorte de long délire néo-psychédélique tout illuminé de néons multicolores où erre une faune hétéroclite au son d'une musique synthétique répétitive et d'incessants bip-bip électroniques que n'aurait pas renié Alfonso Brescia , Liquid sky est une plongée glaciale au coeur du rêve d'un junkie où défile toute une galerie de drogués à la sexualité tout aussi bigarrée, un gigantesque catalogue du 3ème sexe où chacun tente de fuir ses frustrations dans des d'appartements hi-tech et des boites de nuit aussi étourdissantes qu'impersonnelles.
Au milieu de cette faune branchée, Margaret, une jeune modèle androgyne, personnifie l'essence même des tourments et des désirs inassouvis auxquels elle tente d'échapper à l'instar de ses compagnons en se perdant dans les paradis artificiels des drogues. Elle symbolise la femme sans cesse à la recherche de quelqu'un de supérieur afin qu'il s'occupe d'elle sans quoi elle s'effondre et peu importe d'où viennent ces personnes même si c'est de l'espace.
Son androgynie lui permet d'interpréter également Jimmy, son double masculin, une créature qui incarne la beauté masculine gracile adulée par le milieu tant hétérosexuel que gay. Comme Margaret Jimmy souffre de ses propres frustrations. Il est imbu de lui même, narcissique jusqu'à l'auto-destruction ce qui le rend particulièrement vulnérable. Il est par delà sa perfection physique l'image même de la destruction.
Liquid sky dresse en fait le portrait d'une jeunesse désillusionnée qui n'attend aucune aide de ses semblables. C'est donc d'ailleurs qu'elle viendra, sous la forme d'une mini soucoupe volante qui va une nuit atterrir sur le toit de l'immeuble où habite Margaret.
Cette arrivée coïncide avec une vague de morts étranges puisque certaines personnes dans l'entourage de Margaret disparaissent étrangement sans laisser de trace. Un astrophysicien va alors découvrir le secret de la jeune fille. Elle tue ses amant(e)s au moment de l'orgasme, ceux ci s'évaporant comme absorbés par le néant. Margaret bien involontairement se retrouve mêlée à ces meurtres car sans connaître l'existence de cette substance, ses orgasmes lui procurent l'équivalent de cette drogue appelée Liquid sky. Très attentifs, les micro-aliens observent ces accouplements car pour survivre ils ont besoin de se nourrir de cette hormone proche de l'opium que le cerveau produit lors de l'orgasme. A leur façon ces extra-terrestres sont eux aussi des junkies en manque qui tentent désespérément à travers cette substance de survivre. Margaret l'assimile donc à ces aliens jusqu'à vouloir ne plus faire qu'un avec eux et trouver dans cet ailleurs cosmique son propre paradis.
Raconter Liquid sky est presque impossible tant il est compliqué et surtout visuel. Tsukerman a réalisé un film avant-gardiste qu'on pourrait qualifier d'auteurisant pouvant être vu comme un rêve pénétrant branché glacé et glacial tout auréolé de néons roses et bleus du plus bel effet.
Ce petit budget tourné au tout début des années 80 pour la plupart avec des acteurs non professionnels est une vision de la société de ces années là, de ses contradictions dans l'univers new wave que Tsukerman caricature d'une manière que certains pourront juger un brin énervante. Son coté cérébral pourra certes séduire mais il pourra très certainement en irriter plus d'un également en leur donnant une affreuse migraine.
Le principal intérêt de Liquid sky que chacun pourra interpréter à sa manière réside presque uniquement dans ses délires et son esthétique, ses costumes avant-gardistes, ses maquillages et son jargon particulièrement ordurier et obscène qui devrait plaire à un public friand de trivialité. On ne compte plus en effet les cock, assholes, fuck et autres cunt qui enjolivent de façon bien indécente les dialogues de cette fable cyberpunk alambiquée.
L'autre gros atout du film est la double interprétation absolument parfaite de l'androgyne Anne Carlisle dont c'était là le premier film. Elle incarne une Margaret étonnante, junkie désespérée en quête de l'orgasme absolu, et un Jimmy qui évoque sans mal un certain Steve Strange dont l'ultime érection lors d'un speed débouchera sur le néant. A ses cotés, on retrouve Paula E. Sheppard, la jeune héroïne de Alice sweet Alice dans le role d'Adrian, la voisine de Margaret, particulièrement obscène et perverse.
Si Liquid sky est un conte moderne new wave sur la jeunesse droguée et égarée des années 80 dans un contexte branchouille pop underground c'est aussi un conte sur l'attente du Grand Amour dont les personnages sont des princes et des princesses d'aujourd'hui lâchés dans une société où désormais le sexe est un élément indispensable et déterminant et le beau chevalier un être venu d'ailleurs donc des étoiles.
Cette fable dégénérée et cérébrale par instant maladroite est vite devenue un film culte dans les milieux underground. Le conseiller est tout à fait inutile tant les sensations qu'il procure seront senties et ressenties de façon très personnelle. Chacun se fera donc son propre avis avec ou sans tube d'aspirine mais gageons que cette faune hétéroclite bariolée séduira les admirateurs de toute cette époque.