I giorni cantati

Autres titres: The days are numbered
Réal: Paolo Pietrangeli
Année: 1979
Origine: Italie
Genre: Drame
Durée: 108mn
Acteurs: Paolo Pietrangeli, Mariangela Melato, Roberto Benigni, Franco Bianchi, Francesco Guccini, Paolo Ciarchi, Ivan Della Mea, Giovanna Marini, Alberto Ciarchi, Donatella Di Nola, Susanna Javicoli, Claudio Lizza, Pasquale Malinconico, Francesca Neonato, Anna Nogara...
Résumé: Marco fut à la fin des années 60 un chanteur engagé à succès. A l'aube des années 80 il n'est plus rien. Quadragénaire marié à une professeur il tente désespérément de composer et chanter mais plus rien ne fonctionne. Les temps ont changé, il n'a plus sa place dans cette ère nouvelle. Son entourage ne le supporte, sa femme le quitte. Il s'accroche à un petit groupe de jeunes musiciens qui ne le comprennent pas. Marco sombre...
Auteur, chanteur-compositeur politique qui eut en son temps sa petite réputation en Italie Paolo Pietrangeli, le fils du réalisateur Antonio Pietrangeli, s'est également essayé au cinéma dés le milieu des années 70. Il fait ses débuts en 1975 avec un documentaire politique intitulé Bianco e nero puis signe en 1977 l'adaptation du roman de Lidia Ravera et Marco Lombardo Radice, Si les porcs avait des ailes, très surement le film pour lequel on se souvient encore de lui aujourd'hui. Deux ans plus tard il réalise une oeuvre très personnelle tout aussi militante dans laquelle il se met lui même en scène, I giorni cantati.


Marco est un chanteur-compositeur engagé qui eut son heure de gloire à la fin des années 60. A la fin de la décennie, désormais quadragénaire, marié à une professeur de philosophie, il fait un bilan de sa vie et de son parcours professionnel. Le constat de toutes ses années passées est bien triste et le désespère. Marco sombre lentement dans une sorte de névrose. Son épouse Angela est lasse de le voir stagner, s'enfoncer un peu plus plus chaque jour dans des projets musicaux qui ne verront jamais le jour. Elle ne parvient plus à le prendre au sérieux et s'effondre régulièrement en larmes. Le petit groupe avec


lequel il compose et chante multiplie les échecs. Les temps ont changé, les messages ne passent plus aussi facilement qu'avant. La chanson n'est tout simplement plus une arme politique. Alors que tout va de plus en mal pour Marco trois jeunes artistes, deux garçons et une fille, viennent s'installer dans l'appartement voisin du sien. Il commence par les espionner puis essaie de devenir ami avec eux afin de pouvoir éventuellement travailler ensemble. Mais le courant a bien du mal à passer. Ils ne se comprennent pas. Marco finit par craquer. Il quitte sa femme, lâche ses amis et se réfugie chez les trois artistes. La cohabitation tourne à la catastrophe. Alors que les années 80 pointent leur nez Marco,


comme vidé, n'a plus la force de se battre. Il commet une tentative de suicide mais se rate...
Présenté à la Mostra de Venise en 1979 I giorni cantati c'est l'histoire d'une dérive, celle d'un homme en pleine tourmente assailli de questions, un artiste éternellement insatisfait qui ne parvient plus à trouver sa place à l'aube d'une nouvelle décennie faite de changements et de nouveautés à laquelle il doit faire face. Il se bat en chantant, crée, mais en vain. Tout s'effondre autour de lui, plus personne ne l'écoute et son entourage finit par l'abandonner. L'artiste se retrouve seul, il n'a plus sa place dans une époque qui n'est plus sienne. Il se déteste, se rend ridicule si ce n'est pathétique. Face à cette dure réalité il tente de se


suicider en montant sur le toit de sa voiture, arrêtée en plein milieu d'une autoroute, sa guitare à la main. Un camion fonce sur lui. Le film s'ouvre sur cette séquence et c'est dés lors un long flashback qui commence afin de nous faire découvrir les raisons qui l'ont poussé à cet acte radical. Et long est bel et bien le terme qui convient ici. Certes le film dure quasiment 110 minutes mais certains le trouveront si ennuyeux qu'il leur paraitra deux fois plus long!
I giorni cantati souffre en fait des mêmes défauts que Si les porcs avaient des ailes mais cette fois aggravés. Ils sont encore plus insupportables. Lent, bavard jusqu'à devenir


assourdissant à force de se transformer régulièrement en véritable cacophonie, Si les porcs avaient des ailes avait cependant un bel avantage: son contenu érotico-trash et son coté ordurier qui réussissait à tenir éveillé le spectateur pour le peu qu'il soit voyeur et trivial. Durant deux heures on subit ainsi les lamentations lucides mais grotesques de Marco, de longs monologues monotones, de longs silences souvent insupportables quand ce ne sont pas des dialogues pseudo intellectuels d'une extrême banalité, insignifiants voire absurdes. L'ensemble est d'autant plus pesant que la mise en scène est particulièrement molle, la caméra statique et l'interprétation peu convaincante, incapable d'exprimer la moindre


émotion, Paolo Pietrangeli en tête. Oui il se met à nu (dans tous les sens du terme ici, il aurait néanmoins pu nous épargner son strip-tease face caméra et sa course en tenue d'Adam à travers son appartement, cachant son sexe avec une guitare en forme de faucille-marteau) mais cela est loin très loin de suffire. Il n'a aucun sens de la tragédie, son jeu est particulièrement fade et vite ennuyant. Se mettre soi-même en scène dans un tel contexte mérite un certain talent qu'il ne possède visiblement pas. Tout fuse tout azimut, on se perd un peu, beaucoup, on décroche et au final on se moque bien des illusions perdues d'un artiste militant post soixante-huitard et de son auto destruction. Les acteurs qui l'entourent


dont certains sont des amis personnels de Pietrangeli (le compositeur Francesco Guccini) sont à l'avenant, ennuyeux, à l'exception de la toujours excellente Mariangela Melato (Angela) dont le jeu intense, puissant, nerveux, dénote avec le reste du film. A noter une des toutes premières apparitions d'un Roberto Benigni tout jeune et encore inconnu, une figuration quasi surréaliste lors d'un monologue délirant dans les couloirs de l'école. Les fans du jeune Franco Bianchi, le héros de Si les porcs avaient des ailes et ami du réalisateur, seront contents de le retrouver même si cette fois il ne se déshabille pas


(hormis le temps d'un bain et d'une brève scène de sexe à quatre plus suggérée que montrée).
En fait le seul et véritable atout du film, ce qui permettra à la plupart des spectateurs de s'accrocher et d'aller au bout du métrage hormis l'interprétation de Mariangela Melato c'est tout simplement sa bande originale faite de chansons souvent nostalgiques, très agréables à écouter, de compositions séduisantes qui témoignent de toute une époque aujourd'hui révolue. Faut-il encore être sensibles aux chants italiens! Le pari n'est donc pas gagné.


Cette remise en question se veut sincère, c'est un fait, Pietrangeli signe une oeuvre personnelle qui se voudrait difficile on ne peut le nier mais pour se faire il aurait fallu un certain talent, plus de professionnalisme et de profondeur également. Tout ce qui manque à Giorni cantati qui au final est d'un ennui mortel et ne suscite aucune réflexion encore moins une quelconque émotion. Un tel scénario avec plus de maitrise et aurait pu donner une oeuvre dense, tragique, forte en émotions. Quel dommage! Reste une pellicule témoin d'une époque mais elle se noie au milieu de plein d'autres du même genre qui la font vite, très vite oubliée. Est-ce étonnant si Paolo Pietrangeli dont ce sera l'ultime film se tournera par la suite vers la télévision et les shows familiaux sirupeux?