Una donna per 7 bastardi
Autres titres: Una donna per sette bastardi / The sewer rats / A woman and seven bastards / Una mujer para siete bastardos / Das rattennest / Mia gynaika gia 7 katharmata
Real: Roberto Bianchi Montero
Année: 1974
Origine: Italie
Genre: Drame
Durée: 89mn
Acteurs: Richard Harrison, Dagmar Lassander, Ivano Staccioli, Antonio Casale, Luciano Bartoli, Luciano Rossi, Alessandro Perrella, Gordon Mitchell, Andrea Checchi...
Résumé: Un homme handicapé tombe en panne sur une route désertique. Il trouve refuge dans un petit village minier abandonné où vivent sept individus peu recommandables qui passent leur temps à se méfier les uns des autres et à se battre. Il y a également une femme, une putain nymphomane et masochiste qui se donne ou se refuse à eux. L'arrivée de cet inconnu qu'ils surnomment Cripple va les rendre encore plus méfiants et agressifs. Qui est il? Que veut il?
Vétéran du cinéma de genre transalpin, Roberto Bianchi Montero débuta sa carrière au début des années 40 et ne cessa de tourner jusqu'à sa disparition en 1986. A la tête d'une filmographie particulièrement riche, du film d'aventures au spy movie en passant par le polar, le giallo, l'horreur, le mondo, le western, la sexy comédie et la pornographie en toute fin de parcours, il est pourtant plutôt difficile de trouver un film qui retienne réellement l'attention. Maladroits, anodins, trop fades, bricolés, les films de Montero sont souvent décevants et ne parviennent jamais vraiment à se hisser au dessus de la moyenne acceptable. Toute règle ayant une exception, le visionnage de Una donna per 7 bastardi s'avère vite être une agréable, très agréable surprise puisqu'on tient très certainement là cette fameuse exception.
Un homme surnommé Cripple en raison de son handicap, il claudique et doit s'appuyer sur une béquille pour marcher, tombe en panne de voiture au milieu d'une lande désertique. Après qu'un camion ait refusé de le prendre à son bord, l'homme trouve refuge dans une village minier abandonné perdu au milieu de nulle part dirait-on. Six individus peu recommandables y vivent reclus ainsi qu'une femme, Rita. A leur tête il y a Carl à qui le village appartiendrait. Gordon, un militaire, est son bras droit. Il y a également un attardé mental bossu et muet qui passe son temps à jouer de l'harmonica et espionner Rita, Dick un dangereux fugitif, Smith, un psychopathe évadé d'un asile, un jeune voyou sans nom et un vieil homme. Rita est la femme de Carl. Nymphomane, le plus souvent sous l'effet de l'alcool, elle aguiche ces redoutables personnages, se donne ou se refuse à eux, prenant un plaisir masochiste à se faire battre et violer régulièrement. L'arrivée de Cripple va encore plus semer le trouble parmi ces hommes qui ne cessent de se monter les uns contre les autres, de se haïr, pour de mystérieuses raisons. Tous se demandent qui est Cripple, ce qu'il est venu faire, ce qu'il veut, tentant de cacher quelque part dans le village une caisse d'or qu'ils se disputent férocement. La tension, la méfiance et la jalousie, ne vont cesser de monter d'autant plus que Rita semble vouloir attirer vers elle l'étranger qui dans un premier temps la repousse. Lentement mais sûrement Cripple va parvenir à dresser les six hommes les uns contres les autres ce qui conduira à une explosion de violence entrainant un véritable carnage alors que Rita agonise.
Il est assez difficile de résumer Una donna per 7 bastardi. Les quelques lignes ci dessus ne sont qu'un aperçu d'un film qui en fait est quasi dépourvu d'intrigue. Montero place simplement huit personnages, huit salopards, dans un contexte oppressant, ce village minier et ses quelques cabanes en bois délabrées, où ils vont quatre vingt dix durant se déchirer, se battre entre eux sans réelle raison si ce n'est celle de se rouer de coups au rythme des ardeurs de Rita. Puis arrive un étranger dont on ne sait rien qui ne fera qu'empirer les choses. Voilà les bases d'un scénario simpliste qui ne sera jamais plus développé. Il est tout aussi dur de classer le film dans une catégorie spécifique. Tout commence comme un western spaghetti, tout fait penser à un western apocalyptique, les situations, les dialogues, l'ambiance, mais dans un environnement moderne. De par cette atmosphère très particulière, le film pourrait donc se rattacher à ce filon mais il n'en est rien. Drame, thriller, exploitation, on le rangera là où on peut mais ce n'est pas le plus important. Peu importe le genre auquel il s'apparente, l'essentiel est qu'avec un embryon de scénario, trois lignes directrices, Montero a pour une fois réussi à mettre en scène une pellicule crasse qui captive et tient en haleine jusqu'aux ultimes minutes. Claustrophobe, Una donna per 7 bastardi est une oeuvre putride, poisseuse, à l'ambiance à couper au couteau, composée d'une série d'actes de violence qui met en exergue la face obscure de l'homme dans toute sa bassesse notamment la pingrerie et ce à quoi elle peut amener, le tout dans un climat de haine et de tension palpable. Aucun des six protagonistes n'inspire la sympathie bien au contraire, tous plus abjectes ou tarés les uns que les autres, de Carl au muet bossu frustré en passant par Smith malade mental névrotique sexuellement obsédé par Rita, le vieil homme incisif et Cripple, énigmatique boiteux, vindicateur sournois, aussi redoutable que ces brutes chez qui il a trouvé refuge. On pourrait penser que Rita, seul élément féminin de l'histoire, apporte un peu de douceur à ce récit maladif. Que nenni. Aussi belle et désirable soit elle elle n'est qu'une putain masochiste, alcoolique, qui s'amuse avec ces mâles, les allument, une nymphomane qui trouve du plaisir à être rossée et violée et fera son possible pour coucher avec l'inconnu qui lui résistera, provoquant sa colère, avant de lui succomber.
Una donna per 7 bastardi, titre fort explicite, n'est certes pas très original. Le fil conducteur est somme toute classique et la révélation en toute fin de bande du fameux secret n'a strictement rien de surprenant. Il n'est jamais révélé que pour donner un semblant d'explication à l'histoire qui finalement aurait pu s'en passer. Cela n'aurait rien changé au film, l'objectif de Montero n'étant pas d'être authentique. Toute sa force et son intérêt résident outre dans cette atmosphère putride presque irréelle dans ses personnages et le jeu parfait d'une excellente brochette d'acteurs tous plus inquiétants les uns que les autres, en tête la prestation névrotique d'un Ivano Staccioli psychotique toujours aussi parfait et celle d'Antonio Casale, implacable. Tout deux mènent avec brio cette horde de salopards composée également de Luciano Rossi, égal à lui même, dans la peau du bossu muet joueur d'harmonica, le vétéran Andrea Cecchi dont ce fut l'ultime rôle au cinéma, il mourra quelques mois plus tard, Gordon Mitchell, taciturne, en uniforme de l'armée, Luciano Bartoli et le jeune Alessandro Perella, figure récurrente du cinéma de genre vue dans une soixantaine de bandes en l'espace de dix ans. Richard Harrison, également co-scénariste du film avec Montero qui s'inspira fortement de Pour une poignée de dollars, campe l'énigmatique boiteux Cripple, très certainement un de ses meilleurs rôles. Quant à la fameuse femme du titre c'est l'incendiaire Dagmar Lassander, visiblement très en forme, qui l'incarne et apporte à l'ensemble un zeste d'érotisme morbide tout en offrant quelques plans de nu très sobres. Ses admirateurs seront ravis.
Una donna per 7 bastardi n'est pas très graphique ou délirant si on le compare à d'autres produits du genre sortis à cette époque. Il ne faut surtout pas en attendre un déluge de scènes sanguinolentes ou de déchainements de violence débridée. A l'inverse de certains de ses confrères, Montero reste assez sage si on excepte le final. Il évite la gratuité tout en canalisant cette violence. Il délivre là une oeuvre sombre, nauséabonde sublimée par une très jolie photographie de Mario Mancini qui met en valeur le décor apocalyptique de ce village poussiéreux abandonné balayé par le vent. C'est très certainement là le meilleur film de la carrière de son auteur, une pellicule à découvrir de toute urgence
Mis en scène avec talent, Una donna per 7 bastardi, sponsorisé visiblement par J.B et Marlboro, connut un destin assez particulier. Sorti en Italie en juin 1973, le film connut un succès d'estime et encaissa une jolie somme d'argent, soit quelques 70 millions de lire en fin de course. Aussi étrange que cela paraisse, le film disparut par la suite de la circulation pour ne plus réapparaitre, lentement oublié et enterré. Inédit en DVD à ce jour, inédit en VHS en Italie, un des rares moyens de visionner le film est une vieille vidéo anglaise sous titrée en néerlandais aux tons verdâtres. Il existe également une vidéo finlandaise, grecque et espagnole de durées plus ou moins inégales, la durée exacte du film dans sa version intégrale étant de 89mn. Una donna per 7 bastardi est un joli exemple de ce cinéma de genre italien, de ces oeuvres obscures, lugubres, semble t-il perdues ou oubliées, ces raretés et véritables curiosités, sortes de Graal pour l'amateur et le collectionneur qui se délecteront de ce petit film inclassable à réhabiliter d'urgence.