Snuff
Autres titres: American cannibale / Big snuff
Real: Michael et Roberta Findlay
Année: 1976
Origine: USA
Genre: Horreur
Durée: 81mn
Acteurs: Margarita Amuchástegui, Ana Carro, Liliana Fernández Blanco, Michael Findlay, Roberta Findlay, Alfredo Iglesias, Enrique Larratelli, Mirtha Massa, Aldo Mayo, Callao Villanueva...
Résumé: Quatre bikeuses sillonnent l'état sur leur grosse moto. Elles sont les ordres d'un gourou dénommé Satan pour qui la liberté sexuelle signifie totale soumission. Il profite ainsi de ses disciples pour mieux les violer. Terry London est une jeune actrice ambitieuse amoureuse d'un bel héritier. Celui ci fut autrefois l'amant d'une des bikeuses. Terry se laisse embarquer dans la réalisation d'un étrange film tandis que les quatre bikeuses déboulent chez les parents du jeune héritier pour massacrer sa famille...
Snuff est sans nul doute un des films qui sut le plus faire parler de lui lors de sa sortie tout en créant toute une vague de scandales aux USA puis à travers le monde, gagnant au fil du temps une réputation de cult movie dans le milieu grindhouse.
Lancé à grands renforts de slogans publicitaires particulièrement évocateurs ("Le film que vous n’oserez JAMAIS voir jusqu’au bout!, "Un dernier quart d’heure à vous couper le souffle!", "The film they said could NEVER be shown", "The film that could only be made in South America…where life is cheap"), Snuff fut immédiatement classé X ce qui alors était réservé aux films à caractères pornographiques. Il est donc intéressant avant tout de revenir sur la genèse du film qui fut une des plus grosses escroqueries du cinéma des années 70.
Les origines du Snuff remontent à 1971 lorsque un producteur malchanceux, Allan Shackleton, alors à la tête de la Monarch, une petite maison d'édition de films X, se tourna vers la sexploitation afin de faire fortune, prêt à tout pour se faire un nom.
De Leur coté, les époux Findlay se cantonnaient dans la réalisation de petits grindhouse et autres hippie-movies tels que Satan's bed, Shriek of the mutilators et surtout Slaughter avec lequel il se firent remarquer. Slaughter exploitait le filon alors en vogue de l'affaire Manson en y mêlant deux autres genres, le drug-movie et le hippie-movie, qui illustraient avec force l'hystérie du mouvement et le culte qui l'entourait.
Très mauvais film que les Findlay avaient du mal à terminer, Slaughter tomba entre les mains de Shackleton qui flaira le coup du siècle. Il décida de le finir tandis que les Findlay vendirent leur version à la Paramount afin d'éviter toute confusion. Shackleton en changea le titre pour Snuff profitant de cette terrible rumeur qui courait alors sur l'existence de films
underground où on y tuait réellement les acteurs. Shackleton avait en main toutes les cartes pour lancer le plus grosse escroquerie cinématographique du moment et se faire beaucoup d'argent: Snuff le film où on meurt pour de vrai!
Snuff reprend donc l'histoire de base de Slaughter. Quatre "bikeuses" à leur tête The greedy bitch parcourent l'état. Elles sont sous les ordres d'un gourou dénommé Satan pour qui liberté sexuelle signifie totale soumission. Parallèlement on assiste aux amours d'une jeune actrice ambitieuse amoureuse d'un riche héritier qui fut l'amant d'une des quatre bikeuses. Les deux parties du scénario se rejoignent en fin de film afin de justifier le massacre de la famille de l'héritier.
En fait, Snuff n'est ni plus ni moins qu'un hippie movie, une sorte de trip sous acides post-woodstockien particulièrement inoffensif noyé dans une incessante musique rock plutôt agréable. Déçu serait donc celui qui s'attendrait ici à des flots d'hémoglobine et une accumulation de scènes de sexe puisqu'il ne se passe rien durant les 80 minutes de métrage.
Outre ses origines, tout l'intérêt de Snuff réside dans l'atmosphère que le film tente de mettre maladroitement en place, un indicible malaise qu'engendre quelques scènes parfois fascinantes qui essaient d'exploiter un bien triste fait divers à l'aide de quelques misérables dollars. Hormis des dialogues le plus souvent orduriers surnagent quelques séquences intéressantes comme la torture d'une bikeuse à qui on taillade les orteils, les exigences sexuelles du gourou qui mènera au viol d'une disciple, prise comme un animal devant ses consoeurs excitées.
Ces amorces malsaines dénotent avec le coté ultra soft de l'ensemble où tout est suggéré. Snuff oscille sans cesse entre décence et obscénité, l'aspect clean et gentil virant par instant vers le sordide sans jamais pourtant réellement démarrer. De ce déséquilibre, ces incessantes hésitations, naît une frustration compréhensible mais de là provient également l'étrange pouvoir de fascination qu'engendre Snuff.
Il en va de même pour le contenu sexuel du film tout aussi contradictoire. C'est à peine si on entrevoit quelques seins et si une petite culotte s'égare la caméra sait vite cacher ce qu'il y a à cacher à l'instar même des prises de produits illicites.
Mais c'est surtout son hallucinant final que le spectateur retiendra, cette fameuse séquence dite snuff que greffa Shackleton. Et en greffe on fit nettement mieux puisqu'elle apparait ici comme une vilaine pustule. Afin de la justifier, Shackleton transforme Snuff en film dans un film. Ainsi lors du final, le massacre de la famille s'arrête net et laisse place à cette scène aberrante où on voit soudainement une équipe technique dans le salon reconstitué. Un pseudo-réalisateur devient fou et découpe son actrice, vague sosie de la comédienne originelle, avant de lui trancher les doigts à la scie, l'éventrer et l'étriper sous l'oeil de la caméra qui filme la scène. Deux minutes de stupidité étonnante avant que Snuff ne s'arrête brusquement sans aucun générique ni même de mot FIN.
La séquence fut tournée en un week end par Shackleton lui même dans le salon d'un producteur de films porno, Carter Steven.
A sa sortie, Snuff souleva toute une vague de protestations, les ligues féministes se révoltèrent, la censure l'interdit tandis que le FBI s'empara de l'affaire et que les critiques le vomirent. Shackleton avait atteint son but et connut ainsi son heure de gloire tout en entretenant le mystère autour du film.
Si on enlève ce greffon grotesque, Snuff n'est qu'un simple drug-movie parfois très amateur fortement estampillé années 70 et spécialement bavard, un trip hallucinogène agrémenté d'une brise de douce violence dont on retiendra l'aspect psychédélique.
L'interprétation, pour la plupart des acteurs argentins inconnus ou non professionnels, est des plus quelconque mais on gardera en tête la beauté de Mirtha Massa et Margarita Amuchástegui ainsi que l'éphèbe Clao Villanueva et la figure de bad boy d'Enrique Larratelli.
On peut se demander encore aujourd'hui comment on put jadis se laisser prendre au jeu face à une telle farce.