Tentazioni proibite
Autres titres: Voluptés diaboliques / Forbidden temptations
Real: Osvaldo Civirani
Année: 1965
Origine: Italie
Genre: Mondo
Durée: 85mn
Acteurs: Mario Colli, Brigitte Bardot, Dolly Bell, Anna Maria Bellincioni, Vivienne Bocca, Helen Bugge, Mara Carisi, Lidia Caroncini, Valerio Corradi, Silvana Corsini, Carol Danell, Carlo Dapporto, Yvonne De Carlo, Dana Ghia, Jean-Luc Godard, Uti Hof, Christine Keeler, Alan Kemp, Claudia Maiolini, Isa Mallucci, Anna Maria Mareglia, Karin Mayer, Lilli Melon, Alberto Sordi...
Résumé: Le réalisateur enquête sur l'évolution de la femme et son émancipation au coeur des années 60 en nous entrainant aux quatre coins de l'Europe mais également en Papouasie et en Afrique Noire...
Réalisateur touche à tout on doit notamment à Osvaldo Civirani quelques westerns spaghetti mais également un incontournable du film exotico-érotique, Il pavone nero / Le dieu noir, qui sera suivi de La ragazza dalle pelle di corallo, son ultime oeuvre en 1976. C'est cependant par le sexy mondo que le metteur en scène scénariste débuta sa carrière dés 1963 avec Sexy proibito avant de récidiver deux ans plus tard avec Tentazioni proibite connu en France sous le titre très alléchant de Voluptés diaboliques. Le film est il aussi sensuel et surtout diabolique que ce retitrage français le laisserait sous entendre? La réponse est malheureusement non.
Tentazioni proibite s'incruste dans le
filon des mondo qui prend pour principal sujet l'émancipation de la
femme à travers le monde en ce début d'années 60 tout en proposant au
spectateur une vision de la gent féminine assez sectaire parfois
misogyne mais très drôle tant l'ensemble est aujourd'hui désuet. Le film
de Civirani tente en fait d'allier le sexy mondo, le
sexy night movie, au mondo traditionnel en faisant de temps à autre le
parallèle entre la femme occidentale et la femme noire, dite primitive.
On voyage ainsi de Berlin à Paris en passant par Hambourg et Amsterdam
avec escale spéciale en Papouasie et en Afrique noire. De cabaret de
strip-tease en salon de maquillage Civirani propose de
découvrir la femme moderne, celle qui n'a plus peur des hommes qu'elle
aime virils, celle qui s'assume et assume donc sa sexualité puisque bien
évidemment le sexe est au coeur de tout.
Que trouvons nous donc au programme de ces tentations interdites? L'histoire de la femme moderne commence par un concours de Miss, une dizaine de jeunes filles tout juste majeures qui s'exhibent ai soleil en maillot de bain afin de conquérir le monde. Les guerrières des temps modernes portent désormais des bikinis pour partir à l'assaut de l'homme. Ainsi le narrateur nous présente t-il la femme d'aujourd'hui dont le premier geste de soldat est de se maquiller, un geste qu'on retrouve chez les femmes papous qui exécutent les mêmes rituels et gestes y compris capillaires. L'occidentale se crêpe et se fait une phénoménale choucroute, la femme primitive entretient sa jolie coupe afro. Une chose est sûre nous rappelle le commentateur, il faut souffrir pour être belle. La femme blanche souffre devant l'objectif des photographes pour être toujours plus belle, la femme papou souffre dans sa chair lorsqu'elle se fait tatouer le corps à l'aide de pointes qui lui transpercent la peau et la font abondamment saigner. A chacun sa définition du mot souffrance. Cette séance beauté se termine par une parodie de Blanche Neige. Miroir miroir dis moi qui est la plus belle? A force de vouloir toujours plus, on se défigure!
A Berlin les femmes font désormais des travaux d'hommes et travaillent dans des abattoirs avec un sourire émerveillé, une occasion de rêve pour Civirani de filmer quelques jolis dépeçages de boeufs et autres vidages d'intestins remplis d'excréments qui raviront les amis des bêtes, et de prouver ainsi qu'une femme sait se servir d'un couteau. Incroyable!
Toujours à Berlin Civirani nous propose d'aller à la rencontre d'une chanteuse strip-teaseuse de cabaret, une blonde vaporeuse qui séduit les foules mais qui s'avère être un homme travesti lorsqu'elle/il enlève finalement son soutien-gorge avant de faire un petit tour du coté des prostituées déjà bien mûres qui se mettent en vitrine puis de filmer un effeuillage assez particulier, celui d'une mannequin uniquement vêtue de papier journal!
A Londres les femmes font du vélo mais elles sont surtout beaucoup plus niaises comme le prouve cette blonde décolorée qui interrogée sur la bombe nucléaire et le régime politique de la Grande Bretagne se contente de bêler comme une chèvre! De quoi sous entendre que ces sujets sont strictement réservés aux hommes. Un grand moment d'hilarité. De manière plus générale la jeune femme anglaise est une marginale, une pré-hippie qui porte des pantalons, c'est d'ailleurs les anglaises qui nous dit-on ont porté pour la première fois le pantalon, et traine avec des hommes à cheveux longs.
L'anglaise plus raffinée vit quant à elle au coeur de la capitale et passe ses nuits dans des clubs huppés où se produisent quelques grands artistes telle Yvonne De Carlo.
La parisienne est encore plus téméraire. Qui d'autre pourrait oser un strip-tease au sommet de la tour Eiffel devant une publicité pour les apéritifs Dubonnet? Et le narrateur le confirme: les français sont très audacieux. Eux seuls peuvent mettre en scène pour un numéro de cabaret le jeu de la proie et du chasseur, une femme araignée capturant un bel Hercule dans sa toile! Paris ne serait pas Paris sans une visite au Moulin rouge et autres théâtres de music-hall, le monde de la nuit fait pour épater le bourgeois comme le dit si bien le narrateur. Quant à la jeunesse elle semble se résumer à un jeune éphèbe homosexuel nommé Bibi qui à la question Que faites vous de vos journées l'efféminé jouvenceau répond J'attends la nuit!
C'est en Italie que finit ce tour du monde du sexe faible avec ces pauvrettes es qui se lavent dehors dans des bassines mais on insiste surtout sur ces femmes qui se distinguent par des métiers d'hommes surtout les milanaises! Elles sont pompistes, on le savait elles adorent toutes pomper, ou travaillent dans des centres de recherches biologiques ou nucléaires pour sauver l'homme d'une éventuelle guerre. Mais l'italienne a le sens de la fête et aime s'amuser en festival et finir la nuit avec un whisky en twistant. Et quoi de mieux qu'un strip-tease en gondole à Venise sur le Canal Grande pour finir ce voyage au pays de l'absurde, pardon des femmes!
Plus rien n'arrête le sexe dit faible. C'est bien pour cela que la narration se termine par un sublime Où s'arrêteront elles alors qu'un carton apparait à l'écran: l'armée recrute des femmes!
Plus étranges sont les suggestions que laissent entrevoir certaines images finales en réponse à la question mentionnée ci dessus. Le film se clôt en effet sur un homosexuel particulièrement efféminé entrain de se refaire une beauté dans sa voiture, son caniche à l'arrière, après que la caméra de Civirani ait survolé un asile psychiatrique pour femmes de troisième âge! Supposerait-on que l'émancipation de la femme allait contaminer le sexe dit fort tout en aliénant les anciennes générations? De la part de telles créatures ce ne serait pas impossible. Nous les hommes ne nous laisserons pas faire! En ce sens Tentazioni proibite est bel et bien un mondo.
Accompagné d'une partition particulièrement ringarde mais amusante signée Lallo Gori Tentazioni proibite est un sexy mondo d'un autre temps, une bande vieillotte irrésistible tant elle est drôle aujourd'hui et surtout décalée. Narrée de façon sarcastique par un Mario Colli qui s'amuse à accumuler les erreurs, les jeux de mots et les réflexions avec un évident détachement cette succession de segments, de spectacles souvent maigrichons... la plupart fabriqués pour l'occasion, cette pellicule qui regroupe les canons de beauté d'alors est un immense éclat de rire qu'on pourra trouver soporifique voire ennuyeux pour le peu qu'on ne se prenne pas au jeu. Mais c'est le cas pour la plupart de ces sexy mondo des années 60.
A défaut de s'amuser le spectateur amateur de ces folles années pourra apprécier de revoir dispersés ça et là quelques grands noms de cette époque dont Brigitte Bardot se promenant à St-Tropez, Jean-Luc Godard, Yvonne de Carlo, Alberto Sordi, Dana Ghia, Dolly Bell... filmés fort probablement en catimini! Les autres passeront un agréable moment aussi léger qu'une culotte grand-mère, si démodé, si gentiment idiot dont on retiendra une magnifique phrase, une si juste réflexion: "Ce que fait l'homme la femme le casse!"
S'il n'y a rien d'interdit encore moins de diabolique dans ces tentations gageons qu'autrefois certaines séquences durent tout de même faire tourner la tête de quelques pères et mères la pudeur. Autres temps autres moeurs.